Redbluemoon

I found myself in Wonderland.

Archive pour juin, 2017

Lettres à un jeune poète de Rainer Maria Rilke

Posté : 16 juin, 2017 @ 1:26 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Genre : ClassiqueLettres à un jeune poète

Editeur : GF

Année de sortie :2011 [1929] 

Nombre de pages : 151

Synopsis : En 1903, Rainer Maria Rilke entame une correspondance avec un jeune homme de vingt ans, Franz Kappus, élève d’un établissement militaire, qui lui a envoyé ses premiers essais poétiques. Plusieurs lettres suivront, que Kappus publiera en 1929, trois ans après la mort de Rilke.

Ces textes sont devenus immédiatement célèbres et comptent parmi les plus beaux de Rilke ; au fil du temps et des réponses, ils composent une superbe méditation sur la solitude, la création, l’amour, l’accomplissement de l’être.

A la suite de ce recueil, d’autres lettres ont été ajoutées, adressées à Lou Andreas-Salomé, Friedrich Westhoff et Clara Rilke. Elles continuent de parler « de la vie et de la mort, et de ceci que l’une et l’autre sont grandes et magnifiques. »

 

Avis : J’ai tellement entendu parler de ce livre, que j’avais peur de le lire et de ne pas aimer ! Mais je me suis finalement dit que je ne saurais jamais si je ne le lisais pas !

Rilke répond ici aux lettres d’un jeune poète de vingt ans, Kappus, qui les publiera après la mort de l’écrivain. Ici, il nous expose son point de vue sur la création qui requiert une solitude qui m’a semblé abyssale et effrayante. Elle n’admet personne, pas même les personnes très proches. La création demande l’enfermement dans un monde intérieur dans lequel personne ne peut entrer, et que personne ne doit interrompre. Le créateur devrait donc vivre en ermite quand il est en phase de création. Même si je sais que c’est inévitable, j’ai vraiment du mal avec cette idée. Certes, la solitude permet de se (re)trouver soi-même, son monde, ses idées, le fait de ne pas être interrompu permet une fluidité et une unité ; mais imaginer un monde où il faudrait rejeter ses proches, et donc les faire souffrir, parce que son propre monde est plus important me semble cruel. Et pourtant, je me rends compte que je le fais aussi parfois : je m’enferme pour me (re)trouver, pour vivre un peu en moi-même, et pas à l’extérieur, dans la société, percluse de conventions. Il parle aussi de l’amour, impossible aux jeunes gens parce qu’ils ne sont pas complets ; et je suis d’accord. Il faut d’abord apprendre à s’aimer soi-même avant de tenter d’aimer quelqu’un d’autre. Comment s’offrir pleinement quand nous ne sommes pas complets ? On peut aussi se créer ensemble, se compléter tout en vivant côte à côte. Il mentionne le mariage, qui formalise l’amour ou tente de le sauver alors que ce n’est pas possible. La mort est également évoquée, mais juste une phrase, reproduite dans le synopsis. La difficulté de vivre en créant est presque insupportable, comme le poids de la création elle-même, qui élève le créateur en l’isolant des autres, et en le faisant souffrir.

 

Donc, de belles réflexions profondes et que l’on ne peut reconnaître que comme vraies, qui font réfléchir le lecteur. Un livre à relire.

Un roman français de Frédéric Beigbeder

Posté : 15 juin, 2017 @ 7:06 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Genre : Autobiographie Un roman français

Editeur : Le Livre de Poche

Année de sortie : 2010 [2009]

Nombre de pages : 246

Synopsis : C’est l’histoire d’un grand frère qui a tout fait pour ne pas ressembler à ses parents, et d’un cadet qui a tout fait pour ne pas ressembler à son grand frère.

C’est l’histoire d’un garçon mélancolique parce qu’il a grandi dans un pays suicidé, élevé par des parents déprimés par l’échec de leur mariage.

C‘est l’histoire d’un pays qui a réussi à perdre deux guerres en faisant croire qu’il les avait gagnées. [...]

C’est l’histoire d’une humanité nouvelle, ou comment des catholiques monarchistes sont devenus des capitalistes mondialisés.

Telle est la vie que j’ai vécue : un roman français. F. B.

 

Avis : J’avais lu ce livre il y a six ans parce qu’une de mes professeures de français considérait qu’il ferait sans doute partie des classiques dans plusieurs années. Je me suis dit qu’une piqûre de rappel ne me ferait pas de mal !

Je me souviens avoir beaucoup aimé ce livre plus jeune. J’avais trouvé qu’il était fort, authentique ; j’étais convaincue qu’il ferait partie des livres que l’on n’oublierait pas par la suite. Et aujourd’hui, quel est mon avis ? Eh bien, je n’ai pas retrouvé l’émotion et l’intérêt de la première lecture. Je me souviens avoir adoré l’écriture : aujourd’hui, elle ne me paraît plus aussi authentique, aussi sincère que la première fois. J’ai l’impression de rajouts parfois, d’exagération – je dis bien, « impression », cela ne veut pas dire que j’ai la science infuse et que c’est vrai. Le livre est divisé en plusieurs récits : celui du présent, l’arrestation de l’auteur parce qu’il a sniffé de la coke sur un capot de voiture, son passage par la prison pendant deux nuits, et celui du passé, ses souvenirs qui ressurgissent enfin, et qu’il note pour ne jamais plus les oublier. Un roman français sonne parfois comme une thérapie nécessaire à l’auteur pour être complet, pour retrouver la mémoire ; et ce retour de la mémoire est, étrangement, entraîné par l’enfermement, l’impossibilité de faire quoi que ce soit d’autre que de penser pendant deux nuits entières. Les verrous lâchent, les vannes s’ouvrent, et les souvenirs déferlent. Je n’imagine pas ne pas me souvenir de mon enfance : ce doit être affreux. Et donc, j’imagine le soulagement de l’auteur quand, enfin, tout lui revient. Certains passages sont émouvants, notamment ceux avec sa fille, qui passe elle aussi par l’enfance, enfance que son père espère joyeuse, et non un mensonge comme la sienne.

De plus, je me suis plusieurs fois trouvée en désaccord avec ce que dit l’auteur : certaines réflexions, notamment sur les femmes, m’ont paru réductrice. Quant à celle sur la prison, je trouve, évidemment, inacceptable que l’on enferme quelqu’un deux nuits dans un endroit qui pousse à la claustrophobie quand ce n’est absolument pas justifié. Ce genre d’endroits ne devrait pas exister. Mais quand l’auteur se dit que, du coup, il aurait dû être plus clément avec des criminels accusés de viol ou de meurtre quand il était juré, là, non : « Quand j’étais juré à la cour d’assises de Paris, j’ai envoyé, le cœur léger, des violeurs et des assassins en prison pour huit ans, dix ans, douze ans. Je serais plus laxiste aujourd’hui. Tous les citoyens qui sont cités comme jurés devraient passer un court séjour derrière les barreaux pour connaître ce qu’ils vont infliger aux accusés. » Dans ce cas, il faudrait violer les violeurs et assassiner les assassins pour leur faire comprendre ce qu’ils ont fait subir à leur victime ? Je ne suis pas non plus d’accord quand il dit que, ce qui compte dans un livre, ce n’est pas l’histoire, ni les personnages, mais l’auteur, l’homme que l’on découvre derrière : « dans un roman, l’histoire est un prétexte, un canevas ; l’important c’est l’homme qu’on sent derrière, la personne qui nous parle. » Ce n’est pas vrai pour tous les livres, et ce n’est pas l’homme qui compte, mais ce qu’il raconte.

Il y a tout de même des points positifs, notamment les réflexions sur les générations, les enfants et le divorce, ainsi que sur la société, en arrière-plan des trois. Les générations sont comme inversées : parce que l’enfance n’en a pas vraiment été une, les parents se lâchent une fois adultes, (re)deviennent des enfants, se comportent comme des ados, ne parviennent pas à vivre une vie de famille heureuse parce que ce n’est pas ce dont ils ont besoin. D’où le divorce. Ici, l’auteur explique bien ce que ressentent les enfants quand leurs parents se séparent, mais il analyse cela avec ses yeux d’adulte : les enfants veulent que leurs parents restent ensemble, ce qui est égoïste de leur part. Les parents, eux, veulent vivre leur vie, tout en n’affectant pas les enfants, ce qu’ils font en leur mentant. Les enfants se sentent rejetés, de trop, et tentent de comprendre ce qu’on ne veut pas leur expliquer. Honnêtement, le divorce est une des pires choses à vivre pour un enfant, c’est traumatisant, parce que les parents tentent de faire comme si de rien n’était alors que, pour l’enfant, le monde s’effondre. Il faudrait expliquer, il faudrait faire comprendre, il faudrait se mettre à sa place et surtout lui expliquer que ce n’est pas sa faute. Sa fille, pour l’auteur, agit comme un révélateur – mot employé par Beigbeder dans le texte – : toutes ses premières expériences, il les revit avec elle, ce qui doit vraiment être un sentiment merveilleux. La sensibilité qu’apporte l’enfant à l’adulte est aussi incroyable : en quelques mots, il peut nous faire pleurer ou rire, parce qu’il est innocent et ne comprend pas vraiment ce qu’il dit. Ce qu’apporte aussi ce livre, un peu comme Le crime du comte Neuville d’Amélie Nothomb, est la compréhension que les riches ne sont pas plus heureux que ceux qui sont moins pourvus socialement. Bien sûr, l’argent contribue au bonheur, parce qu’il est nécessaire pour se loger, se nourrir, vivre décemment, et même aisément, avoir des loisirs. Mais être élevé dans la noblesse, la bourgeoisie, dans le « trop d’argent », cela ne veut pas nécessairement dire que l’on soit forcément heureux. On peut ne manquer de rien matériellement, et manquer d’amour, de confiance en soi, de positivité. Dans ce cas, même riche, on ne peut pas être heureux. On ne peut pas se plaindre de ses conditions matérielles, mais on peut dire que l’on n’est pas heureux sans se voir rabrouer par le « Mais vous avez de l’argent, vous êtes forcément heureux ! » Je vois des avis qui disent qu’il se plaint alors qu’il a tout, mais « tout » ne veut rien dire. On peut être malheureux et avoir de l’argent. On peut aussi tout faire pour être plus heureux et arrêter de se plaindre tout le temps, pas seulement parce que d’autres sont plus malheureux, mais aussi parce que la vie est courte, donc autant tout faire pour être le plus heureux possible nous-mêmes, sans nous comparer aux autres.

La fin rapproche définitivement présent et passé, en liant le grand-père de l’auteur et sa fille, qui ne se sont pas connus, dans un lieu marquant de son enfance. La transmission finale est belle.

 

Donc, un bon livre malgré quelques gros désaccords. De belles réflexions, et un rappel que l’argent ne fait que contribuer au bonheur.

The Maze Runner, book 3: The Death Cure de James Dashner

Posté : 14 juin, 2017 @ 9:05 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

The Death CureGenre : SF

Editeur : Chicken House

Année de sortie : 2013 [2012]

Nombre de pages : 327

Titre en français : L’épreuve, tome 3 : Le remède mortel

Synopsis : The trials are over. WICKED is planning to restore the survivors’ memories and complete the final cure for the Flare.

But Thomas has already remembered more than they think. And he knows WICKED can’t be trusted.

The time for lies is over. But the truth is more dangerous than Thomas could ever imagine. Will anyone survive the Death Cure?

 

Avis : J’avais trouvé la fin de The Scorch Trials assez frustrante, mais, comme j’avais peur d’être déçue par la fin de la série, j’ai préféré lire d’autres livres entre temps. Il me fallait quand même connaître la fin, alors je me suis lancée !

J‘ai eu les mêmes problèmes avec The Death Cure qu’avec le deuxième tome de la série : je ne suis pas parvenue à vraiment m’attacher aux personnages, donc je n’ai pas ressenti l’émotion essentielle à un coup de cœur. J’étais avec eux à partir d’un moment, mais je ne parvenais pas à m’inquiéter pour eux, j’avais simplement envie de savoir ce qui allait arriver, savoir comment l’histoire de Thomas allait finir ! Et pour ça, on peut dire que l’auteur sait manier le suspense : il met parfois ses personnages dans une telle situation qu’on se demande si tout ne va pas finir comme Divergente ! On ne peut pas non plus nier que l’action est omniprésente. Mais, autre chose m’a dérangé ici : Thomas est tellement perdu, il ne sait pas du tout qui croire, à qui faire confiance, s’il est bien tiré d’affaire ou pas, qu’il en devient un peu agaçant. Il tourne en rond, se pose toujours les mêmes questions et, pourtant – peut-être légère incohérence – quand il prend des décisions, il le fait d’un seul coup, sans réfléchir, comme s’il sentait ce qu’il fallait faire, la direction à prendre. S’il sait quoi faire, pourquoi se poser mille questions avant ? Il ne semble jamais se tromper dans ses choix, donc pas besoin de tergiverser ! Dans ce tome, de nombreux lecteurs s’attendaient à enfin découvrir le passé de Thomas, un des grands points d’interrogation de la série ; autant vous prévenir, on ne le découvre jamais. D’un côté, c’est très frustrant, et d’un autre, il était impossible de le révéler en si peu de pages. Cette histoire mériterait un tome à elle toute seule – il me semble que la préquelle n’a rien à voir, ce qui est, aussi, assez décevant. En revanche, à la fin, une phrase révèle quelque chose qui m’a laissée bouche bée ! Cela explique une partie de ce qui est arrivé à la Terre pendant l’explosion solaire, et cela donne envie d’en savoir plus !!

Concernant les personnages, comme je l’ai dit, impossible de m’attacher à eux. Donc, quand il leur arrive quelque chose, ou que l’un d’eux meurt, je n’ai pas ressenti ce pincement au cœur que j’ai habituellement. Je me suis sentie insensible, c’était affreux ! Thomas, comme je le disais, est assez confus, mais surtout, assez incohérent : il ne sait pas à qui faire confiance, et il prend ses décisions au feeling, presque sur un coup de tête. Il est aussi un peu agaçant à cause de cela. Agaçante aussi sa façon de se morfondre, de se plaindre, même quand il fait le bon choix ; surtout qu’à la fin, il ne semble pas se souvenir de ces plaintes. Quant à Minho, lui aussi devient incohérent, comme Newt d’ailleurs : le premier est comme dans le deuxième tome, cassant, blessant sans raisons, alors que Thomas pense qu’il n’a pas un fond méchant, et le second devient exactement pareil ! Newt, le gentil, toujours patient, celui que je préférais ! Mais pour lui, l’explication est cohérente, même si ce n’est pas celle que j’aurais choisie. [SPOILER] L’idée que Newt demande à Thomas de le tuer quand il aura dépassé le stade de non-retour est incohérente elle aussi : Newt explique à Thomas à quel point il le déteste - ce qui n’est sans doute pas vrai -  et la logique voudrait qu’il confie cette tâche difficile à Minho, son meilleur ami. Le fait que Thomas soit le héros du livre rend donc l’action incohérente elle aussi. [FIN DU SPOILER] Vient ensuite Brenda, un personnage que j’apprécie vraiment ; elle n’est pas tout à fait sincère et cache des choses à peu près tout le monde, mais c’est pour leur bien, et le lecteur le sent, comme Thomas sent qu’il peut lui faire confiance. Evidemment, on retrouve des personnages que l’on n’apprécie pas, comme Rat Man, qui, étrangement, est resté sous les traits d’Aidan Gillen dans mon esprit, après le visionnage de The Scorch Trials. Ce n’est pas un personnage manichéen, il pense véritablement œuvrer pour le bien général, comme toute l’association WICKED d’ailleurs, et notamment Ava Paige, que l’on ne « découvre » qu’à la fin. Mais, le pire personnage dans tout ce livre est, pour moi, Teresa. Depuis le deuxième tome, je ne la supporte plus, tellement que [SPOILER] même à la fin, quand elle se sacrifie pour sauver Thomas, je n’ai pas réussi à me sentir mal. [FIN DU SPOILER] Certes, je comprends son point de vue : elle veut, elle aussi, faire le bien général, elle veut surtout aider Thomas. Mais elle est tellement agaçante, et Thomas la déteste tellement, que le lecteur ne lui laisse pas le bénéfice du doute.

La fin aurait très décevante sans la révélation à la fin, dans l’épilogue ! Cela m’a vraiment surprise, comme de comprendre qu’un des personnages était avec WICKED depuis le début ! Maintenant, il manque toujours le passé de Thomas, ses années à aider WICKED : les bribes de souvenir que l’auteur nous offre ne suffisent pas. Un dernier livre peut-être ?

 

Donc, un bon tome de fin malgré l’incohérence et les manques qui subsistent, comme le passé de Thomas, l’explication de son implication avec WICKED. Le meilleur volume reste le deuxième, The Scorch Trials.

Un secret de Philippe Grimbert

Posté : 13 juin, 2017 @ 3:32 dans Avis littéraires | 2 commentaires »

Genre : Autobiographie, Biographie, Historique Un secret

Editeur : Grasset

Année de sortie : 2007 [2004]

Nombre de pages : 191

Synopsis : « Aussi longtemps que possible, j’avais retardé le moment de savoir : je m’écorchais aux barbelés d’un enclos de silence. » Ph. G.

Après La Petite robe de Paul, Philippe Grimbert explore de nouveau le territoire du secret, livrant, cette fois, une part intime de sa propre histoire.

 

Avis : Ma mère m’a prêté ce livre depuis un moment, il était temps que je le lise enfin !

Je savais que l’histoire avait un lien avec la Seconde Guerre mondiale, mais je ne savais pas dans quelle mesure, ni vraiment à quoi m’attendre exactement, étant donné la brièveté du synopsis ! Mais, je ne vais pas me plaindre : je préfère entrer dans un livre en ne sachant rien plutôt que de me faire spoiler par l’éditeur dès la quatrième de couverture ! J’ai tout de même appris, grâce à elle, que l’histoire est en fait celle de l’auteur, et plus précisément de ses parents. En effet, le narrateur est mal dans sa peau, il sent qu’il lui manque quelque chose pour être pleinement lui-même, il sent que ses parents ne lui ont pas tout dit, lui cache un secret. Le lecteur comprend dès le début de quoi il est question, mais au cas où : [SPOILER] la famille du narrateur est juive, a vécu la Seconde Guerre mondiale, et n’en est pas sortie tout à fait indemne. [FIN DU SPOILER] De plus, il est dit, dès les premières lignes, que le narrateur – qui n’a pas de nom, mais que l’on associe automatiquement à l’écrivain – se crée un grand frère. [SPOILER] J’ai immédiatement compris que celui-ci a existé, et qu’il est mort ; je ne savais pas dans quelles circonstances. [FIN DU SPOILER] Ce frère imaginaire comble le manque identitaire du narrateur ; en effet, il sent que son père est déçu par la condition fragile de son fils, quand lui et sa femme ont des corps d’athlète qu’ils entretiennent régulièrement. Il est persuadé que son père aurait préféré un garçon aussi robuste que lui, et non un être chétif et malade. J’ai vu que ce livre était considéré comme une autobiographie ; j’ai plutôt trouvé que c’était une biographie des parents du narrateur. En effet, son besoin de comprendre le pousse à écrire l’histoire de Maxime et Tania, leur rencontre, leur amour. Le lecteur se trouve alors face à deux versions : la première est celle que le narrateur s’est imaginée avant de découvrir le secret ; la seconde est la vraie. Ainsi, le narrateur-personnage se voit raconter la véritable histoire de ses parents, et décide de la relater, pour que l’on n’oublie pas ceux qui ont disparu, [SPOILER] à la fois à cause de la haine issue de la guerre et de l’amour de leurs proches. Maxime ne peut pas entretenir le souvenir de sa femme et de son fils parce qu’il se sent coupable ; il pense que leur mort est une punition parce qu’il est tombé amoureux de Tania le jour de son mariage. [FIN DU SPOILER] Ce livre sonne ainsi un hommage, une façon de les faire vivre à nouveau, momentanément, sur le papier. C’est aussi la découverte d’une histoire d’amour controversée, de l’éclosion inattendue du sentiment pour quelqu’un qui ne nous est pas destiné ; petit rappel que nous ne décidons pas qui nous aimons. Une scène m’a choquée et agacée : celle où Hannah est emmenée par les officiers. [SPOILER] Elle aurait pu sauver son fils !! [FIN DU SPOILER] Les deux seules choses qui m’ont gênée dans ce livre : sa brièveté – le livre se lit très vite, peut-être trop. Je n’ai pas eu le temps de m’attacher aux personnages, d’éprouver de l’émotion, excepté à la fin. Enfin, je n’ai pas apprécié certaines remarques pendant que le narrateur raconte la vie de ses parents : [SPOILER] ils n’ont pas le droit d’être ensemble, alors, quand Hannah et Simon, puis Robert, disparaissent, l’auteur écrit que sa mère pensait peut-être que tous les obstacles qui l’éloignaient de Maxime ont désormais disparu. C’est une pensée assez horrible qu’il met presque dans la bouche de sa mère sans savoir. Certains lecteurs peuvent même le voir comme du mépris. [FIN DU SPOILER]

Concernant les « personnages« , étant donné que ce sont des personnes réelles, je ne me vois pas trop donner un avis comme pour les êtres inventés. Excepté la fois où elle m’a prodigieusement agacée, Hannah est une femme effacée, fragile, qui comprend vite, et qui donc, réagit en conséquence. Maxime a tout du serial séducteur, et, même s’il tente de résister à son désir, il est clair qu’il finira par y succomber, comme le sait déjà le lecteur. Il ne veut pas appartenir à la communauté juive, et refuse le port de l’étoile jaune pendant la guerre. Le sport est un thème important dans le livre puisqu’il réunit les parents du narrateur ; c’est à cause de leur physique et de leur activité sportive qu’ils sont attirés l’un vers l’autre. Tania n’est pas une  »briseuse de couple », elle finit même par être un peu attachante, et même touchante à la fin. Mais, à cause de la brièveté du livre, comme je l’ai dit plus haut, il est pratiquement impossible de vraiment s’attacher à qui que ce soit, excepté à la fin. Le dernier chapitre m’a donné des frissons : le secret n’est plus, le narrateur parvient à aider son père, une certaine unité et une certaine harmonie semblent être entrées dans leur vie. Le dernier paragraphe de la première partie de l’épilogue m’a achevée : [SPOILER] « Face aux tombes alignées dans le carré d’herbes j’ai repensé au dernier geste de mon père. Prenant sa femme par la taille, il l’avait aidée à se lever pour la conduire tout doucement vers le balcon du salon, pour un ultime plongeon. Qu’avait-il murmuré à son oreille avant de l’enlacer et de basculer avec elle ? » [FIN DU SPOILER] Je ne m’attendais tellement pas à ça !! La dernière phrase est un dernier hommage : [SPOILER] ce livre est écrit pour Simon, le disparu, l’inconnu, celui qui a hanté le narrateur toute son enfance, le fantôme qui le dominait, représenté en quelque sorte par sa peluche, étrangement baptisé Sim par le narrateur-personnage ignorant. [FIN DU SPOILER]

 

Donc, un très bon livre, surtout grâce à l’émotion de la fin, mais aussi grâce aux réflexions sur le poids des secrets, sur l’identité, sur la culpabilité. Dommage qu’il soit si court !

Thirteen Reasons Why de Jay Asher

Posté : 12 juin, 2017 @ 2:23 dans Avis littéraires | 2 commentaires »

Genre : DrameThirteen Reasons Why

Editeur : Penguin Books

Année de sortie : 2013 [2007]

Nombre de pages : 288

Titre en français : Treize raisons

Synopsis : You can’t stop the future. You can’t rewind the past. The only way to learn the secret … is to press play.

Clay Jensen returns home to find a strange package with his name on it. Inside he discovers several cassette tapes recorded by Hannah Baker – his classmate and first love – who committed suicide two weeks earlier.

Hannah’s voice explains there are thirteen reasons why she killed herself. Clay is one of them. If he listens, he’ll find out why.

All through the night, Clay keeps listening – and what he discovers changes his life …

Forever.

 

Avis : Ce livre était dans ma wish-list depuis longtemps, et il en est enfin sorti grâce à la série TV qui est sortie récemment. Certaines de mes amies ont regardé et ont aimé, alors j’ai sauté le pas !

Et je ne regrette pas du tout de l’avoir fait. Bien sûr, dès le début, le lecteur sait que le thème est difficile, et que donc, le livre risque d’être difficile à lire aussi à certains moments. En effet, Hannah est déjà morte quand la lecture commence, et ces cassettes que Clay reçoit sont tout ce qu’il reste d’elle, tout ce qu’il lui reste pour expliquer son geste, expliquer sa lente descente. « lente descente » : c’est exactement ça. Hannah parle d’un effet boule de neige, et le lecteur comprend au fil des pages que l’expression est très bien choisie. En effet, tout ce dont elle parle semble des petits riens, des situations embarrassantes ou des gestes déplacés, par-ci par-là, pas des choses qui méritent que l’on se donne la mort. Et pourtant, accumulés, ces petits riens sont devenus énormes, insupportables. Evidemment, le message est clair - Jay Asher le dit lui-même lorsqu’il répond à treize questions à la fin de mon édition - : il est important de faire attention à notre façon de traiter les autres, à nos préjugés, à nos moqueries, à nos remarques. Parce que nous ne connaissons pas la vie des autres, nous ne savons pas ce qu’ils vivent, et ils n’ont pas à nous le dire pour que nous soyons corrects avec eux. Nous sommes tous sujets aux préjugés – ne dites pas que vous ne l’avez jamais été, c’est faux -, mais ce n’est pas une raison pour leur céder, pour les laisser diriger nos pensées et nos opinions. On dirait une morale à deux sous, mais tant de gens se laissent guider par les on-dit, les rumeurs, par ce qu’ils croient vrai et pas par la vérité elle-même. Il est facile de juger quelqu’un, de rejeter la faute sur quelqu’un dont la réputation est salie ; il est plus facile alors de se sentir bien dans sa peau, de se sentir irréprochable. Ce sont les apparences qui comptent. Hannah est victime des préjugés des autres, ils la voient telle qu’elle est présentée, et jamais telle qu’elle est vraiment. Dès le début, elle n’a aucune chance avec les différents personnes mentionnées, excepté avec Clay. Et c’est là que l’histoire prend une tournure particulière : [SPOILER] Clay est certain qu’il aurait pu aider Hannah, qu’elle avait décidé de se suicider, qu’elle était convaincue que c’était la solution, et qu’elle n’a pas cherché une dernière fois à se sauver la vie avec lui. Il aurait pu être là si elle s’était ouverte à lui. Et j’ai eu du mal à décider si Clay avait raison ou tort. D’un côté, c’est vrai, il aurait pu être là pour elle si elle l’avait décidé, si elle lui avait demandé de l’aide. Mais, d’un autre, elle avait tellement peur d’être à nouveau déçue et, cette fois, par lui, par quelqu’un d’irréprochable apparemment. Elle ne pouvait pas lui faire confiance parce qu’elle avait déjà fait confiance avant lui, et que tout le monde l’avait laissé tomber. J’ai compris Clay, et j’ai compris Hannah. Sa détresse était telle qu’à la fin, elle choisit sciemment de s’autodétruire, elle choisit de faire quelque chose qu’elle ne veut pas faire pour ne plus pouvoir revenir en arrière, pour ne plus pouvoir vivre. Sa dernière tentative de se raccrocher à la vie est un échec total, et, pourtant, le lecteur, ainsi que Clay – un peu une figure du lecteur dans la mesure où il découvre les cassettes en même temps que lui – garde l’espoir insensé que cette dernière mesure va empêcher le drame. [FIN DU SPOILER] Etrangement, à certains moments, je me suis identifiée à Hannah : parfois, quand les petits riens s’accumulent, on ne sait plus comment s’en sortir. Ils deviennent des montagnes, et il faut se remonter les manches pour les dépasser. J’ai vu beaucoup d’avis dire que c’est manichéen, que tout le monde est méchant et qu’Hannah se présente comme la victime idéale. Je trouve cela complètement faux. Certains sont « méchants » par manque de discernement, ou par ignorance, par bravade, pour impressionner les copains ; mais peu ont véritablement un fond méchant. Peu se rendent véritablement compte de ce qu’ils font en réalité. J’ai eu l’impression de voir une bande de lycéens qui ont trouvé un bouc émissaire, d’autres qui en profitent, d’autres qui interprètent son comportement et qui agissent en conséquence. Mais personne ne cherche vraiment à connaître Hannah, à parler avec elle, à l’aider. Certains avis disent que sa réaction est exagérée : imaginons un peu la détresse et l’amertume d’Hannah, qui a tenté de s’intégrer et qui se retrouve avec une réputation de Marie-couche-toi-là, seule, sans amis, sans personne à qui se confier, avec une situation familiale qui laisse elle aussi à désirer, et des gens qui tentent de lui montrer qu’elle peut leur faire confiance avant de lui planter un couteau dans le dos. Encore une fois, je la comprends. C’est sa vengeance, sa façon de les hanter, de les empêcher de l’oublier, sa façon de faire justice quand la justice ne peut rien faire pour elle. Enfin, j’ai aimé le format de la narration : le lecteur a la réaction de Clay en même temps que les cassettes d’Hannah, ce qui coupe son récit, mais ce qui paraît plus réaliste. J’aurais aimé écouter ses cassettes, mais je pense que l’expérience de lecture aurait été encore pire …

Sans doute à cause du thème, j’ai eu du mal, au début, à m’attacher aux personnages. Clay a l’air d’être quelqu’un de bien, presque parfait, mais le lecteur doute dès qu’il comprend que chaque personne qui reçoit les cassettes est une des raisons pour lesquelles Hannah s’est donnée la mort. Et surtout, dès qu’il lit les différentes histoires liées aux différentes personnes, toutes plus dérangeantes les unes que les autres. Et le fait que Clay arrive tardivement laisse à penser qu’il a fait quelque chose de particulièrement grave. Pourtant, au fil du temps, des cassettes, et de ses réactions, je me suis attachée à lui, et j’ai aussi compris son amour pour Hannah. Il regrette, et pense qu’il aurait pu faire plus pour elle, ce qui donne des moments particulièrement émouvants. Quant à Hannah elle-même, en la lisant – faute de pouvoir l’écouter -, on comprend que son image et sa véritable personnalité n’ont rien à voir, et l’on s’attache à elle. Comme je l’ai dit, je l’ai comprise, et donc appréciée, et j’ai infiniment regretté qu’elle ne soit pas sauvée. D’autres personnages apparaissent, que le lecteur déteste plus ou moins ; parmi les pires : Bryce, ou LE macho par excellence, Mr. Porter, ou l’inutilité professorale incarnée, Courtney, ou la garce par excellence, Jenny, ou l’irresponsabilité incarnée. En fait, je les déteste pratiquement tous à la fin du livre. Petit choc face à la réaction des élèves du cours de communication face à la demande anonyme d’aborder le thème du suicide.

La fin laisse un espoir, pas pour Hannah, bien sûr, mais pour Clay. Il ne refera plus les mêmes erreurs, il parlera, il tentera d’aider. 

 

Donc, un livre important qui traite d’un sujet qui effraie, mais qui devrait être abordé plus souvent. Une claque qui nous rappelle que nous sommes tous sujets aux préjugés, aux moqueries, et donc, à des petits riens qui peuvent gâcher la vie.  

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