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Archive pour la catégorie 'Chroniques croisées'

Chronique croisée – Sorcières de Mona Chollet et Sorcières ! de Julie Proust Tanguy

Posté : 11 janvier, 2023 @ 7:24 dans Avis littéraires, Chroniques croisées | Pas de commentaires »

Sorcières (Chollet)Genre : Essai

Editeur : Zones

Année de sortie : 2018

Nombre de pages : 233

Synopsis : Tremblez, les sorcières reviennent ! disait un slogan féministe des années 1970. Image repoussoir, représentation misogyne héritée des procès et des bûchers des grandes chasses de la Renaissance, la sorcière peut pourtant, affirme Mona Chollet, servir pour les femmes d’aujourd’hui de figure d’une puissance positive, affranchie de toutes les dominations.
Davantage encore que leurs aînées des années 1970, les féministes actuelles semblent hantées par cette figure de la sorcière. Elle est à la fois la victime absolue, celle pour qui on réclame justice, et la rebelle obstinée, insaisissable. Mais qui étaient au juste celles qui, dans l’Europe de la Renaissance, ont été accusées de sorcellerie ?

Ce livre explore trois archétypes de la chasse aux sorcières et examine ce qu’il en reste aujourd’hui, dans nos préjugés et nos représentations : la femme indépendante – les veuves et les célibataires furent particulièrement visées ; la femme sans enfant – l’époque des chasses a marqué la fin de la tolérance pour celles qui prétendaient contrôler leur fécondité ; et la femme âgée – devenue, et restée depuis, un objet d’horreur.

Mais il y est aussi question de la vision du monde que la traque des sorcières a servi à promouvoir, du rapport guerrier qui s’est développé alors tant à l’égard des femmes que de la nature : une double malédiction qui reste à lever.

 

Sorcières ! Genre : Essai, Historique

Editeur : Les Moutons électriques

Année de sortie : 2016

Nombre de pages : 248

Synopsis : Nécromanciennes redoutables, guérisseuses ignorées, doubles obscurs des fées, femmes fatales livrées au bûcher… Rejoignez-les dans ce grimoire moderne qui vous révèlera les lointaines origines et l’étrange destinée de vos sorcières bien-aimées !

Fascinée par la figure de la sorcière, j’avais très envie d’en apprendre plus sur elle. Quel meilleur endroit que les livres ? J’ai donc lu à la suite Sorcières : la puissance invaincue des femmes de Mona Chollet et Sorcières ! le sombre grimoire du féminin de Julie Proust Tanguy.

Je m’attendais, pour les deux, à une analyse historique et sociologique de cette « créature », notamment pour Mona Chollet ; pour Julie Proust Tanguy, je penchais plus pour une évolution culturelle de la figure. Après avoir fini le premier, je me suis dit que le second pouvait le compléter.

 

Effectivement, ces deux essais m’ont paru complémentaires.

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La Colline des sorcières (Le Martyr de Salem), Thomas Satterwhite Noble

Mona Chollet se penche assez brièvement sur la sorcière « historique » avant de passer à la femme moderne, sa « condition », les injonctions qu’elle rencontre, les préjugés contre lesquels elle doit lutter, les jugements qu’elle s’attire par les choix qu’elle décide de faire. La sorcière est plutôt vue comme la raison pour laquelle les femmes sont dans la situation qu’elles connaissent – ou une des raisons tout du moins – mais aussi comme une insulte qu’on leur a jetée au visage pendant longtemps et qu’elles réutilisent maintenant de manière positive. On ne s’attarde donc pas vraiment sur la sorcière en tant que personnage historique ou de fiction : celle-ci est évoquée dans l’introduction (« Les Héritières »), puis dans la première partie (« Une vie à soi »). Viennent ensuite « Le désir de la stérilité : pas d’enfant, une possibilité », « L’ivresse des cimes : briser l’image de la vieille peau » et « Mettre ce monde cul par-dessus tête : guerre à la nature, guerre aux femmes ». La sorcière, en fin de compte, est vue comme modèle de femme libre, puissante et incontrôlable dans un monde qui n’a fait que tenter de contrôler les femmes, de les faire taire et de leur assigner des rôles qui ne leur donne aucun pouvoir.

Comme l’indique le titre de la deuxième partie, l’autrice écrit un chapitre entier sur l’absence de désir de maternité et, donc, le choix de la non-maternité. Elle donne à cela plusieurs raisons et c’est sans doute le passage qui m’a le plus perturbée. En effet, elle évoque des aspects de la grossesse, de l’accouchement et de la maternité que l’on passe sous silence ou auxquels on ne pense pas quand on pense à avoir un enfant. J’ai eu une impression de justification un brin gênante, même si je reconnais qu’il est important aussi d’affirmer ses propres choix : chacun devrait pouvoir décider de ce qui lui convient sans, justement, avoir à se justifier. C’est un choix tout à fait personnel que je respecte ; je n’avais pas, pour autant, envie de lire une « liste » de raisons pour lesquelles l’autrice avait choisi de ne pas avoir d’enfants. Cela m’a donné une impression désagréable, comme si décider d’avoir un enfant était considéré comme un mauvais choix. Evidemment, ce n’était pas l’intention de l’autrice, mais j’en ai gardé un goût un peu amer. J’ai également été dégoûtée et, même, franchement déprimée par la dernière partie/la fin qui se concentre sur les pratiques criminelles sexuelles dirigées contre les femmes : autant de noms, de mots et de descriptions que j’aurais préféré ne jamais lire – parce que je les connaissais déjà et qu’elles m’avaient déjà secouée.

Globalement, l’essai traite de la misogynie ou de la « condition féminine » sous toutes ses formes : les moqueries physiques ou mentales, le mythe de l’homme puissant face à la femme fragile et incapable de se gouverner, l’impact de la contraception dans la vie d’une femme, le rejet de la femme dans certaines institutions ou cultures et la place qu’elle pouvait occuper autrefois, les chasses aux sorcières (évidemment), le rôle de la religion dans la représentation de la femme. Combien de fois ai-je levé les yeux au ciel en lisant une citation tellement misogyne qu’on en rirait si l’auteur ne pensait pas ce qu’il disait ? Combien de fois ai-je annoté cet essai pour commenter lesdites citations ou tout autre partie du livre qui me hérissait le poil ? Il est toujours aussi énervant de lire qu’en tant que femme, l’on est faible, hystérique, inférieure ou trop passionnée.

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Circe Invidiosa, John William Waterhouse

 

De son côté, Julie Proust Tanguy réalise un portrait de la sorcière de l’Antiquité à nos jours, en montrant son évolution historique et culturelle. Ici, l’on (re)découvre donc les personnages de magiciennes inventées dans la mythologie, comme Circé et Médée, et la conception de la sorcière à cette époque pour glisser vers l’image médiévale de cette « créature ».

Je le précise ici : aucune des deux autrices ne fait l’erreur de situer les chasses aux sorcières au Moyen-Âge ou d’appeler cette période « les temps sombres » (« the Dark Ages »). Certes, les persécutions ont commencé à cette époque, mais leur apogée arrive à la Renaissance, un moment de l’Histoire que l’on n’associe pas du tout aux bûchers ou à la torture.

J’ai préféré cet essai au précédent parce que c’était ce que je recherchais à l’origine : une étude du personnage de la sorcière à travers le temps, voir ses origines, son évolution et son aboutissement au XXIe siècle ! Le lecteur comprend alors que la sorcière est surtout un personnage inventé, loin de la réalité des femmes de toute époque. Elle est celle qui fraie avec le Diable et permet de rappeler que la femme est si faible qu’elle se laisse séduire par le Malin. D’où la parution, en 1486, de ce merveilleux livre qu’est le Malleus Maleficarum, le Marteau des sorcières, qui décrit tout un tas de choses fort sympathiques dont les méthodes de reconnaissance des sorcières, avec différents moyens de torture et tout ce qui va avec. L’autrice évoque donc aussi le rôle de la religion dans la création de cet archétype. Le choix des victimes est également analysé : ce sont souvent de vieilles femmes seules qui vivent à l’écart des communautés et qui ne peuvent pas se défendre contre le système mis en place pour traquer les sorcières. L’autrice traite également le rôle de la médecine, discipline interdite aux femmes mais qu’elles s’appropriaient tout de même, notamment par leur connaissance des plantes. Elle évoque une concurrence entre les deux professions, médecins et guérisseuses, et la victoire des premiers sur les secondes.

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Couverture de Wyrd Sisters de Terry Pratchett

Un autre aspect est abordé dans les deux essais : les sorcières modernes, celles qui pratiquent la magie blanche ou la wicca. Elles évoquent – notamment Julie Proust Tanguy – les cristaux, les sortilèges et autres rituels. J’adore l’idée de la magie, j’ai notamment envie d’en apprendre plus sur les cristaux ou le tarot ; mais c’est là que cela s’arrête pour moi. Je ne parviens pas à adhérer à l’idée de concocter effectivement des potions, de lancer réellement des sorts, de prédire l’avenir dans les cartes. C’est pour moi plus subtil que cela, différent. J’ai donc moins apprécié les parties qui l’évoquaient tout en les lisant avec intérêt.

Pour résumer cet essai, Julie Proust Tanguy rend hommage à la sorcière en nous montrant ses origines, plongées dans les ténèbres, jusqu’à nos jours où, majoritairement, elle combat le mal au lieu de le propager. J’ai adoré ces heures de lecture et j’ai maintenant une belle pile de livres à explorer !

 

Donc, je recommande la lecture de ces essais : ils apportent des informations différentes et sont passionnants à leur manière. La sorcière est aux fondements des deux ouvrages mais elle est exploitée très différemment. Le lecteur apprend, ressent et ne sort pas les mains vides de ces deux voyages !

 

La mort du fossoyeur

La Mort du fossoyeur, Carlos Schwabe

Chroniques croisées #1 : Le livre : une histoire vivante de Martyn Lyons et Bibliothèques : une histoire mondiale de James W. P. Campbell et Will Pryce

Posté : 31 mars, 2018 @ 2:53 dans Avis littéraires, Chroniques croisées | Pas de commentaires »

Genre : HistoriqueLe livre une histoire vivante

Editeur : Ouest-France

Année de sortie : 2011

Nombre de pages : 224

Titre en VO : Books: A Living History

Synopsis : Depuis deux mille cinq cents ans, les livres servent à gouverner, consigner, vénérer, éduquer et distraire. Cet ouvrage aux illustrations luxueuses explore l’une des technologies les plus extraordinaires, essentielles et durables jamais inventées.

Le livre : une histoire vivante retrace l’évolution et l’influence du livre partout sur notre planète, des tablettes cunéiformes de la civilisation sumérienne jusqu’à l’essor du livre mobile et la révolution des moyens d’informations modernes. Parmi les illustrations, sélectionnées avec soin, figurent des manuscrits maya, des rouleaux de papyrus égyptiens, des enluminures médiévales, des chefs-d’œuvre de l’imprimerie de Gutenberg et Aldo Manuce, les atlas des Grandes Découvertes, des alphabets et des livres pour enfants, des romances à trois sous et des mangas japonais, ainsi que des œuvres de fiction allant de Don Quichotte à Level 26, le premier « roman numérique » au monde.

Un régal pour les amoureux du livre traditionnel, ainsi qu’une source d’inspiration pour les passionnés des nouvelles technologies électroniques : cet ouvrage magnifique célèbre le pouvoir et la magie éternels du livre.

 

 

Bibliothèques une histoire mondiale Genre : Historique 

Editeur : Citadelles & Mazenod 

Année de sortie : 2013 

Nombre de pages : 311 

Titre en VO : The Library: A World History 

Synopsis : Les collections de livres ont de tout temps symbolisé la culture et les savoirs de leurs propriétaires. Dans la plupart des langues, le mot « bibliothèque » a fini par désigner à la fois les collections et les bâtiments qui les hébergent. Les riches et les puissants ont dépensé sans compter pour ces constructions et, dans son expression la plus accomplie, la bibliothèque est devenue un ouvrage d’art total, associant peinture, sculpture, mobilier et architecture dans des espaces spectaculaires.

Les architectes ont cherché à se surpasser mutuellement, depuis les bibliothèques de la Rome antique jusqu’à la Bibliothèque nationale de France, en concevant des cadres toujours plus étonnants. Chaque époque, chaque culture a réinventé ce concept, le façonnant à l’image de ses priorités et de ses préoccupations, et transformant de ce fait la bibliothèque en un véritable miroir des civilisations.

Voici la première publication qui, en un seul volume, retrace cette histoire à travers le monde, des débuts de l’écriture à nos jours, de la Mésopotamie ancienne jusqu’au Japon contemporain. L’auteur et le photographe ont sillonné la planète ensemble, visitant et étudiant quelque quatre-vingt bibliothèques. L’historien de l’architecture James W. P. Campbell en a tiré une synthèse qui se lit aisément tout en faisant autorité. Will Pryce est l’un des photographes d’architecture les plus en vue. Ses clichés saisissants offrent une vision à la fois précise et évocatrice.

Les plus belles bibliothèques, au-delà des livres qu’elles abritent, reflètent aussi les acquis, la créativité et l’esprit d’un temps ; elles incarnent la quintessence des réalisations humaines. James W. P. Campbell et Will Pryce proposent ainsi un ouvrage de référence qui, par son ambition et son envergure, constitue une somme unique.

 

Avis : J’adore lire des œuvres sur les livres, leur histoire, et les lieux qui les renferment ; quand j’ai trouvé ces ouvrages à la BU, je les ai emportées avec plaisir ! Je me suis dit qu’étant donné que Le livre : une histoire vivante et Bibliothèques : une histoire mondiale traitent tous deux des livres, ce pouvait être sympa de faire, pour la première fois, une chronique croisée.

Le livre : une histoire vivante, possède un titre tout à fait explicite, comme Bibliothèques : une histoire mondiale ! Tous deux traitent de l’histoire, de l’Antiquité à nos jours, dans des endroits très divers, et pas seulement en Europe et aux Etats-Unis. Le lecteur voit donc évoluer les livres, et les endroits qui permettent de les conserver. Lire ces deux œuvres l’un après l’autre est vraiment enrichissant, et permet de rester plonger dans l’histoire ; le mieux aurait été de lire ensemble les chapitres qui se correspondent ! J’ai appris beaucoup de choses avec ces deux livres ! Je trouve que l’ouvrage de Martyn Lyons est plus une introduction à l’histoire du livre qu’une œuvre complète sur celle-ci. Il permet seulement d’aborder les grandes réflexions et les grandes questions liées à l’évolution du livre, son passé, mais aussi son avenir. L’auteur est convaincu que le livre papier a un avenir, et le défend presque férocement ; quand à James W. P. Campbell, lui aussi pense qu’il reste important et qu’il ne se fera pas détrôner par le livre numérique, étant donné que les bibliothèques restent très fréquentées, qu’encore aujourd’hui, de nouveaux bâtiments voient le jour. Ceux-ci s’adaptent aux nouvelles demandes, ce qui leur permet de rester importants dans le monde du livre.

Concernant les ouvrages, on passe des tablettes d’argile au rouleau, jusqu’au codex – encore en usage aujourd’hui – et au livre numérique. L’évolution de l’imprimerie est aussi évoquée, ainsi que la création des librairies et des bibliothèques ! Celles-ci suivent l’évolution des mouvements artistiques, du goût de l’époque, mais deviennent également de plus en plus fonctionnelles. Cela ne se fait pas pour autant au détriment de l’architecture ; les bibliothèques modernes restent magnifiques.

Les deux livres comportent de nombreuses photos en couleur et des illustrations. Honnêtement, Bibliothèques : une histoire mondiale est le rêve de tout lecteur passionné : des pages et des pages de photos qui donnent envie d’entrer dans le livre ! Elles m’intéressaient d’ailleurs plus que les descriptions et les explications, qui me paraissaient parfois de trop, justement à cause des photos – les légendes ne répétaient parfois que le texte central. J’ai tout de même aimé apprendre l’histoire même des bibliothèques, la raison de leur création, les personnes qui les ont « commandées », les constructeurs ; c’était très intéressant ! Ce livre m’a encore plus donné envie de faire le tour du monde des bibliothèques !! Et d’avoir, plus tard, ma propre bibliothèque (aussi gigantesque que possible !)

Les petits bémols : quelques fautes dans le premier livre, et le lecteur pouvait sentir qu’il avait été traduit. Pour le second : le poids !!!!! C’est une blague, bien sûr, mais c’est vrai qu’il était un peu compliqué de lire ce livre tant il était lourd à porter !

Donc, de très bons ouvrages qui permettent de découvrir un peu l’histoire des livres et des lieux dans lesquels ils se trouvent. Le type d’œuvres qu’on aimerait avoir sur ses étagères !!

 

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