Redbluemoon

I found myself in Wonderland.

Archive pour décembre, 2015

Grimms Manga de Kei Ishiyama

Posté : 30 décembre, 2015 @ 2:30 dans Avis littéraires, Coup de cœur | 4 commentaires »

Grimms MangaGenre : Manga, Conte

Editeur : Pika

Année de sortie : 2012

Nombre de pages : 448

Synopsis : Découvrez ou redécouvrez les plus beaux contes des frères Grimm adaptés en manga dans une édition double aux couleurs de Noël. Un hommage pétillant d’humour et de modernité, où Kei Ishiyama crée son propre univers pour nous faire revivre ces contes fabuleux. Portés par des valeurs universelles, les récits des frères Grimm continuent de séduire les lecteurs, fascinés par des histoires fantastiques et pleines de magie.  

 

Avis : Ce livre m’a été offert pour Noël, et cela faisait longtemps que je voulais le lire ; je n’ai donc pas hésité à me lancer ! J’ai été transportée d’emblée dans le monde de l’auteur, que j’ai trouvé à la fois féérique et poétique. On ressent les émotions des personnages, et certains nous touchent vraiment, comme Chandelle, ou Elizabeth. Les réécritures sont originales, et modernisées : pour la première fois, j’ai apprécié Blanche-Neige, que je ne supporte pas habituellement ! C’est, bien sûr, remanié, pour pouvoir tenir dans une petite histoire traduite en dessins. Certains mangas demandent deux parties. J’ai particulièrement apprécié « Blanche-Neige », « Le Chat Botté », « Le roi grenouille » ; et les réécritures les plus originales sont pour moi « Le petit chaperon rouge », « Raiponce » et « Hansel et Gretel » ; j’ai aimé tous les contes, même ceux que je ne connaissais pas !

Quant aux graphismes, ils sont superbes ! Les dessins sont vivants et capables de nous transmettre la portée de ce qui arrive aux personnages. La couverture présageait déjà de merveilleux dessins ; l’édition est très belle. De plus, certains personnages sont mignons comme jamais, et nous font compatir à ce qui leur arrive, comme Chandelle, ou le Chat Botté ; ils sont tous très émouvants, et participent pleinement à notre entrée dans le monde du livre. J’ai également découvert des contes que je ne connaissais pas, comme « La fauvette-qui-chante-qui-sautille », ou « Les douze chasseurs », ce qui me donne envie de lire la version originale. Les strips et crayonnés, ainsi que les planches en couleurs sont splendides, et donne encore davantage vie aux contes. 

L’humour se trouve également dans ce manga, ce qui donne lieu à des scènes incongrues, ou très mignonnes. Il compense la gravité de certaines contes, comme « La fauvette-qui-chante-qui-sautille », où l’humour est absent. Il est présent notamment chez « Blanche-Neige », et chez « Le Chat Botté ».

 

En définitive, un excellent manga, qui nous fait découvrir les contes revisités de façon originale, et qui nous laisse la tête pleine de poésie !  

Iphigénie de Racine, suivi de Iphigénie à Aulis d’Euripide

Posté : 29 décembre, 2015 @ 7:52 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

IphigénieGenre : Théâtre, Classique

Editeur : Pocket

Année de sortie :2013 

Nombre de pages : 132

Synopsis : 1674. L’helléniste Racine prépare son Iphigénie afin de montrer à la Cour, et « aux siècles à venir » dit-il, comment on écrit une tragédie grecque en français. Dans la rade d’Aulis, un calme plat immobilise la flotte des princes grecs en route pour le siège de Troie. Consulté, le devin Calchas annonce à Agamemnon, leur chef tout-puissant, que les vents ne se lèveront qu’au prix du sacrifice de sa fille Iphigénie. Agamemnon y consent. On fait venir la jeune femme, en lui faisant croire qu’elle va épouser son prétendant Achille. A sa joie de courte durée, succède la résignation. Elle est prête à offrir sa vie pour sa patrie. Mais c’est compter sans l’inconstance des dieux …

 

Avis : Une pièce que je vais prochainement étudier et que j’avais envie de découvrir !

Le synopsis de cette édition est un peu trop complet à mon goût : il dit tout, ce que je trouve dommage. Mais cela n’empêche pas de savourer l’œuvre de Racine. Il reprend ici le mythe d’Iphigénie, fille d’Agamemnon et de Clytemnestre, qui doit être sacrifiée à la déesse Artémis pour permettre à la flotte grecque de partir en mer attaquer Troie. Racine a déjà repris des histoires mythologiques, comme celle d’Andromaque, ou de Britannicus, mais, cette fois, il s’appuie également sur une œuvre antérieure : Iphigénie à Aulis d’Euripide, présente juste après la tragédie du dramaturge français. C’est donc un double livre, si on peut parler de cette façon, qui nous offre deux œuvres complémentaires. Tout d’abord, l’Iphigénie de Racine : la façon de présenter les actes et les scènes est agréable, ainsi que la manière de mettre en place les répliques. L’écriture de l’auteur est sublime, comme on peut s’y attendre, et ses vers sonnent parfaitement. Quant à Iphigénie à Aulis, la typographie est beaucoup plus serrée, ce qui rebute un peu le lecteur, et ce qui est un peu gênant pour le changement de réplique. On sent également que l’on a affaire à une traduction, les tragédies grecques étant écrites d’une certaine manière. Les paroles des personnages semblent moins naturelles, et les stasimons coupent l’action de la pièce. Les deux œuvres ont des fins différentes ; je ne connaissais moi-même pas la même avant de les lire. Celle de Racine est originale, et fait intervenir un personnage qui, me semble-t-il, a été inventé par l’auteur : Eriphile. Une partie de la tragédie se concentre sur elle, et elle participe à son dénouement.

Iphigénie ne change pas entre les deux œuvres : jeune fille qui adore son père, et qui est aimée par lui, elle est douce et courageuse, et la haine ne semble pas pouvoir se trouver dans son cœur. Elle est pure et raisonnable. La seule différence est peut-être l’enthousiasme que dépeint Euripide : la jeune fille se voit comme sauveteur de la Grèce, comme la seule à pouvoir permettre la guerre contre Troie et la réparation des torts d’Hélène. Le lecteur s’attache facilement à Iphigénie, et prend pitié de sa situation : elle ira bien vers l’autel, mais pas comme épouse d’Achille. Agamemnon, à la fois roi et père, se voit déchiré entre ces deux rôles qu’il lui faut jouer. La décision qu’il prend semble inadmissible, comment peut-on tuer sa fille pour aller faire la guerre ? Mais pour les Grecs, c’est un moindre mal : qu’est-ce qu’une fille face à des milliers d’êtres ? De plus, il faut venger Ménélas, qui s’est vu voler son épouse. Agamemnon ne semble donc pas pouvoir trouver d’issue : entre le déshonneur et le crime, c’est le second qu’il choisit. Son cœur parle pourtant, et il ne peut se résoudre à accepter sans broncher le commandement des dieux. Il tente ainsi de les braver dans la pièce de Racine. Loin d’être froid et insensible, c’est la malédiction des Atrides qui pèse sur ses épaules, et dont il ne peut se débarrasser. Il semble aussi porter le poids de sa noblesse, qu’il doit prouver. Clytemnestre, quant à elle, passe de mère heureuse de marier sa fille à femme désespérée qui perd son enfant. Cela annonce les prémisses de sa trahison envers son mari, qu’elle finira par détester. Achille est également présent : il est pris comme prétexte pour attirer Iphigénie à Aulis. Il m’a semblé plus passionné chez Racine que chez Euripide, où il est plus sage et mesuré. Eriphile, personnage apparemment inventé, porte une grande partie de la tragédie. Elément perturbateur et déclencheur, elle joue également un grand rôle à la fin de la pièce. Esclave et désespérée, elle suscite la pitié du lecteur : elle ne sait pas qui sont ses parents, et se voit éprise d’un homme qu’elle n’aurait jamais dû aimer. La fatalité s’acharne sur elle, et les dieux en font leur jouet, autant que les autres personnages. Ménélas n’apparaît que dans la pièce d’Euripide, et son changement d’attitude à l’égard de son frère et de sa nièce ne semble pas cohérent, vu sa rapidité. Il passe pour un frère indigne, puis pour un frère qui se sacrifie, et qui renonce, quand ce n’est plus possible. Ulysse joue ce rôle dans la pièce de Racine : il tente de convaincre Agamemnon avant de compatir à sa douleur.

Il m’a semblé que cette pièce traitait, à travers la fatalité qui touche Agamemnon, du sort qui peut s’abattre sur n’importe qui à n’importe quel moment. Le roi a beau être tout-puissant, a beau tout avoir, il doit renoncer à quelque chose, il doit souffrir et détruire pour obtenir ce qu’il veut. Cela montre un autre aspect de la royauté, derrière les richesses et le bonheur qu’on leur prête. Il faut soumis à des devoirs qui les oppressent, même si leurs droits sont supérieurs à ceux de leurs sujets. Ils sont menacés par le déshonneur à chaque pas, par l’opprobre, par la colère du peuple, qui peut se soulever pour les renverser. Leur sort n’est pas enviable, ils sont torturés psychologiquement, ce qui les pousse vers la folie.  

La fin des deux œuvres tend à réduire la tragédie, même si quelqu’un meurt tout de même, et que de nombreuses morts suivent dans l’histoire de la famille des Atrides. C’était assez original par rapport aux autres tragédies où de nombreux personnages succombent par folie, amour, ou colère divine.

Petit plus dans cette édition : un dossier dans lequel se trouve toute l’histoire des Atrides, avant et après l’histoire racontée dans la pièce. Un vrai plaisir !

 

En définitive, une très bonne tragédie, différente des autres, et qui nous raconte l’histoire d’Iphigénie.

Le crime du comte Neville d’Amélie Nothomb

Posté : 28 décembre, 2015 @ 7:15 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Le crime du comte NevilleGenre : Contemporaine

Editeur : Albin Michel

Année de sortie : 2015

Nombre de pages : 135

Synopsis : « Ce qui est monstrueux n’est pas nécessairement indigne. »

 

Avis : Une petite cure d’Amélie Nothomb en ce moment, ça fait du bien ! Le titre m’intriguait, j’avais hâte de voir ce que le roman pouvait donner !

Toujours une couverture qui en jette, un peu insolite, une photo où l’auteure pose de façon originale. J’ai découvert, à ma grande surprise que, comme Barbe bleue, lu il y a peu, ce livre est une réécriture. Cette fois, c’est un mythe que l’auteure reprend, celui des Atrides, et j’ai adoré l’idée, que j’ai trouvé assez originale. J’aime beaucoup la mythologie, l’Antiquité, les légendes, et cette reprise m’a enchanté. J’avais hâte de voir ce que cela donnerait finalement ! Ici, le comte Neville rencontre une voyante qui lui prédit qu’il tuera un de ses invités pendant la fête qu’il donnera le 4 octobre. Cela va bouleverser le héros ; le lecteur va ainsi suivre ses réactions face à cette prophétie. C’est ainsi que l’on se rend compte de l’impact que peut avoir une prédiction sur la vie de quelqu’un : on finit par y croire, par se persuader que cela va arriver, par tenter de contrôler ce qui n’est pas contrôlable, par frôler la folie. Les prénoms ont encore une signification lourde : le destin s’y accroche, le lecteur sent le poids de ces noms, et s’attend à du tragique.

Le comte Neville est le personnage principal du roman ; criminel potentiel et annoncé, il ne comprend pas comment il peut tuer un de ses invités, ni lequel sera sa victime. Torturé par l’idée de perdre sa réputation et sa noblesse, il ne fait que penser en boucle à la prophétie de la voyante ; elle le hante et le transforme, il se voit capable de tout, et le jouet de forces qui le dépassent. Une demande horrible va lui être formulée, et sa réaction m’a choqué ! Cela montre le pouvoir d’un sort sur la conscience de quelqu’un : il est prêt à tout, et ce qui a été dit doit se réaliser. Alexandra, la femme du comte, m’a semblé très douce, parfaite, et m’a un peu fait penser à Oona O’Neill, héroïne de Oona & Salinger. Malgré le peu de pages, je me suis attachée à elle : elle m’a donné la vision d’une vie parfaite, d’un couple qui s’aime et que les années n’altèrent pas. Elle est heureuse dans sa vie de femme, d’épouse, de mère, et ne se laisse pas toucher par le malheur. J’ai aimé le passage où l’auteure décrit sa façon de changer de sujet quand celui-ci traite de problèmes. Les deux premiers enfants du comte Neville, dont je tairai les noms pour la petite surprise, ont l’air aussi parfait que leur mère. Ils sont beaux, talentueux, ont quelque chose que les autres n’ont pas. Quant à la dernière enfant du comte Neville, dont le nom dévie, et défie, le destin, elle est étrange, et tout à fait différente de ses frère et sœur. Quelque chose s’est passé en elle, quelque chose a changé, et personne n’y peut rien. Elle souffre de sa situation, sans que personne ne s’en rende compte. Elle m’a touché, quand elle aurait pu m’agacer ; j’ai ressenti de la compassion pour elle. Sa crise d’adolescence se double d’un autre problème, plus profond, plus grave. Le lecteur croise d’autres personnages dans ce livre : des nobles, comme le père du comte Neville, qui nous montrent la face cachée de la noblesse, Louise, que l’on découvre et que l’on aime tout de suite, malgré le fait qu’elle soit un personnage du passé, Béatrice, qui m’a fait mal au cœur pour le peu de temps pendant lequel elle apparaît.

L’auteure nous montre une noblesse différente de celle que l’on imagine habituellement. Ici, leurs privilèges sont des poids, et les empêchent de vivre comme tout le monde - et même de vivre tout court parfois. Le paraître est ce qui est le plus important pour eux, d’où les fêtes, les secrets. Ils doivent toujours se cacher derrière les apparences, doivent montrer qu’ils vivent une vie qu’en réalité, ils n’ont pas. Je n’avais jamais vu la noblesse de cette façon, et je dois dire que cela m’a un peu choqué. Surtout, l’histoire de Louise ; mais aussi la réaction du comte Neville sur les précédents, et son  »acceptation » de ce qu’il croyait ne jamais pouvoir faire, pour préserver les apparences, mais aussi pour ne pas détonner dans le paysage noble. Comment peut-on laisser faire tout ça ? La famille devient secondaire par rapport à la noblesse, à la vie que l’on doit sembler mener, à ce que les autres pensent de nous. Ce doit être horrible de vivre de cette façon, même – et surtout – si c’est dans un château ! Finalement, il est mieux de voir la vie du bon côté et de se dire que beaucoup ont moins que nous : il nous manque peut-être certaines choses, mais elles ne sont pas nécessaires, et ce que l’on a est déjà très bien.

La fin m’a surprise, elle est tout à fait différente de celles des autres livres d’Amélie Nothomb. Elle est très abrupte, ce qui est un peu décevant peut-être, mais qui peut aussi montrer la brutalité du changement de situation. J’ai ri du renversement, peut-être un peu soulagée aussi. C’est une bonne surprise en tout cas ! J’ai eu un peu l’impression d’un conte de fées, contrairement à une tragédie.

 

En définitive, un très bon roman, que j’ai beaucoup aimé, et que j’ai trouvé assez différent des autres ! Une bonne réécriture originale, et des personnages qui montrent un autre aspect de la noblesse, que l’on pense connaître sans savoir.

Oona & Salinger de Frédéric Beigbeder

Posté : 27 décembre, 2015 @ 11:36 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Oona & Salinger Genre : Contemporaine

Editeur : Le Livre de Poche

Année de sortie : 2015

Nombre de pages : 322

Synopsis : « En 1940, à New York, un écrivain débutant nommé Jerry Salinger, vingt et un ans, rencontre Oona O’Neill, quinze ans, la fille du plus grand dramaturge américain. Leur idylle ne commencera vraiment que l’été suivant … quelques mois avant Pearl Harbor. Début 1942, Salinger est appelé pour combattre en Europe et Oona part tenter sa chance à Hollywood. Ils ne se marièrent jamais et n’eurent aucun enfant.  » F.B.

 

Avis : J’ai beaucoup aimé les livres que j’ai lus de Frédéric Beigbeder : Un roman français, L’amour dure trois ans, Windows on the World. Je m’attendais à autant aimer ce livre, et surtout, j’avais imaginé une histoire qui me transporterait !

La couverture m’a tout de suite plu : j’ai trouvé Oona très belle, pleine d’espoir, et tournée vers la vie. Et j’aime les photos en noir et blanc. Tout de suite donc, le livre m’a donné un très bon a priori. Puis je l’ai commencé, et j’ai trouvé le début assez long – alors qu’il ne fait que 30 pages … Je ne suis pas entrée tout de suite dans l’histoire, et je ne comprenais pas pourquoi l’auteur parlait de lui : je voulais plutôt découvrir la vie d’Oona, son lien avec Salinger. On commence avec sa jeunesse, son amitié avec Truman Capote, Gloria Vanderbilt et Carol Marcus. C’est alors qu’elle rencontre Salinger. Tout de suite, quelque chose se passe, et autre chose les gêne. Je m’attendais à ce qu’ils s’aiment, mais ce n’est pas de l’amour que le lecteur découvre : Oona va devenir une obsession pour Salinger. Et cette obsession m’a agacé : les lettres de l’écrivain à la jeune femme sont énervantes quand il parle de ses sentiments. Elle est un prétexte pour qu’il oublie la guerre, et il lui dit des horreurs pour tenter d’effacer celles qu’il voit. La guerre marque un tournant pour le « couple » qu’ils forment. Oona part pour Los Angeles, Salinger pour l’entraînement, puis le front ; d’où les lettres, puis les chapitres mêlés des vies de la jeune femme et de l’écrivain, loin l’un de l’autre. On découvre ainsi deux vies tout à fait différentes, qui vont donner deux destins opposés. Les chapitres concernant Oona m’ont passionnée, j’ai adoré la « rencontrer » à travers ce livre. Elle a l’air parfaite, intelligente, unique. Ceux concernant Salinger m’ont laissé un avis mitigé : j’étais à la fois agacée, et compatissante face aux horreurs qu’il traverse pendant la guerre. En revanche, je suis curieuse de découvrir son œuvre. Avant leur histoire, on découvre celle des parents d’Oona : c’est elle le centre du livre. L’écriture, que j’avais adoré dans les précédents livres de l’auteur, m’a laissé un avis mitigé elle aussi. J’ai trouvé le ton de l’auteur agaçant, un peu méprisant parfois – après tout, pour qui se prend-t-il ? N’a-t-on pas le droit de ne pas tout savoir, et d’aimer ce que l’on veut ? Sans doute, ces éléments étaient déjà dans ces livres sans que j’y fasse attention. Petit plus tout de même : des photos des personnes concernées par le livre.

Concernant les personnages, comme je l’ai dit, j’ai adoré Oona. Tout le monde la trouve parfaite, et le lecteur aussi à travers les mots de l’auteur. Les photos que l’on découvre mettent un visage sur la description de la jeune femme : elle est belle, pleine de vie, toujours souriante. Un autre support est utilisé par l’auteur, original, et qui donne vie à Oona, que je ne connaissais pas du tout avant ce livre. Elle donne envie de la rencontrer dans la vraie vie, de lui parler, de la connaître. Ses choix amoureux m’ont semblé logiques : j’aurais sans doute fait les mêmes, et elle vit comme elle l’entend. Elle est heureuse, et ne se soucie pas du reste, ce que tout le monde aimerait parvenir à faire sans doute. Salinger, quant à lui, est un peu la caricature de l’écrivain sombre et torturé. Il m’a agacé – peut-être est-ce à cause de l’écriture de l’auteur ? -, et m’a fait de la peine en même temps. Il s’accroche à Oona parce qu’il est soldat pendant la Seconde Guerre mondiale ; il doit supporter ses horreurs : les camps en Allemagne, ses amis tombés au front, le sang, les armes, la boue, la France, la collaboration, la vengeance. Il est traumatisé par la guerre, veut en parler, et ne veut pas en parler. Il est fasciné par les grands auteurs de son siècle : Eugène O’Neill, d’où Oona ; Ernest Hemingway ; F. S. Fitzgerald. Il écrit, même au front, et son pessimisme ressort peu à peu dans son œuvre. Le fait que l’auteur en parle m’a donné envie de la découvrir, notamment L’Attrape Cœurs que je n’ai pas encore lu. Un autre personnage important de la vie d’Oona est présent dans ce livre : Charlie Chaplin. Elle fut sa dernière épouse, et à en croire l’œuvre, la seule qu’il aimât vraiment. On le découvre autrement ici, lui, les scandales qui ont émaillé sa vie, et la façon dont il est vu aux Etats-Unis. En réalité, dans ce livre, ce j’ai aimé, c’est l’histoire d’Oona avec Charlie Chaplin : c’était inattendu pour moi, et j’aime être surprise. La comparaison de l’auteur entre Charlot et les nazis m’a choqué : l’injustice de la situation y est pour quelque chose. Je l’ai largement préféré à Salinger ; comparaison normale, puisque j’ai l’impression qu’ils le sont tout le temps dans le livre. Cela m’a aussi donné envie de découvrir son œuvre, que je ne connais que partiellement. D’autres personnages sont présents ici, comme Truman Capote, qui semble assez désagréable, les amies d’Oona, Carol et Gloria, artificielles au possible, Eugene O’Neill, père indigne mais écrivain accompli.

Les parties sur la vie de l’auteur lié à celle des deux « personnages » m’ont d’abord semblé hors de propos, sans intérêt. Et pourtant, elles prennent tout leur sens à la fin du livre. C’était un petit tremblement de terre entre la fiction et la réalité, et c’est à ce moment que j’ai aimé le livre. J’aime le fait que le passé se mêle au présent, l’Histoire avec l’histoire. C’est un peu comme si la vie de l’auteur était marquée par celle d’Oona à jamais, comme une sorte de prédestination. La fin en est l’exemple le plus frappant. Leurs vies se rejoignent : il ne semble pas y avoir de coïncidences, mais que le destin.

 

En définitive, un bon roman, que j’ai aimé pour la découverte des « personnages », et pour la fin, qui lie la vie de l’auteur et celle d’Oona. Un peu déçue pour l’écriture, que j’avais adoré dans les autres livres de l’auteur.

Barbe Bleue d’Amélie Nothomb

Posté : 23 décembre, 2015 @ 3:34 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Barbe BleueGenre : Contemporaine

Editeur : Albin Michel

Année de sortie : 2012

Nombre de pages : 170

Synopsis : « La colocataire est la femme idéale. »

 

Avis : Cela faisait un moment que je n’avais pas lu de livre d’Amélie Nothomb, et j’avais envie de me replonger dans son univers !

Déjà, j’aime beaucoup la couverture ; en général, celles des livres de l’auteure sont originales, et ont ce petit quelque chose qui fait qu’on les aime. C’est le cas ici. Rien qu’en lisant le titre, le lecteur comprend qu’il a affaire à une réécriture du conte, Barbe bleue, l’homme qui tue ses femmes, pour schématiser. On entre donc dans l’histoire avec l’a priori d’être face à un meurtrier. L’idée d’une colocation pour choisir l’élue m’a semblé originale. C’est une bonne transposition de l’histoire à notre époque, tout en gardant un côté ancien avec le personnage de Don Elemirio. La reprise du conte est elle aussi ingénieuse : l’héroïne, Saturnine, ne sait rien de Don Elemirio et de ce qu’on dit de lui. Elle n’est attirée ni par l’homme, ni par son histoire, et veut simplement un logement à Paris. Mais quand elle apprend que huit femmes ont disparu après avoir vécu chez lui, elle est persuadée qu’il les a tuées. Son attitude alors est celle de la rébellion et du rejet : elle ne tombera pas amoureuse de Don Elemirio comme les autres femmes. L’intrigue m’a peu à peu fasciné : Saturnine entre dans le quotidien de Don Elemirio et tente de découvrir ce qui est arrivé aux huit femmes. Les couleurs sont importantes dans ce livre : elles sont une partie de nous et nous caractérisent profondément. Le champagne est très présent : il est un lien entre les deux personnages. J’ai retrouvé Hygiène de l’assassin, que j’ai adoré, dans les dialogues, dans la relation des deux personnages, dans la surprise de la fin. Le côté « conte » du récit m’a semblé se concentrer à la fin, dans la dernière phrase. La religion est également présente dans ce livre : Don Elemirio est catholique pratiquant, et même un peu fanatique peut-être. Elle lui permet de justifier certains de ses actes, même si cela semble absurde. Enfin, j’ai adoré le jeu d’onomastique de l’auteure sur les noms qui apparaissent dans l’œuvre, notamment celui des femmes, dont celui de Saturnine ; l’on fait référence à son étymologie au début et à la fin du livre.  

J’ai vraiment beaucoup aimé le personnage de Saturnine. C’est une jeune femme indépendante, qui n’a jamais connu l’amour, et qui est certaine de ne jamais tomber amoureuse du « Barbe bleue » moderne, qui l’a dégoute, et qu’elle accuse sans vergogne d’avoir assassiné les huit femmes précédentes. Elle lui parle comme elle le désire, et semble prendre l’ascendant sur lui dans la mesure où il ne lui fait pas peur, et qu’elle se permet tout. Peu à peu, elle découvre Don Elemirio, son quotidien, son passé qu’il lui raconte, son secret, la photographie qui le passionne. C’est une jeune femme intelligente et elle tente de percer à jour son mystérieux hôte. Aussi, le logement qu’elle a trouvé ressemble à un rêve, et il semble qu’elle ne pourra plus se passer du luxe qu’elle y découvre. De ce point de vue, c’est Don Elemirio qui a l’ascendant sur elle. Il est espagnol, noble, et a des positions bien arrêtées sur à peu près tout. Il semble parler par énigmes, ou Saturnine ne pose pas les bonnes questions à cause de l’idée toute faite qu’elle a de lui. Il semble avoir une haute opinion de lui-même, et m’a un peu fait penser à Prétextat Tach, en beaucoup moins cynique. C’est un reclus, il déteste la société, et n’y est pas adapté. Les huit femmes qu’il a connues font partie de son mystère : son histoire d’amour m’a fait penser à Journal d’Hirondelle par son étrangeté. Dans le livre, Saturnine prend la place du lecteur pour poser toutes ses questions à Don Elemirio. On ne sait que ce qu’elle apprend. D’autres personnages apparaissent ici : les huit femmes précédentes, Corinne, l’amie de Saturnine, Mélaine, l’homme de service de Don Elemirio, le chauffeur et les femmes qui viennent répondre à l’annonce pour la colocation : elles sont obsédées par le noble Espagnol, sont attirées par sa réputation sulfureuse et veulent le découvrir.

Le thème du secret est central ici : Don Elemirio cache celui-ci dans une pièce interdite pour la femme qui vit avec lui ; mais il précise que cette porte n’est pas fermée à clé pour une question de confiance. Il considère que son secret doit être respecté, et qu’elles n’ont pas à vouloir le découvrir. Cela peut faire référence au jardin secret que l’on garde pour soi, que l’on ne révèle à personne. Pour autant, les hommes sont toujours curieux, et lorsqu’on leur montre un endroit interdit, mais accessible, il est pratiquement certain qu’ils y entreront. Cette curiosité est aussi au centre du livre : Saturnine veut finalement savoir ce qui se cache derrière la porte, veut savoir ce qu’il est advenu des femmes, ce qui mène à une scène étrange, de nuit, où menaces et questions fusent. Le lecteur lui aussi veut connaître la vérité, et tourne les pages aussi rapidement que possible pour savoir.

La fin est surprenante, à la fois pour ses révélations et pour l’événement qui survient ; elle m’a encore fait penser au premier livre de l’auteure, même si c’est tout de même différent. Elle est aussi abrupte, sans doute pour refléter la rapidité de la décision de Saturnine. J’ai eu mal au cœur, même si cela devait se passer de cette façon. L’amour est toujours étrange dans les livres d’Amélie Nothomb, et c’est peut-être ce qui les rend uniques et aussi passionnants. Seul bémol : j’ai trouvé l’œuvre trop courte.

 

En définitive, un très bon roman, une bonne reprise du conte Barbe bleue, et des retrouvailles avec le style d’Hygiène de l’assassin, que j’adore.

12
 

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