Redbluemoon

I found myself in Wonderland.

Jules, tome 1 de Didier van Cauwelaert

Posté : 18 juin, 2018 @ 2:45 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Genre : ContemporaineJules

Editeur : Le Livre de Poche

Année de sortie : 2017 [2015]

Nombre de pages : 248

Synopsis : A trente ans, Alice recouvre la vue. Pour Jules, son chien guide, c’est une catastrophe. Il perd son rôle, son but sur terre. En plus, on les sépare. Alors, il se raccroche à moi. En moins de vingt-quatre heures, ce labrador en déroute me fait perdre mon emploi, mon logement, tous mes repères. Il ne me reste plus qu’une obsession – la sienne : retrouver la jeune femme qui nous a brisé le cœur.

Entre une miraculée de la chirurgie et un vendeur de macarons, une histoire de renaissance mutuelle et de passion volcanique orchestrée, avec l’énergie du désespoir, par le plus roublard des chiens d’aveugle. 

 

Avis : Ce livre m’a été offert par une amie chère pour mon anniversaire, et j’attendais le moment propice pour le lire ! (moment propice = besoin d’un petit boost niveau moral, ou en cas de panne de lecture !)

J’avais commencé un roman gothique contemporain, Martha Peake de Patrick McGrath ; mais je n’étais pas du tout d’humeur pour ce genre d’histoire ou de personnages. J’avais besoin d’un roman détente, d’une couverture en forme de livreJules était parfait ! Cela ne veut pas dire qu’il n’a pas de défauts, ou qu’il est très léger. Il traite de sujets lourds, comme le viol, la cécité, ou l’épilepsie ; mais il est optimiste, il montre des personnages qui avancent – petite pensée pour Le liseur du 6h27, présenté comme un livre joyeux, alors qu’il est plutôt déprimant ! J’avais besoin de joie de vivre, de ne pas réfléchir, de rire un peu, et d’apprendre de petites choses : Jules a rempli tous ces objectifs haut-la-main ! Zibal et Alice, malgré les épreuves que la vie a placées sur leur chemin, continuent à avancer, restent ouverts. Bon, d’accord, tout n’est pas forcément très « réaliste », mais ce n’est pas ce que je cherchais non plus !

Le gros point que j’ai aimé dans ce livre, c’est la mise en valeur de la relation entre homme et animal, ici, particulièrement, avec le chien (étonnant, n’est-ce pas ?). J’ai adoré apprendre tout un tas de choses sur les chiens guides d’aveugle, sur leur apprentissage, mais aussi sur les chiens guides pour épileptiques (j’avoue que je ne savais pas que ça existait !). J’ai aimé l’importance que prenait Jules, son rôle primordial : il va sans dire que c’est mon personnage préféré du roman ! Je l’ai adoré, du début à la fin : il m’a émue, il m’a surprise. A la fin, j’avais moi aussi envie d’avoir un chien ! J’avais envie de secouer les humains quand ils ne le comprenaient pas !

J’ai aussi apprécié les personnages d’Alice et Zibal. Leur positivité (même si elle présentait comme une façon de cacher leur souffrance) est contagieuse ; elle donne envie de se bouger, d’agir. Ce n’est pas pour autant que le roman est dépourvu de tristesse ; en effet, comme l’indique le synopsis, « on » sépare Alice et Jules … et l’histoire des personnages n’est pas toute rose ! La diversité est aussi présente dans ce livre, que ce soit niveau origine ou niveau orientation sexuelle ! Seul bémol de ce livre pour moi : le côté romance un peu stéréotypé.

Quant à la fin, elle est plutôt ouverte, elle laisse le lecteur imaginer ce qui suit. Je ne m’y attendais pas ; je pensais lire un chapitre en plus en tournant la page ! J’ai, du coup, très envie de lire la suiteLe Retour de Jules !! 

 

Donc, un bon roman détente, qui nous fait réfléchir et nous apprend des choses dans la bonne humeur ! 

Room d’Emma Donoghue

Posté : 17 avril, 2018 @ 11:53 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Genre : Contemporaine, DrameRoom

Editeur : Picador

Année de sortie : 2010

Nombre de pages : 321

Titre en français : Room

Synopsis : Jack is five, and excited about his birthday. He lives with his Ma in Room, which has a locked door and a skylight, and measures eleven feet by eleven feet. He loves watching TV, and the cartoon characters he calls friends, but he knows that nothing he sees on screen is truly real – only him, Ma and the things in Room. Until the day Ma admits that there’s a world outside … Told in Jack’s voice, Room is the story of a mother and son whose love lets them survive the impossible. Unsentimental and sometimes funny, devastating yet uplifting, Room is a novel like no other.

 

Avis : Ce livre m’a toujours intriguée, et, en même temps, je l’ai toujours repoussé à cause de son sujet. Je me suis enfin lancée en le voyant à la BU !

Il est très dur pour moi de noter et de chroniquer Room. D’abord, à cause de son sujet : pour ceux qui ne le savent pas, le roman évoque la séquestration et le viol, ce qui est déjà assez difficile à traiter, et ce qui rend le livre difficile à lire. En plus, honnêtement, je ne sais pas pourquoi j’ai lu ce livre, ce n’est pas du tout mon genre de lecture ! J’avais donc déjà des chances de ne pas trop apprécier ; pas parce que le sujet est mauvais, mais parce que je n’aime pas du tout lire ce type de roman. Mais, en plus, Room est écrit du point de vue de Jack, un petit garçon de 5 ans ! Alors là, certains se disent : « Oui, donc, du coup, c’est super sentimental, et fait exprès pour que le lecteur pleure à chaque page face au malheur de cet enfant ». Eh bien non, justement. Pas de jolie réplique larmoyante, pas de scène à faire pleurer dans les chaumières. Ce n’est pas déchirant comme on pourrait s’y attendre. Et ce, pour quelques simples raisons : [SPOILER] d’abord, Jack n’a jamais connu que Room, que la pièce dans laquelle il est enfermé avec sa mère, et donc, il ne sait pas qu’il existe un monde bien plus vaste. Puis, sa mère lui a fait croire que seule Room était réelle ; il pense donc que tout ce qu’il voit à la télévision n’existe pas vraiment, et que lui, sa mère et Old Nick sont les seuls êtres humains au monde. Enfin, [FIN DU SPOILER] Jack est un enfant, et il est connu que les enfants sont parfois être égoïstes et sont globalement centrés sur eux ; c’est le cas aussi pour notre narrateur, qui peut se montrer très méchant avec sa mère, sans s’en rendre compte sans doute, mais le lecteur, lui, s’en rend compte !

Ce livre m’a mise tellement mal à l’aise, pas seulement à cause du sujet, mais aussi à cause de cette narration. Il a été difficile pour moi d’apprécier Jack parfois, parce que je comprenais la situation de sa mère, et qu’il n’était pas toujours d’une grande aide pour elle. Dans le même temps, il m’a fait très mal au cœur, parce qu’il ne comprend pas du tout la situation dans laquelle il se trouve, et il ne se rend pas compte qu’il blesse cruellement sa mère parfois. Il ne pense qu’à lui, mais aussi, souvent à elle, et il pense, dans son esprit d’enfant, qu’elle veut exactement la même chose que lui, que ça lui plaît aussi de faire ce qu’elle fait avec lui. Quant à la mère, j’ai sympathisé avec elle tout le long, et je me suis mise à place – ce qui est déjà terrifiant. Je comprenais ses réactions, même si elles peuvent être mal prises par certains, et je l’ai trouvée courageuse, mais aussi désespérée. Ce qu’elle est capable de faire à la moitié du roman est hallucinant. Je pense qu’une narration de son point de vue aurait été bien plus affreuse à lire que du point de vue de son fils ; on comprend ce qui arrive quand il perçoit les choses, mais lui ne comprend pas, ce qui reste un soulagement.  

Le livre est divisé en deux parties : la vie dans la pièce, et ses conséquences. Au vu de leur situation, on peut comprendre la relation fusionnelle qui s’est établie entre la mère et le fils ; elle serait choquante entre deux personnes « normales », mais elle est déchirante ici. La mère s’est raccrochée à son fils de toutes ses forces, pour ne pas mourir, et lui ne connaît qu’elle dans le monde. [SPOILER] Cette relation les rend tous deux inadaptés à la vie en communauté ; en sortant de la pièce, ils sont incapables de vivre normalement, Jack a des lacunes dans certaines domaines et des problèmes de sociabilité et sa mère est incapable de supporter le monde comme il est, toujours aussi hypocrite et porté à juger tout et tout le monde sans se mettre à la place des gens. [FIN DU SPOILER]

[SPOILER] Evidemment, il existe un méchant de l’histoire, Old Nick, dont on ne sait pas grand-chose excepté son âge et la façon dont il a enlevé la mère. On sait également qu’il est arrêté après la fuite de Jack, mais rien de plus. [FIN DU SPOILER] N’entrez pas dans ce livre en vous attendant à un thriller, ce n’en est pas vraiment un !

La fin est la seule partie du livre qui m’a fait monter les larmes aux yeux – j’ai bien été indignée à certains moments de la lecture, mais je n’ai jamais vraiment été sur le point de pleurer. La partie la plus difficile de Room pour moi.

 

Donc, un bon livre, mais que je n’ai pas su apprécier pleinement en raison du malaise que j’ai ressenti tout le long de la lecture, sans doute à cause de la narration très particulière.  

 

A Separation de Katie Kitamura

Posté : 15 février, 2018 @ 11:00 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Genre : ContemporaineA Separation

Editeur : The Clerkenwell Press

Année de sortie : 2017

Nombre de pages : 229

Titre en français : Les pleureuses

Synopsis : This is her story.

About the end of her marriage.

About what happened when Christopher went missing and she went to find him.

These are her secrets, this is what happened …

A young woman is separating from her faithless husband. For the moment they agree to keep it a secret. When he goes missing in a remote region in the rugged South of Greece, she reluctantly agrees to go look for him, still keeping their split to herself. In her heart, she’s not even sure if she wants to find him. As her search comes to a shocking breaking point, she discovers she understands less than she thought about the man she used to love.

A searing story of intimacy and infidelity, A Separation lays bare what divides us from the inner lives of others. With exquisite precision, Katie Kitamura propels us into the mesmerising story of a woman on the edge.

 

Avis : Depuis sa sortie, une amie me conseille de lire A Separation ; je me suis enfin lancée !

J’ai été surprise de voir ses notes assez faibles sur Goodreads et Livraddict, parce que j’ai beaucoup aimé ce livre ! Le titre est clair : il est question d’une séparation. Christopher et sa femme sont séparés ; il lui demande de n’informer personne pour l’instant, ce qu’elle accepte de faire. Il part en Grèce sans informer la narratrice – son épouse – et est porté disparu peu de temps après. Elle est envoyée par sa mère pour le retrouver, et le ramener en Angleterre. Le lecteur a accès aux pensées de la narratrice, à ses questionnements sur Christopher, à ses hypothèses sur où il se trouve, et sur ce qu’il fait en Grèce. Pour autant, on ne connaît jamais son nom, ce qui en fait soit un personnage effacé, soit un personnage auquel le lecteur peut facilement s’identifier. Elle est assez passive, obéit aux autres sans prendre vraiment de décision seule. En fin de compte, [SPOILER] elle n’est jamais vraiment libre, jamais vraiment débarrassée de « l’influence » de Christopher, de la présence, même minime, de ses parents. [FIN DU SPOILER] Elle est coincée dans une vie dont elle ne veut pas, avec un secret dérangeant qu’elle ne peut pas/plus révéler.

Ce livre se lit vite, il est bien écrit, agréable, excepté une chose : l’abondance de virgules qui donne un flot de paroles continu. J’avoue que je n’aime pas trop cela, c’est sans doute la raison pour laquelle ce livre n’est pas un coup de cœur. De nombreuses réflexions se trouvent ici, à propos du mariage, de l’amour, de l’infidélité, mais aussi des apparences et du deuil. Grâce à Christopher et le livre qu’il écrit, le lecteur a accès à certaines traditions grecques : ici, les pleureuses. Je pensais que ce métier n’existait plus de nos jours : je le trouve fascinant. Dans l’édition française, il est d’autant plus mis en avant qu’il constitue le titre du livre ; [SPOILER] il permet aussi de montrer la difficulté pour la narratrice de faire son deuil, à cause de son statut au moment de la mort de son mari ; elle aurait presque besoin de pleureuses elle aussi. [FIN DU SPOILER] L’auteur dépeint la Grèce d’une manière différente de ce dont j’ai l’habitude : pas comme un beau pays, plein de vie, de fleurs, un souvenir de la Grèce antique. La narratrice est une touriste, mais elle ne vient pas pour des vacances, et elle ne se trouve pas dans une grande ville : elle voit l’envers du décor, la vraie vie dans une petite ville en proie aux incendies. Cela mène à des réflexions sur les touristes, leur façon de réduire un pays à un lieu de vacances idyllique, à y appliquer leurs préjugés sans rien savoir vraiment de la réalité de la vie là-bas. J’ai noté pas mal de citations : elles sonnaient vraies, comme si l’auteur avait compris et révélé quelque chose au lecteur, comme si elle lui avait donné les mots qu’il ne pouvait pas trouver seul.

A propos de la fin, que je ne veux pas vous spoiler : [SPOILER] J’étais un peu déçue que l’enquête ne soit pas résolue : j’aurais vraiment aimé savoir qui a tué Christopher ! Je suspecte Maria : elle aurait pu le tuer parce qu’elle savait qu’elle ne pouvait pas l’avoir pour elle seule, ou par vengeance, parce qu’il l’a séduite et abandonnée. Ce peut être la raison pour laquelle elle se dispute avec Stefano, qui désapprouve son acte. Cela explique aussi la réaction de Stefano face à la narratrice et aux parents de Christopher. [FIN DU SPOILER]

 

Donc, une très bonne lecture, un choix assez différent des romances « obligatoires » pour la Saint Valentin !

Le premier mot de Vassilis Alexakis

Posté : 3 février, 2018 @ 1:54 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Genre : ContemporaineLe premier mot

Editeur : Stock

Année de sortie : 2010

Nombre de pages : 459

Synopsis : Miltiadis, professeur de littérature comparée à Paris, né en Grèce, aimerait bien savoir, avant de mourir, quel a été le premier mot. « Je partirais plus tranquille », dit-il. Hélas, il meurt avant de l’avoir découvert. Le jour de son enterrement, sa sœur lui promet d’élucider l’énigme. Elle rencontrera des scientifiques de tous bords, qui lui parleront du cerveau humain, du langage des bébés, des chimpanzés et de l’Homo sapiens, de Darwin et des créationnistes, de Freud et d’un roi d’Egypte qui avait fait élever deux enfants loin du monde pour voir dans quelle langue ils s’exprimeraient spontanément. Elle croisera une mendiante roumaine qui étudie le français sous la couverture lui servant d’abri, un linguiste américain qui meurt dans les bras d’une femme parlant un idiome inconnu, une jeune sourde, Audrey, qui se prépare à participer à une représentation d’Antigone en langue des signes. Elle mènera son enquête jusqu’au bout, car il est des promesses qu’on ne peut pas ne pas tenir. Elle sait que son frère attend d’elle une réponse. Sera-t-elle en mesure de la lui donner ?

 

Avis : Le premier mot était dans ma wish-list depuis un moment ; je l’en ai sorti pour un cours de littérature comparée sur la réception des œuvres étrangères.

Le sujet est intéressant : la narratrice a perdu son frère, et lui promet le jour de son enterrement de découvrir le premier mot. Cela lui permet d’apprendre énormément de choses, de rencontrer de nouvelles personnes. Elle découvre la vie de Miltiadis, ses proches. Malgré cela, je n’ai pas réussi à apprécier pleinement ma lecture. J’ai trouvé que l’intrigue était un peu longue à se mettre en place, et que la façon de raconter de la narratrice était assez confuse. En effet, elle mêle, d’un paragraphe à l’autre, des choses qui n’ont rien à voir, elle saute du passé au présent ; le lecteur est parfois un peu perdu, il ne sait plus trop où il se situe. La recherche du premier mot ne débute vraiment qu’à la moitié du livre : la narratrice commence par nous raconter ces derniers jours avec son frère. En fait, je pense que le synopsis en dit trop, ou au moins, induit le lecteur en erreur en mettant surtout en avant l’enquête. La relation entre le frère et la sœur est aussi très importante ; la narratrice cherche surtout à garder un lien avec Miltiadis, à préserver sa mémoire, à continuer de communiquer avec lui. Malgré cela, je n’arrivais pas à rester accrochée au livre, je n’avais parfois pas envie de le reprendre ; et en même temps, j’aimais beaucoup les réflexions politiques, et j’apprenais beaucoup de choses, comme la narratrice, sur le langage, les hommes préhistoriques, l’évolution de l’homme. J’ai aimé en découvrir plus sur la langue des signes, le fait qu’elle ne soit pas considérée comme une véritable langue en France ; j’ai aimé l’aspect politique avec les mentions de Nicolas Sarkozy, mais aussi de la politique en Grèce. J’ai vraiment apprécié d’en apprendre plus sur ce pays, que j’aime beaucoup, mais dont je ne connais pas grand-chose ; je connais surtout son histoire antique, sa mythologie, pas son histoire moderne. C’est vrai que les gens s’accrochent au passé de la Grèce et déplore son présent moins brillant ; ce n’est pas ce que l’auteur fait ici. L’étymologie est évoquée, ainsi que le fait que le grec est parfois considéré comme la langue la plus ancienne au monde ; cela est démenti par des spécialistes qui expliquent que chaque pays veut mettre en avant sa langue comme la première, la plus ancienne, ou la plus parlée. Certains évoquent la possibilité que toutes nos langues ne soient en fait qu’une, prononcée différemment, ce que je trouve fascinant, et qui rapprochent les nations, au lieu de les séparer par la barrière d’une langue nationale. Cette idée enferme les gens dans leur propre pays, et les empêche de s’ouvrir à d’autres, d’envisager d’apprendre d’autres langues, de parler cette langue même quand ils la connaissent, juste par fierté mal placée. En fait, je pense que j’aurais préféré une non-fiction sur le sujet plutôt qu’un roman ; les réflexions m’intéressaient mais pas tant l’histoire. Je n’ai pas ressenti l’émotion si importante pour moi dans un récit. En revanche, sachant que Vassilis Alexakis est grec, il écrit très bien en français !

Je ne sais pas si je saurais vous dire grand-chose sur les personnages. La narratrice n’a pas de nom, et pas vraiment de personnalité : elle est tournée entièrement vers son frère, qu’elle aimait tendrement. Sa recherche du premier mot est une façon de faire son deuil, mais je n’ai pas réussi à ressentir de tristesse. Je n’ai pas réussi à m’intéresser suffisamment à sa vie. Miltiadis est le frère de la narratrice ; c’est un personnage assez sympathique, qui a des opinions politiques bien tranchées. Fasciné par les langues, il déclare, à la fin de sa vie, regretter de ne pas connaître le premier mot. Grâce à lui, le lecteur découvre un peu le théâtre d’ombres grec et le personnage de Karaghiozis. Aliki semble être plus concernée par l’apparence que par la réalité ; mais c’est une façade qui cache sa détresse de perdre son mari. Sa religiosité l’empêche d’être proche de la narratrice – et de moi ! Théano est un personnage que j’ai apprécié, comme Miltiadis, son père. Elle est partagée entre la langue grecque et la langue française, entre l’origine de ses parents, et les siennes pour elle. J’ai aimé qu’elle représente une espèce de lutte d’identité qui se résout dans l’embrassement des deux langues. Il existe encore beaucoup d’autres personnages moins importants que je vous laisse découvrir par vous-mêmes !

La fin est plutôt belle : [SPOILER] la narratrice raconte l’action du livre au fantôme de son frère, et conclue en lui disant qu’elle n’a pas trouvé le premier mot. Cela lui permet de garder ce lien dont je parlais plus haut : en ne trouvant pas le premier mot, elle ne laisse jamais partir son frère, et peut toujours lui parler. [FIN DU SPOILER]

 

Donc, une bonne lecture, qui nous apprend beaucoup de choses, mais dont l’histoire n’est pas parvenue à me toucher.

Midwinter de Fiona Melrose

Posté : 29 janvier, 2018 @ 6:17 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Genre : Contemporaine Midwinter

Editeur : Corsair

Année de sortie : 2016

Nombre de pages : 260

Titre en français : Midwinter (il sort le 8 février 2018 aux éditions de la Table Ronde, collection Quai Voltaire)

Synopsis : ‘For ten years I’d shirked the memories. I always felt them scratching at the darker corners of my mind, still feral; but sitting on a tree stump in the gathering dark, all of it – the space, the fear, the sorrow – all seemed to find me again. It was as if the past ten years I’d only been standing still and I was back in a mess with a boy who only sees ghosts.’

Father and son, Landyn and Vale Midwinter are Suffolk farmers, living together on land their family had worked for générations. But they are haunted there by a past they have long refused to confront: the death of Cecelia, beloved wife and mother, when Vale was just a child. Both men have carried her loss, unspoken. Until now.

With the onset of a mauling winter, something between them snaps.

While Vale makes increasingly desperate décisions, Landyn retreats, finding solace in the land, his animals – and a vixen who haunts the farm and seems to bring with her both comfort and protection.

Tender and lyrical, alive to language and nature, Midwinter is a novel about guilt, blame, lost opportunities and, ultimately, love and the lengths we will go to find our way home.

 

Avis : Je l’ai vu à la bibliothèque de la fac, et je me souvenais que Simon de la chaîne Savidgereads l’avait conseillé ; je me suis donc lancée !

D’abord, je tiens à vous dire que ce livre sort en France le 8 février !! Donc s’il vous intéresse, vous pourrez bientôt vous le procurer !

J’ai aimé le jeu de mots avec le titre : Midwinter est le nom de famille de Landyn et Vale, mais c’est aussi le milieu de l’hiver, exactement le moment où l’action se passe – un des personnages évoque ce double sens. Ici, des sujets difficiles sont abordés : le deuil, la souffrance, la culpabilité. Les deux protagonistes les affrontent d’une manière différente. Landyn trouve une échappatoire dans le fait de prendre de soin d’animaux, que ce soit un chien, une poule ou un renard ; grâce à lui, leur place est très importante dans le livre, ce que j’ai vraiment adoré ! Il voit également régulièrement une renarde – que l’on retrouve sur les couvertures anglaise et française – qui apparaît quand il revient de Zambie, après un drame que le lecteur découvre peu à peu. Grâce à elle, la mort prend une dimension différente : [SPOILER] on a presque l’impression que la mère s’est réincarnée en renarde, et disparaît afin de resserrer les liens entre le père et le fils ; en effet, si leur relation est complètement détruite par la mort de la mère, elle semble commencer à aller mieux lorsque les animaux de Landyn meurent : Pup, puis la renarde. On peut voir, dans le fait que le fils accompagne le père pour déposer la renarde morte dans un endroit spécial, que leur relation commence à se solidifier, qu’ils se pardonnent et se rapprochent, qu’ils commencent à se comprendre. [FIN DU SPOILER] Quant à Vale, son chagrin s’est mué en colère, et en désespoir. Il fait n’importe quoi, il boit, il s’énerve sans qu’il ne se passe rien, il accuse son père ; il lui faut un responsable. Sa situation est paradoxale : [SPOILER] il accuse son père d’être responsable de la mort de sa mère, mais il ne veut pas assumer sa propre culpabilité. En effet, son ami Tom est paraplégique suite à une sortie illégale en bateau qui a mal tourné. Vale se sent coupable, et préfère se concentrer sur la culpabilité de son père plutôt que sur la sienne. [FIN DU SPOILER] Pour comprendre toute l’histoire, comment la situation a évolué de cette manière, le lecteur se retrouve à sauter dans le passé, pour revenir abruptement dans le présent : cela peut le rendre un peu confus. Parfois, on ne sait plus vraiment à quelle époque on se situe, il faut un temps pour s’adapter ; mais au fil des pages, le lecteur se laisse prendre par l’histoire. De plus, pour avoir les deux versions, la narration se fait à la première personne entre Landyn et Vale : un chapitre sur deux pour chacun. Il est intéressant de découvrir ce que chacun ressent.

Comme je l’ai dit plus haut, j’ai aimé la place que prennent les animaux ici : ils sont respectés, les personnages prennent soin d’eux. Ils ne sont pas privés de liberté – comme on aurait pu s’y attendre avec la mention de la renarde ; celle-ci reste libre du début à la fin. J’ai adoré !! En revanche, une des scènes finales, qui implique un animal, a été la plus difficile à lire – et une des plus difficiles quand je pense à d’autres lectures ! En un sens, je comprends que ce passage était nécessaire, mais j’ai vraiment cru que je n’arriverai pas à aller au bout … En parallèle, j’ai aussi aimé découvrir la vie à la ferme à travers le travail de Landyn et des autres personnages. Je n’avais jamais lu de livre moderne qui traite d’agriculture ; je savais que cela impliquait des sacrifices, et pas mal de problèmes, mais je n’en savais pas beaucoup plus. Le lecteur comprend vite la situation du père, pourquoi il ne peut pas y arriver, mais aussi pourquoi il ne peut pas abandonner. J’ai aimé la façon dont Dobb traite ses animaux, même s’ils vont à l’abattoir : une belle vie et une « belle » mort. C’est toujours mieux que d’être en cage et mourir dans la peur, même si le mieux serait quand même de ne pas mourir pour nous alimenter. BREF ! Landyn était touchant, d’autant plus que sa détermination, au lieu de renforcer ses liens familiaux, détruit sa famille lentement.

Le lecteur finit par s’attacher aux personnages, même s’ils ont leurs défauts. Landyn voit dans ses animaux un échappatoire, mais laisse complètement tomber son fils, qui n’attend que de le voir lui tendre la main. Rongé par la culpabilité, la honte, la tristesse, il se referme sur lui-même, et ne sait pas comment aider Vale, qui part à la dérive. Ce qu’il nous montre de son moi passé est peu glorieux : il se rend compte de ses erreurs, de sa colère mal dirigée, de sa folie de vouloir s’accrocher à sa ferme. Quant à Vale, comme je l’ai dit, il est plein de colère, et veut à tout prix trouver un coupable sur lequel se défouler : son père. Il est incapable de réagir correctement ; à 20 ans, il se sent perdu sans sa mère, et sans un père capable de lui donner des ordres, de lui montrer le chemin. Il prend des décisions déplorables, et blesse tous les personnages : Landyn évidemment, mais aussi Tom, complètement négligé par ses parents, et qui dérive comme Vale, Beth, victime de l’indécision et du remords de Vale, Dobbler, qui se prend une insulte qui ne lui était pas destinée, alors qu’il est si gentil et touchant !! Il a, parfois, de quoi détester Vale, mais le lecteur ne fait que ressentir de la pitié pour lui.

La fin est une vraie conclusion, même si c’est une fin ouverte. Le livre commence et s’achève par une mort, ce qui referme la boucle. Le lecteur peut imaginer ce qui arrive ensuite.

 

Donc, un très bon livre, qui parle de sujets différents tous bien traités, qui donne une place importante à la nature (animaux, agriculture), et qui laisse le lecteur sur une fin pleine d’espoir.

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