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I found myself in Wonderland.

Clodia ou le scandale de la Bonne Déesse de Sophie Malick-Prunier

Classé dans : Avis littéraires,Coup de cœur — 8 mai 2023 @ 13 h 31 min

Genre : HistoriqueClodia ou le scandale de la Bonne Déesse

Editeur : Robert Laffont

Année de sortie : 2023

Nombre de pages : 332

Synopsis : Pense comme un homme !

« Clodia sourit, envahie par une impression de soulagement comme elle n’en avait plus ressenti depuis longtemps. Même si elle devait le payer, elle voulait vivre en femme libre.« 

Clodia Metelli est une héritière. Figure sulfureuse de la jeunesse dorée de Rome au Ier siècle avant notre ère, connue pour son exceptionnelle beauté, elle est issue de la puissante famille patricienne des Claudii, qui occupe, de génération en génération, les plus hautes fonctions.

À la suite d’un retentissant scandale politique et religieux qui compromet son frère Clodius, elle se trouve impliquée dans les arcanes des rivalités entre César, Cicéron et Pompée. Tandis que sa propre famille se déchire et que la République agonise, minée par la lutte entre le clan conservateur du Sénat et le parti populaire qu’elle et Clodius ont rallié, Clodia s’émancipe des contraintes de son sexe ; femme libre, elle inspire au jeune poète Catulle ses vers les plus ardents.

En immersion dans les quartiers populaires et les riches demeures de la Rome antique, cette fresque captivante retrace le destin hors du commun de l’une des rares femmes de son temps à avoir laissé son nom dans l’Histoire.

 

Avis : J’ai reçu ce roman en service presse de la part de la maison d’édition. Il faut dire que le résumé est alléchant. C’est une histoire qui se déroule pendant l’Antiquité romaine et dont l’héroïne est une femme noble qui va se retrouver confrontée à une situation politique désastreuse dont sa famille va devoir se sortir : comment ne pas avoir envie de la lire ?!

Je connaissais Clodia de nom, parce qu’elle est associée, dans l’Histoire romaine, à son frère Clodius, surtout connu pour être un débauché. Je ne m’étais jamais intéressée à elle plus que ça ; je n’avais qu’un vague souvenir qu’elle avait été accusée d’inceste et d’être, elle aussi, dépravée. Ceci nous est rappelé dès le prologue où Clodia comparaît pendant son procès face à Cicéron. En effet, le roman s’attache à la réalité historique – dont je ne parlerai pas beaucoup ici pour laisser la surprise aux lecteurs qui ne connaîtraient pas les faits. SPOILER 1

Il retrouve donc des personnages historiques très connus, comme César, Cicéron ou Pompée ; d’autres encore sont mentionnés, comme Sylla ou Marius, préfigurant la crise politique à venir. Ils deviennent vivants grâce aux mots de l’autrice ; c’est comme si l’on marchait aux côtés de Clodia ou de Catulle dans les rues de Rome. En revanche, à part Clodia – et Pompéia -, ils sont pratiquement tous difficiles à apprécier. Les hommes sont d’une misogynie crasse – on nous rappelle, au début du roman, que les femmes sont nommées par rapport à la famille dont elles viennent et que, si plusieurs filles naissent, elles portent des numéros ou le nom de famille de leur mari pour les distinguer -, à part peut-être Catulle, qui reste le personnage masculin le moins agaçant du roman. Il permet notamment d’aborder la poésie latine : des extraits de poèmes en latin et leur traduction se trouvent directement dans la narration, ce qui m’a donné très envie de lire une édition bilingue ! Cela apporte une note de fraîcheur, de finesse dans une atmosphère qui traduit bien la vulgarité des Romains. Que ce soit la corruption des sénateurs ou des magistrats, les fêtes des nobles, l’hypocrisie des hommes et des femmes concernant leur vertu, les graffitis obscènes sur les murs des bâtiments, les prostituées qui se promènent dans les rues ou se trouvent dans les auberges, il flotte une ambiance nauséabonde et lourde, bien traduite par l’impression de suffocation de Clodia quand elle retourne à Rome après un voyage en « province ». SPOILER 2 De plus, en intégrant Catulle à son roman, l’autrice fait de son héroïne la muse du poète, sa Lesbie, une théorie que j’ai adoré découvrir au fil des pages !

A la période romaine, donc, les femmes ne sont pas citoyennes, elles n’ont aucun pouvoir concret quel qu’il soit et doivent obéir à leur père, puis à leur mari. Cela ne veut évidemment pas dire que certaines d’entre elles n’avaient pas un sens politique particulier ; ce roman est, pour moi, une sorte d’hommage à l’intelligence de ces femmes, à leur sens de la stratégie et à leur détermination farouche à défendre les intérêts de leur famille. SPOILER 3 Pour autant, pas de martèlement ou d’anachronismes ici : l’histoire parle d’elle-même et n’a pas besoin de gros sabots pour faire comprendre quoi que ce soit au lecteur. SPOILER 4 Je n’en attendais pas moins d’une autrice docteure en littérature latine et spécialiste d’histoire des institutions politiques de la Rome républicaine. C’est un réel plaisir de lire un roman aussi « proche » de la réalité historique, avec des références précises, des informations glissées dans le corps du texte, un dossier à la fin qui permet d’en apprendre plus sur les faits et les personnages ainsi qu’une bibliographie si le lecteur veut aller plus loin.

Enfin, j’ai adoré ce livre, mais je n’ai pas pu m’empêcher, après l’avoir terminé, de regretter ne pas avoir plus d’informations sur ces femmes romaines : que devient Pompéia SPOILER 5 ? Comment s’est passé la suite et la fin de la vie de Clodia ? On ne peut qu’imaginer leur vie sans rien en savoir.

Dernière remarque : comme les précédents romans qu’il m’a été donné de recevoir, ici, l’écriture est agréable, fluide et ne comporte pas d’erreurs, ce qui est un vrai plaisir. Certaines phrases, même, m’ont donné des frissons parce qu’elles sonnaient vraies. La qualité du fond est donc soutenue par la qualité de la forme, ce qui fait de ce roman un coup de cœur !

 

SPOILER 1 Sont repris le scandale de la Bonne Déesse, comme évoqué dès le titre, mais aussi le retour de Pompée après sa victoire contre Mithridate, l’ascension de César, l’opposition entre les optimates et les populares et, par la même occasion, la crise que va traverser la République romaine et dont elle ne se relèvera pas. 

SPOILER 2 J’ai apprécié de découvrir, une Clodia, une matrone romaine respectable, très différente de celle qui est présentée dans les œuvres où son nom est mentionné. Cela ne fait pas d’elle une femme froide, mais une Romaine passionnée qui a des valeurs. Elle semble être l’une des seules, parmi ses amies, à n’avoir aucune relation adultère au début du roman, consciente de la réputation de sa famille et de la façon dont on pourrait utiliser ces relations pour lui nuire.

SPOILER 3 J’ai apprécié, au moment où Clodia va voir Crassus pour lui demander son aide, qu’elle refuse de coucher avec lui, lui rappelant par-là qu’elle signe un marché politique avec lui. En effet, les romans historiques – et pas que – prennent souvent ce détour facile : la femme n’aurait rien d’autre à offrir qu’elle-même et donc il serait logique pour elle de passer par une relation sexuelle qu’elle abhorre mais qu’elle accepte pour sceller un quelconque pacte qui aidera ses proches. C’était satisfaisant de la voir faire ce choix et plus original que de la voir céder et consentir au pacte odieux que son frère a conclu dans son dos.

SPOILER 4 Il est clair que, politiquement, Clodia est égale, voire supérieure en certains points, aux hommes de sa famille et aurait une place dans la magistrature si elle n’était pas une femme. Fine stratège, elle évite la ruine et le déshonneur quand son mari, Metellus, préfère manœuvrer contre son beau-frère, Clodius, quitte à entacher la réputation des Claudii. César, Cicéron et Crassus sont gênés d’avoir à traiter avec elle, mais lui reconnaissent un certain sens politique. Pour autant, Clodia vit pendant l’Antiquité romaine : même si elle se montre intelligente et réfléchie, elle ne peut rien espérer obtenir à son époque. Elle ne sera jamais consul, ne participera jamais aux séances du Sénat, ne regardera le procès de son frère que de loin. Elle en est consciente et, lucide, elle choisit de vivre en femme libre en accord avec son temps.

SPOILER 5 une fois que César l’a répudiée

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