Winter d’Ali Smith
Editeur : Hamish Hamilton
Année de sortie : 2017
Nombre de pages : 322
Titre en français : Pas encore traduit !
Synopsis : Winter. Bleak. Frosty wind, earth as iron, water as stone, so the old song goes. And now Art’s mother is seeing things.
Come to think of it, Art’s seeing things himself.
When four people, strangers and family, converge on a fifteen-bedroom house in Cornwall for Christmas, will there be enough room for everyone?
Winter. It makes things visible. In Ali Smith’s Winter, life-force matches up to the toughest of the seasons. In this second novel in her Seasonal cycle, the follow-up to her sensational Autumn, Smith’s shapeshifting novel casts a warm, wise, merry and uncompromising eye over a post-truth era in a story rooted in history and memory and with a taproot deep in the evergreens, art and love.
Avis : J’avais adoré Autumn en octobre, je me suis donc dit que j’allais autant aimé Winter !! Je me suis lancée dans cette lecture persuadée que j’allais adorer …
… et c’est peut-être la raison pour laquelle j’ai moins aimé. J’ai eu du mal à entrer dans la première partie du livre, sans doute à cause d’une espèce de réalisme magique ou de symbolisme auquel je n’ai pas accroché. J’avais eu le même problème avec Autumn, qui commence assez bizarrement, mais qui a su m’emporter ensuite avec la relation entre les personnages, que j’ai adorés (la relation, et les personnages !) Ici, je n’ai pas spécialement apprécié Art et sa mère, et encore moins Charlotte, qui a le mauvais rôle dès le début. Les opinions d’Art et Charlotte sont opposées, ce qui crée des étincelles, et le lecteur ne sait pas de quel côté se placer : Art n’est pas assez, et Charlotte est trop. Je n’ai pas réussi à m’accrocher à un personnage qui m’aurait permis de me lancer dans le livre. Aussi, je ne pouvais pas ressentir quoi que ce soit en lisant la première partie – peut-être de l’indignation quand on voit comment tourne la relation entre Art et Charlotte, mais, pas grand-chose de plus. Et pour que j’aime un livre, il faut qu’il me procure des émotions, il faut que je sois dedans, avec les personnages, il faut que je vive l’histoire. Les seuls livres qui « ont le droit » de passer outre sont les livres qui ne sont pas censés procurer de l’émotion, genre les non-fictions scientifiques, ou les encyclopédies, etc. Par exemple, je suis complètement passée à côté de l’histoire de la tête flottante. Peut-être n’était-ce aussi pas le bon moment pour moi. Je ne suis vraiment entrée dans le livre qu’à peu près à la moitié, et j’ai largement préféré la deuxième partie du livre : je me suis retrouvée dans les opinions des personnages et dans leurs attitudes, notamment celles de Lux et Iris. Je les ai beaucoup appréciées ! Elles sont plus positives, plus réactives, elles pensent autrement. Winter est aussi un livre qui traite de l’actualité, et donc un livre assez triste. L’auteur traite de la politique au Royaume-Uni, notamment celle du protectionnisme mise en place par Teresa May – qui est citée au début du livre pour avoir dit que si l’on se pense un citoyen du monde, on est un citoyen de nulle part … -, ainsi que de la question des migrants, de l’homme qui devient « égoïste », et qui décide de ne pas tendre la main à celui qui en a besoin, ou qui juge sans chercher à comprendre. L’auteur nous met aussi en face de notre hypocrisie, de notre manque de réaction, tout en n’étant jamais moralisatrice ou dure ; elle se place ainsi aux antipodes de Charlotte, notamment avec Iris, qui reste toujours calme, même en expliquant des choses qui lui tiennent à cœur, même lorsqu’elle pourrait s’énerver contre sa sœur qui ne fait aucun effort. J’ai adoré ces parties, et cette façon de faire entrer son histoire dans l’Histoire ; mais l’échec de la première partie ne me permet pas de faire de ce livre un de mes préférés. J’ai même eu du mal avec les flashbacks alors qu’habituellement, ça ne me dérange pas du tout !!
Concernant les personnages, comme je l’ai dit plus haut, je n’ai pas réussi à apprécier Art et sa mère. Arthur est un homme qui écrit un blog sur la nature appelé « Art in Nature ». Il prépare à l’avance ce qu’il va dire, et note dans un carnet tout ce qui peut lui servir – pas du tout spontané donc ! Sa vie tombe en morceaux quand il se dispute violemment avec Charlotte, et qu’elle décide de se venger de ce qu’il lui a fait. Il se coupe alors du monde, le temps de passer Noël avec sa mère à Cornwall. J’ai trouvé qu’Arthur était un personnage assez faible, notamment parce qu’il tente de se convaincre qu’il peut rester neutre politiquement, qu’il peut ne pas prendre de parti. Je n’avais aucun atome crochu avec lui, tout comme avec sa mère, Sophia. Elle m’a paru revêche et aigrie, et même si elle finit par évoluer, et qu’on se rend peu à peu compte que ce n’est sans doute qu’une façade, je n’ai pas réussi à l’aimer. Elle ne cesse de rabaisser sa sœur, et je n’ai pas vraiment compris pourquoi. Elle pense tout savoir, alors qu’on lui prouve à de nombreuses reprises qu’il y a des choses qu’elle ne sait pas, ou qu’elle n’a pas perçues au moment où c’est arrivé. Elle fait aussi un mystère du père d’Arthur, mais je n’ai pas compris l’intérêt ; elle ne veut pas que le passé du père soit un fardeau pour le fils, mais Arthur ne connaît pas son père, ni celui qui passe pour tel, et c’est clairement un vide dans sa vie. Elle m’a aussi un peu agacée. Je lui ai largement préféré sa sœur, Iris. Elle paraît déterminée, sûre d’elle, et elle ne parle pas pour ne rien dire. Bien plus sympathique que Sophia, elle se rappelle des moments passés avec sa famille avec amour, et ne s’énerve jamais, même quand elle est insultée par sa petite sœur. Militante, elle travaille en Grèce pour tenter d’aider les migrants qui fuient leur pays. Elle tente alors d’expliquer son point de vue à Sophia, qui a l’air de s’en fiche d’une puissance !!! J’ai aussi beaucoup aimé Lux, qui a une vision totalement différente de la vie. Sa façon de réagir est rafraîchissante, et elle permet à l’auteur de montrer qu’un étranger en Angleterre peut être plus cultivé, plus humain, qu’un Anglais sur son propre pays et sa propre culture. En effet, elle en connaît plus sur Shakespeare (par exemple) qu’Art et sa mère, et ne se plaint pas une seconde de sa situation, dix fois pire que celle d’Arthur. Elle est aussi un peu mystérieuse : le lecteur et les autres personnages ne savent pas si le nom qu’elle donne est le vrai ; elle pourrait être n’importe qui, venir de n’importe où et, en quelque sorte, cela ne compte pas, parce qu’elle est ici. Mais la société la rattrape, bien sûr, et, comme elle est étrangère, elle a peur de devoir quitter l’Angleterre, un pays pour lequel elle a abandonné sa terre natale. Elle représente la situation des migrants, en quelque sorte, et elle permet à Arthur de se rendre compte de ce qui se passe dans le monde.
La fin est écrite au futur, ce qui laisse douter le lecteur que tout arrive vraiment. Noël est terminé, et Arthur se retrouve entre Sophia et Iris, un intermédiaire qui se permet alors de les bousculer avec des questions parfois existentielles. Il a évolué, heureusement, mais un peu tard peut-être. La seule chose qu’il me manque : un aperçu de la vie de Lux. J’ai hâte de lire le prochain tome dans la série d’Ali Smith ; j’espère que j’aimerais plus que Winter !
Donc, un très bon livre, mais qui ne peut pas être un coup de cœur à cause d’une partie des personnages, que je n’ai pas vraiment apprécié, et de la première partie, dans laquelle je n’ai pas su entrer. Une deuxième partie bien meilleure, qui introduit deux nouveaux personnages que j’ai beaucoup aimés, et qui fait réfléchir le lecteur sur l’actualité.