Redbluemoon

I found myself in Wonderland.

Maman, la nuit de Sara Bourre

Classé dans : Avis littéraires — 10 avril 2023 @ 12 h 08 min

Genre : ContemporaineMaman, la nuit

Editeur : Editions Noir sur Blanc (Notabilia)

Année de sortie : 2023

Nombre de pages : 193

Synopsis : « Maman a disparu. C’est pas simple. Il a fallu le redire plusieurs fois, décomposer la phrase, la prendre et la secouer. Maman a disparu. Quelle folie de phrase. Si je la chuchote, les larmes me montent et me brûlent, si je la prononce avec une voix de fer, comme un vieux robot fatigué, ma-man-a-dis-pa-ru ma-man-a-dis-pa-ru, ça me fout la chair de poule et l’impression d’une catastrophe planétaire imminente. Si je la crie, si je la jette loin sur les routes, en plein cœur de ces villes qui scintillent et grincent sous ma peau, si je la crie si fort que ma voix casse, alors je crois que ce n’est plus vraiment triste. Pas aussi triste que ça. Je dirais plutôt affolant. Sidérant. Ou encore stupéfiant. Voilà. C’est affolant sidérant stupéfiant et ça me rend le cœur dingue, et étrangement vivant aussi. »

L’enfant écoute tout, observe tout, et avant toute chose sa mère, une fascination qui oscille entre haine et passion, dont on sent le danger, la menace, la violence des sentiments.

C’est une enfant sage, étrange. Elle a grandit robuste, comme une mauvaise herbe. Elle sent, perçoit, palpe, traque, à l’affût, toujours tapie.

Un jour, sa mère disparait. Alors, que va-t-elle devenir ?

 

Avis : J’ai reçu ce roman en service presse de la part de la maison d’édition. Le résumé m’avait plutôt intriguée comme le titre, que j’avais trouvé étrange (dans le bon sens du terme). Je me suis donc laissé tenter ; de plus, j’avais déjà lu plusieurs romans de cette collection et je n’avais jamais été déçue !

Maman, la nuit se lit très vite : le texte est divisé en chapitres courts, voire très courts, et la lecture est fluide, « facile ». On se laisse facilement porter par les mots et on se retrouve à la moitié du roman avant de s’en être rendu compte. Surtout, le roman est très bien écrit : aucune faute de syntaxe, de français en général et pas de coquille. On sent une maîtrise de la langue certaine et cela fait plaisir à lire. A cela s’ajoute un rythme particulier, des images parfois poétiques qui ont fini par me séduire.

En effet, si j’ai beaucoup aimé la forme, j’ai eu un peu plus de mal avec le fond. J’ai eu du mal à entrer dans l’histoire, à comprendre immédiatement certains éléments, étant donné que la narratrice parle son propre langage d’images, de formes et de couleurs, sans utiliser les mots précis qui désignent les choses et les gens. C’est un choix littéraire que j’ai, en fin de compte, apprécier ; en revanche, je n’ai pas réussi à aimer l’histoire, les personnages. SPOILER 1 Je ne me suis attachée qu’à l’écriture et, encore, cela s’est fait vers la fin de l’œuvre. Cela ne veut pas dire que la narratrice et la mère ne sont pas bien écrites – j’ai d’ailleurs aimé qu’elles n’aient pas de nom ou qu’ils soient si peu importants qu’ils ont disparu pour moi. Mais j’ai aussi retrouvé quelques stéréotypes que je trouve parfois lassants : SPOILER 2 Les sentiments ressentis par la mère pour sa fille sont, également, extrêmement violents parfois et SPOILER 3 Cette mère semble très dysfonctionnelle, ce qui explique peut-être en partie le côté étrange de la narratrice ; je n’ai, pour autant, pas réussi à m’attacher à elle. J’ai eu l’impression de rester en surface, sans jamais entrer vraiment, excepté à la fin. J’ai tout de même aimé les nombreuses scènes dans la nature et la façon de parler de celle-ci.

La fin m’a semblé très abrupte et étrange : SPOILER 4

 

Donc, c’est un roman très bien écrit, avec une langue maîtrisée et des images poétiques, mais dans lequel j’ai eu du mal à entrer en raison de l’intrigue qui ne m’a pas séduite et des personnages que j’ai perçus comme stéréotypés.

 

SPOILER 1 La narratrice a quelque chose de particulier sans pour autant avoir réussi à me toucher véritablement. J’ai eu pitié d’elle tout en appréciant sa liberté ; mais le fait qu’elle tue des animaux m’a rebutée – surtout la scène du chat. Elle m’a un peu fait penser à une petite fille de conte qui finit par se transformer en sorcière et qui reste toujours au bord d’une forme de folie.

SPOILER 2 par exemple, les femmes du village – visiblement toutes sans exception – qui haïssent la mère et, en réalité, sont jalouses d’elle. Pourquoi ? Le lecteur le devine : pour sa liberté, parce qu’elle couche avec qui elle veut, parce qu’elle vit seule. C’est clairement du slut-shaming de la part de ces femmes qui, apparemment, sont toutes vieilles, ont une vie rangée qui les ennuie et qu’elles peuplent de paroles nauséabondes sur la marginale. J’ai eu une impression de stéréotype sur le village et ses commères éternelles qui a renforcé l’impression de semi-conte de fées, mais qui m’a aussi semblé artificiel. Pareil pour le côté « sauvage » de la narratrice : plongé dans ses pensées, le lecteur a presque l’impression d’un être bestial, seulement dirigé par ses sentiments, qui ne reçoit aucune affection de personne et qui s’enferme dans une forme de spirale infernale qui la mène, finalement, à vivre recluse, comme sa mère, et à suivre le chemin qui, pourtant, l’avait tant fait souffrir enfant. J’ai eu aussi du mal avec le côté « prostitution » qui était seulement semi-explicite grâce aux insultes des femmes : la mère monnaye-t-elle vraiment ses services ou n’est-ce qu’un commérage sans fondement ? Quelle gêne également que la fille couche, également, avec le professeur une fois la mère morte. J’ai eu, parfois, dans ce roman, une impression de salissure constante des personnages, même si la narratrice n’en a pas conscience, même si elle vit dans un monde différent, fait d’oiseaux, de verre, d’arbres et d’ombres. Ces images véhiculent tout de même une idée particulière du corps et de ce qu’il subit. Autre « stéréotype » : les hommes sont absolument tous négatifs, du père violent au prof poisseux en passant par les hommes du bar qui regardent la mère puis la fille avec, on le devine, la lubricité au bord des yeux. 

SPOILER 3 je me suis demandée si elle ne s’était pas suicidée parce que sa fille a couché avec un homme. La haine qu’elle ressent pour son enfant est très gênante, m’a mise mal à l’aise parfois, comme le début du roman dans lequel la narratrice évoque les tentatives d’avortement de sa mère.

SPOILER 4 est-ce l’idée que la fille reproduit, en fin de compte, le schéma de la mère ? ou, au contraire, est-elle véritablement heureuse en fin de compte ?

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