Poutine, l’homme sans visage de Masha Gessen
Genre : Historique, Biographie
Editeur : Fayard
Année de sortie : 2012
Nombre de pages : 311
Titre en VO : The Man Without a Face: The Unlikely Rise of Vladimir Putin
Synopsis : En 1999, l’entourage de Boris Eltsine lui cherche un successeur. Pourquoi pas un ancien agent du KGB sans envergure, Vladimir Poutine, parfaite marionnette ? Mais voilà que, dès son arrivée au pouvoir, le jeune et terne réformateur démocrate imaginé par les oligarques et rêvé par l’Occident révèle sa vraie nature : celle d’un ancien truand devenu le parrain d’un clan mafieux qui met la Russie en coupe réglée, étouffant toute forme de contestation par la violence et la terreur.
Journaliste indépendante, Masha Gessen livre ici une enquête sans précédent, fondée sur des témoignages et des documents inédits. Elle a pris des risques réels – et fait d’ailleurs l’objet de menaces et d’intimidations, comme tous ceux qui, depuis dix ans, font entendre une voix dissonante dans la Russie de Poutine – pour dévoiler dans ce document unique la face obscure de l’ »homme sans visage ».
Avis : J’ai vu ce livre sur la chaîne d’Olive ; elle en parlait comme d’un ouvrage nécessaire pour bien saisir la situation de la Russie et de Vladimir Poutine. Cela m’a intriguée, et j’ai été ravie de le trouver à la fac !
En refermant Poutine, l’homme sans visage, je me suis demandé si je n’avais pas fait une erreur en le lisant. J’ai été tellement dégoûtée pendant la lecture, tellement indignée par ce que je lisais, que j’ai commencé un autre livre en même temps, histoire de me remonter un peu le moral ! Olive avait raison : le lecteur apprend ici comment Vladimir Poutine est devenu président – et honnêtement, en lisant, je continuais à me demander comment il avait fait pour en arriver là ! -, et aussi pourquoi la Russie est dans un tel état. Poutine était censé être un homme facile à manipuler pour les hauts dirigeants russes ; mais c’est finalement lui qui les a tous embobinés. Quelques éléments de sa vie – ceux que l’on peut connaître – sont racontés ici ; par exemple, le fait qu’il aime se présenter comme un voyou, et qu’il est très violent d’un coup, ce qui est visible dans certaines vidéos de lui. L’auteure évoque aussi une maladie, que je ne connaissais pas, dont serait atteint Poutine, la pléonexie, c’est-à-dire, le fait de vouloir avoir ce que d’autres possèdent légalement, et d’avoir plus qu’eux. Elle donne des exemples qui m’ont halluciné, comme pratiquement tout le reste du livre. Il permet vraiment d’ouvrir les yeux, et d’arrêter de se voiler la face, même si le lecteur ose à peine y croire, tellement cela semble énorme parfois.
Il faut dire que sa biographie commence par un assassinat. Pas top quand même ! Et le nombre de corps qui s’accumule par la suite est hallucinant … ça m’a tellement dégoûtée, et tellement désespérée. Il est tellement facile de se débarrasser de ses ennemis en envoyant d’autres les tuer, ou en les empoisonnant. Je m’attendais à lire l’histoire de Litvinenko, l’espion russe du KGB empoisonné au polonium à Londres ; et apprendre que ce serait Poutine lui-même qui aurait signé la demande d’exécution m’a achevée.
Ce livre m’a mise en colère à cause de l’impuissance que j’ai ressentie tout le long de ma lecture face à la corruption qui ronge la Russie. Des intellectuels ont tenté de renverser le gouvernement, de montrer à quel point les dirigeants sont pourris, à quel point ils sont capables de tout et de n’importe quoi. L’auteure explique tout de même comment l’Etat a orchestré des attentats dans tout le pays afin de mettre en avant la figure du président. Il a tenté de faire porter le chapeau aux Tchétchènes, mais des journalistes ont vite tout compris. Mais comment ce genre de choses est encore possible à notre époque ?!!
L’épilogue apporte un peu d’espoir au lecteur – jusqu’à ce qu’il se rende compte qu’à nouveau Poutine a été élu cette année même. Un passage en particulier m’a fait mal au cœur, lorsque la petite fille de l’auteure lui demande si elle peut l’accompagner à la manifestation. Elle sait que, si sa mère dit non, c’est que c’est dangereux. Masha Gessen lui dit alors qu’elle pourra venir pour la toute dernière manifestation ; la petite lui répond : « Quand Poutine ne sera plus là ? » Pour elle, c’est un méchant, un monstre, quelqu’un de dangereux, alors qu’elle est encore petite ! Les frissons que ce passage a provoqués chez moi ! J’avais envie de leur faire des câlins à toutes les deux. L’auteure explique que les révolutions prennent du temps, que le renversement du régime ne pourra se faire que dans plusieurs années ; cela fait maintenant six ans, il serait temps !
Donc, une très bonne biographie, mais qui indigne le lecteur comme rarement.