Redbluemoon

I found myself in Wonderland.

Tout est sous contrôle de Christopher Bouix

Classé dans : Avis littéraires — 22 juin 2024 @ 23 h 22 min

Tout est sous contrôleGenre : Science-fiction

Editeur : Au diable vauvert

Année de sortie : 2024

Nombre de pages : 388

Synopsis : À qui profite le bonheur ?
Bienvenue dans un monde parfait. Ici la vie heureuse s’étale quotidiennement sur le réseau HappyApp, où l’indice de bonheur individuel donne accès à ce que la société réserve aux meilleurs. Offres premiums, métier et logements hauts-de-gamme, et surtout parentalité, désormais réservée aux citoyens les plus épanouis.
Jeunes, beaux, amoureux, jusqu’où Juliette et Néo Lanhéry seront-ils prêts à aller pour y accéder ?

 

Avis : J’ai lu Alfie l’année dernière pour le Plib et j’avais tellement aimé que j’avais voté pour lui : c’était un immense coup de cœur ! J’étais donc ravie de rencontrer l’auteur aux Imaginales et de lire son nouveau roman, Tout est sous contrôle !

J’ai lu quelque part que ce livre pouvait être pris pour une utopie ; ce n’est pas du tout ma façon de le voir ! En effet, dans un futur plutôt proche, il existe une application appelée HappyApp qui mesure l’indice de bonheur de chaque citoyen. Selon celui-ci, ils ont droit de vivre dans certains quartiers, ils ont des offres promotionnelles et, surtout, SPOILER 1 Toutes les données de chacun sont accessibles par le gouvernement et la police. Plus je lisais, et plus je me disais : « Mais quel enfer ! » C’était à la fois glaçant, terrifiant et parfois très ironiqueSPOILER 2 Contrairement au ton utilisé dans Alfie, ici, il n’y a pas d’humour ou, en tout cas, pas d’allégement de l’atmosphère par un décalage linguistique ou autre. Ici, lorsque la littérature est utilisée - par le biais de Racine -, c’est pour souligner le tragique de la situation, toute l’ironie grinçante de la société mise en place par le gouvernement.

Je ne veux pas trop en dire ici pour vous laisser découvrir le roman par vous-mêmes, mais l’on comprend assez rapidement que tout n’est pas si rose dans ce monde soi-disant parfait et que les personnages ne sont pas aussi lisses qu’ils semblent l’être. Commençons par Juliette, qui paraît être l’héroïne. Si elle a l’air assez calme et maîtresse d’elle-même, dès la première rencontre, le lecteur comprend qu’il lui est arrivé quelque chose et qu’elle n’est pas aussi heureuse qu’elle le prétend. SPOILER 3 Son mari, Néo, est psychologue. Il adore le paraître, conserver une apparence de bonheur parfait et de compétence supérieure. Il est l’un des personnages que j’ai le moins aimé, sans aller jusqu’à le détester. SPOILER 4 Le lecteur fait aussi la rencontre de Sibylle, qui elle aussi semble avoir quelques soucis, notamment dans sa relation avec sa mère, Véra. SPOILER 5 Un des seuls personnages que j’ai véritablement apprécié est Mina. Policière débutante, elle m’a semblé sincère, compétente et bienveillante tout en étant lucide concernant HappyApp ou le métier qu’elle a choisi de faire. SPOILER 6 La palme du personnage détestable revient à SPOILER 7 

La fin, quant à elle, est à l’image du livre : SPOILER 8

 

Donc, un roman que j’ai aimé, mais qui m’a un peu déprimée. Je lui préfère tout de même Alfie, qui n’est pas forcément plus léger, mais dont le ton est un peu moins sombre grâce à l’humour décalé et à la narration originale.

 

 

SPOILER 1 ils ont le droit de pouvoir se reproduire. En effet, jusqu’à 30 ans, les femmes ont le droit de demander à ce que la puce qui les rend infertiles soit désactivée pour avoir un enfant. Passés 30 ans, elles ne peuvent plus en avoir. Quelle joie, n’est-ce pas ? Bien sûr, pour accéder à ce privilège, il faut atteindre un certain indice de bonheur, monter un dossier, vivre dans un quartier privilégié et tout faire pour continuer à être (?) le plus heureux possible, comme poster un maximum de « contenus heureux » sur HappyApp.

SPOILER 2 En effet, le lecteur se rend rapidement compte, comme c’est déjà le cas sur les réseaux sociaux, que les gens ne postent pas toute leur vie sur HappyApp mais seulement ce qui va leur permettre de paraître plus heureux. Ainsi toute la politique du gouvernement est-elle biaisée : il prétend vouloir le bien de tous, le bonheur de tous alors même que cette course au bonheur les rend malheureux ou fous. Entre la voix intérieure de Sibylle qui fait froid dans le dos, l’agaçante naïveté de Juliette et le sang-froid meurtrier de Néo, aucun des personnages n’est vraiment positif : tous pensent pouvoir améliorer leur vie en gagnant des points, ce qui les pousse à commettre des actes ignobles.

SPOILER 3 Au contraire : Juliette a besoin de HappyPills pour se sentir bien, ce qui prouve l’échec total du gouvernement pour « forcer » ses citoyens à être heureux – ou, plutôt, les dirigeants se moquent complètement du bien-être de leurs administrés. Le lecteur découvre plus tard que Juliette a fait partie d’un programme natal et qu’elle a perdu son fils, Adam. J’ai trouvé assez durs les passages pendant lesquels elle pense à lui et c’est d’autant plus affreux qu’elle prenne ses pilules. Son mari, Néo, ne semble pas comprendre son chagrin et la « force » à passer à autre chose tout en « prenant soin » d’elle.

SPOILER 4 Ou peut-être que si ? Avec un autre personnage, c’est vraiment celui qui me reste en tête et que j’exècre pour sa petitesse et sa médiocrité. Je me suis même demandé, à un moment donné, s’il avait vraiment fait des études de psychologie : il est d’un ridicule qui pourrait être risible s’il n’était pas dangereux. En effet, entre sa femme qui prend des pilules pour nier son deuil sous sa prescription, une de ses patientes qui tue son mari après une séance avec lui parce qu’il est incapable de voir ou de comprendre son mal-être profond et son analyse de tout le monde autour de lui sans comprendre qu’il est lui-même profondément névrosé ou profondément anesthésié au niveau des sentiments, Néo m’a semblé très narcissique et incapable de comprendre les gens autour de lui, ce qui est tout de même dommage pour un psychologue. Le fait qu’il refuse de porter secours à Katia lorsqu’elle est attaquée me l’a définitivement rendu antipathique : était-ce de la lâcheté ? de la peur ? Dans tous les cas, il me répugne profondément, comme son pédantisme à vomir.

SPOILER 5 Elle finit par se persuader qu’elle pourra reprendre le contrôle de sa vie si sa mère meurt et fomente un plan pour la tuer sans être incriminée. Elle pourrait paraître brillante grâce à cela ; elle est surtout psychotique et tellement concentrée sur son objectif qu’elle ne se rend pas compte qu’elle se met en danger. J’ai eu un petit problème de vraisemblance avec elle à un moment donné : je me suis dit que le couple n’allait pas comprendre sa façon de communiquer. Peut-être était-ce juste moi, mais j’étais persuadée que son plan allait rater dès le début, la faisant passer pour une idiote ou quelqu’un d’encore plus illuminée qu’elle ne l’était déjà. A certains moments, j’ai ressenti de la peine, de la pitié pour elle ; mais c’est aussi un personnage qui accuse les autres de son manque de volonté et de réussite. Sibylle pense sincèrement que, si elle ne « réussit » pas sa vie, c’est à cause de sa mère. Elle est persuadée que son meurtre la libèrera. La perception des personnages autour d’elle nous montre qu’elle affabule et, même, qu’elle fait peur à ceux qui l’entourent, comme Victor, qu’elle s’imagine amoureux d’elle alors qu’il la trouve simplement étrange et qu’il se montre juste poli.

SPOILER 6 Imaginez donc mon horreur quand j’ai compris qu’elle avait été dupée, puis qu’elle est effectivement morte, étant donné qu’elle ne se trouve pas dans l’épilogue et que l’on ne sait pas ce qu’elle est devenue. C’était, véritablement, le seul personnage positif avec Ming. Et sa fin donne une saveur très amère au roman : rien de positif ne ressort du livre, très pessimiste.

SPOILER 7 Tim ! Quelle horreur que ce personnage ! Evidemment, il est construit pour ça. C’est le méchant type, sans but, sans objectif qu’être violent et faire le mal. Il est presque caricatural : drogué, anarchique, asocial, meurtrier, misogyne, violeur, tout y passe. On se sent sale rien qu’à être dans sa tête. Je pensais que le personnage que j’aimerais le moins serait Marc pour son côté « vieux flic qui a tout compris de la vie et qui l’apprend à la nouvelle » ; c’était avant de découvrir Tim. Et même Néo est pire que Marc ; il y avait quelque chose de presque touchant dans ce policier complètement désillusionné. En revanche, sa création – un algorithme qui permettrait de trouver les criminels avant qu’ils commettent leur crime à l’aide de mots clés détectés par l’IA – est terrible et terrifiante. En effet, le roman nous montre bien que les véritables criminels se jouent des contraintes ou les contournent, comme c’est le cas de Juliette et Néo quand ils fomentent le meurtre de Véra.

SPOILER 8 cruelle et ironique. Ming a été condamnée – ce que je n’ai pas tellement compris : en fin de compte, elle n’avait pas l’intention de tuer Max. N’ont-ils pas vérifié par la suite qu’elle était bien « coupable » ? Cela veut-il dire que, sur de simples présomptions, les citoyens peuvent être arrêtés et condamnés ? Mina, seul personnage un peu idéaliste et foncièrement positif, est morte. Juliette rencontre Véra qui, comme sa fille, à la fin, va la menacer et la faire chanter, enfermant de nouveau « l’héroïne » dans un cercle vicieux qui la conduira à commettre, peut-être, d’autres actes criminels. Comble de l’ironie : comme avec Sibylle, Juliette ne comprend pas tout de suite ce qui arrive, persuadée que Véra est quelqu’un de bien et, surtout, c’est elle qui, désormais, a une voix intérieure semblable à celle de la femme qu’elle a tuée.

Pas de commentaire »

Pas encore de commentaire.

Flux RSS des commentaires de cet article.

Laisser un commentaire

 

Baseball fans gather zone |
Eaudefiction |
Ici même |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Kpg1221gpk
| Elenaqin
| la saltarelle des baronnes