Le Mythe de la virilité : Un piège pour les deux sexes d’Olivia Gazalé
Editeur : Robert Laffont
Année de sortie : 2017
Nombre de pages : 413
Synopsis : Et si, comme les femmes, les hommes étaient depuis toujours victimes du mythe de la virilité ? De la préhistoire à l’époque contemporaine, une passionnante histoire du féminin et du masculin qui réinterprète de façon originale le thème de la guerre des sexes.
Pour asseoir sa domination sur le sexe féminin, l’homme a, dès les origines de la civilisation, théorisé sa supériorité en construisant le mythe de la virilité. Un discours fondateur qui n’a pas seulement postulé l’infériorité essentielle de la femme, mais aussi celle de l’autre homme (l’étranger, le « sous-homme », le « pédéraste » …). Historiquement, ce mythe a ainsi légitimé la minoration de la femme et l’oppression de l’homme par l’homme.
Depuis un siècle, ce modèle de la toute-puissance guerrière, politique et sexuelle est en pleine déconstruction, au point que certains esprits nostalgiques déplorent une « crise de la virilité ». Les masculinistes accusent le féminisme d’avoir privé l’homme de sa souveraineté naturelle. Que leur répondre ? Que le malaise masculin est, certes, une réalité, massive et douloureuse, mais que l’émancipation des femmes n’en est pas la cause. La virilité est tombée dans son propre piège, un piège que l’homme, en voulant y enfermer la femme, s’est tendu à lui-même.
En faisant du mythe de la supériorité mâle le fondement de l’ordre social, politique, religieux, économique et sexuel, en valorisant la force, le goût du pouvoir, l’appétit de conquête et l’instinct guerrier, il a justifié et organisé l’asservissement des femmes, mais il s’est aussi condamné à réprimer ses émotions, à redouter l’impuissance et à honnir l’effémination, tout en cultivant le goût de la violence et de la mort héroïque. Le devoir de virilité est un fardeau, et « devenir un homme » un processus extrêmement coûteux.
Si la virilité est aujourd’hui un mythe crépusculaire, il ne faut pas s’en alarmer, mais s’en réjouir. Car la réinvention actuelle des masculinités n’est pas seulement un progrès pour la cause des hommes, elle est l’avenir du féminisme.
Avis : Je veux lire ce livre depuis sa sortie ! Quand j’ai vu que la bibliothèque de ma fac l’avait, j’en ai profité !
Je pourrais faire une chronique claire et simple de ce livre en quelques mots : « Lisez-le, ce livre est génial ! ». Mais je vais quand même tenter d’argumenter, histoire que vous sachiez à quoi vous attendre. La première moitié du livre traite des femmes, du fait qu’elles ont été opprimées par l’homme et son mythe de la virilité, comment c’est arrivé. La seconde se focalise sur les hommes et la manière dont ils se sont auto-piégés à cause de ce même mythe, mais aussi comment, pendant des siècles, certains hommes ont été opprimés – elle inclut aussi une partie sur le féminisme et la théorie du genre. J’ai appris énormément de choses, mais je me suis aussi rendu compte que je pensais savoir d’autres choses, alors que non, en fait, j’étais à côté de la plaque. Très bonne rééducation donc ! L’auteure traite le sujet de manière plutôt chronologique : elle commence avant l’Antiquité, histoire de nous montrer comment les femmes étaient traitées avant. Puis, c’est la Chute, dans la mythologie, dans la religion, et donc la société qui la reflète. La femme est considérée comme inférieure, inutile, faible, et est traitée en circonstance. Tout est abordé : la sexualité, la fécondité, le mariage ; mais aussi la prostitution. Et là, je dois dire que l’auteure a utilisé des arguments qui ont réussi à me convaincre. J’ai toujours été gênée par la vente du corps des femmes ; mais la façon dont elle l’expose nous fait comprendre qu’encore une fois, ce sont nos préjugés qui parlent. J’ai apprécié qu’une grosse partie du livre soit consacrée aux hommes eux-mêmes, et j’ai appris encore plus de choses à leur propos que dans les parties concernant les femmes ! On oublie souvent qu’elles ne sont pas les seules à subir le calvaire de la virilité. En gros, tout tourne autour de leur phallus, et de la façon dont ils l’utilisent. La partie sur les pédérastes grecs … quel coup pour mon amour de l’Antiquité !
Je dois avouer, j’ai adoré ce livre, mais il m’a mise dans une rage … Je n’ai jamais compris la supposé infériorité des femmes, ni comment nous en étions arrivés là. Ce livre me donne une réponse qui me met en colère autant qu’elle satisfait mon envie de savoir. La société actuelle évolue, heureusement, mais il reste des préjugés ancrés, un sexisme ordinaire difficile à combattre parce que tellement intériorisé qu’il est difficile à voir. Il se trouve partout, dans notre façon de parler, de penser, de percevoir les situations et les gens, de désigner les choses. Ce n’est pas la faute des femmes ou des hommes actuels ; on ne peut pas endiguer ou oublier des siècles d’éducation genrée : « ce n’est pas féminin », « une fille ne doit pas faire ça », mais aussi « un garçon ne porte pas de rose », « un garçon ne fait pas ça », « ce n’est pas viril ». Ne parlons même pas des insultes suprêmes, comme les appelle l’auteure. Mais il est possible de faire en sorte que les générations futures soient moins affectées. Evidemment, quand on parle de la révolution féminine, on ne doit pas oublier qu’elle n’a pas lieu partout, malheureusement. Dans certaines régions du monde, les femmes sont toujours traitées comme des inférieures. Rien que le terme « excision » m’a donné envie de balancer le livre à travers la pièce … j’ai vraiment eu du mal à lire cette partie ! Quant à la partie sur ceux qui étaient considérés comme des « sous-hommes » … C’est triste de se dire que ce genre de préjugés est encore plus résistant que ceux sur les femmes …
En fait, tout est à revoir. Le sexisme ordinaire nous tire vers le bas, et permet à certains antiféministes de montrer que les femmes sont inférieures, en font trop, etc. Quant au féminisme radical, il éloigne certaines femmes du féminisme à cause de sa stigmatisation de la sexualité, et de son idéal pro-supériorité féminine. Nous avons donc encore du chemin à faire, mais ce serait quand même mieux de le faire tous ensemble, sans laisser personne de côté, ce que rappelle la partie LGBTQYA+. Il fallait que la communauté soit intégrée au livre, sans quoi il aurait manqué quelque chose.
P. S. : alors, oui, c’est écrit par une femme, mais je ne pense pas que son sexe l’empêche de traiter convenable le sujet. Elle s’appuie sur de nombreux autres auteurs, et donne toutes ses références. Et fait aussi une remarque à propos du Deuxième sexe de Simone de Beauvoir en rappelant, à juste titre, que, même si son livre n’est pas objectif, il permet de faire un grand pas vers la compréhension de la femme et de sa situation. (faudrait peut-être que je le relise d’ailleurs !)
Conclusion : à lire pour tous, de tout sexe, de tout genre. TOUS ! Ce livre permet de comprendre comment nous en sommes arrivés là : c’est l’origine de tout changement, non ?
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