Redbluemoon

I found myself in Wonderland.

Archive pour septembre, 2016

The Book of Ivy, tome 1 d’Amy Engel

Posté : 22 septembre, 2016 @ 7:57 dans Avis littéraires | 2 commentaires »

The Book of Ivy Genre : Science-fiction, Jeunesse

Editeur : Lumen

Année de sortie : 2015 

Nombre de pages : 342

Synopsis : Née pour trahir et faite pour tuer … Sera-t-elle à la hauteur ? Voilà cinquante ans qu’une guerre nucléaire a décimé la population mondiale. Un groupe de survivants d’une dizaine de milliers de personnes a fini par se former, et ce qui reste des Etats-Unis d’Amérique s’est choisi un président. Mais des deux familles qui se sont affrontées pour obtenir le pouvoir, la mienne a perdu. Aujourd’hui, les fils et les filles des adversaires d’autrefois sont contraints de s’épouser, chaque année, lors d’une cérémonie censée assurer l’unité du peuple. J’ai seize ans cette année, et mon tour est venu. Je m’appelle Ivy Westfall, et je n’ai qu’une seule et unique mission dans la vie : tuer le garçon qu’on me destine, Bishop, le fils du président. Depuis ma plus tendre enfance, je me prépare pour ce moment. Peu importent mes sentiments, mes désirs, mes doutes. Les espoirs de toute une communauté reposent sur moi. Le temps de la rébellion approche … Bishop doit mourir. Et je serai celle qui le tuera. Née pour trahir et faite pour tuer … Sera-t-elle à la hauteur ? A la fois histoire d’amour torturée, thriller psychologique et dystopie cruelle, The Book of Ivy vous entraîne dans un compte à rebours haletant dont vous ne sortirez pas indemnes.

 

Avis : Ce livre m’a été prêté par ma petite sœur, que je remercie !!

Je ne peux pas nier que ce livre soit un bon roman YA. Mais je me pose des questions : Pourquoi tous les YA se ressemblent-ils ? Pourquoi le schéma narratif est toujours le même ? Et pourquoi, pourquoi l’amour est traité de cette façon ? J’ai de plus en plus de mal à supporter cette uniformité que je retrouve dans tous les romans jeunesse, et encore, ici, l’amour, qui tombe de nulle part dans les autres, est justifié. Mais d’autres éléments rendent ce livre assez cliché, trop peut-être, et notamment le personnage masculin, parfait (même si l’héroïne dit que ce n’est pas le cas, c’est justement ses petites imperfections qui font qu’il est parfait !) Et c’est tellement prévisible !!! Mais revenons au livre ! L’écriture est simple, normal, sans qualité particulière ; en revanche, j’ai trouvé beaucoup de fautes comme « l’arrête du nez » ou « la chemise et mouillée » … On sent aussi la traduction quand on lit, ce que je trouve dommage. Quant à l’histoire, on retrouve les pendants de la YA dystopique : une guerre a décimé la planète, l’héroïne est contre le système instauré dans sa ville et va prendre les choses en main pour que tout change. Ce qui change, c’est l’origine de la ville, les histoires de famille qui se greffent à l’intrigue ; dans une scène, Bishop montre un exemplaire de Roméo et Juliette à Ivy, comme si leur histoire leur ressemblait. J’ai donc eu l’impression d’un mélange entre Divergente, La Sélection et Roméo et Juliette, ce qui, au final, donne un livre original, même si c’est du déjà vu ailleurs. L’embrigadement dont l’héroïne est l’objet est très énervant !! Elle est tellement convaincue que sa famille dit vrai. Evidemment, on ne peut pas lui en vouloir, elle a été élevée comme ça. Problème : elle répète beaucoup qu’elle est manipulée, qu’elle doit manipuler et qu’elle n’est pas capable de le faire.

Ivy est donc parfois un peu agaçante, mais le lecteur s’y attache vite et partage une partie de ses idées. Le système des mariages arrangés est effectivement aberrant, mais pas seulement pour les filles, pour l’amour en général. Complètement sous l’emprise de sa famille, elle apprend à devenir un être pensant à part entière, ce qui est assez agréable, mais qui, encore une fois, ressemble aux autres YA. Elle se cesse de répéter qu’elle n’est pas capable de faire ce pour quoi elle a été choisie, mais elle est incapable aussi de renoncer. Intelligente, elle parvient à faire ce qu’elle veut, donc elle pourrait faire plus ! Son sacrifice m’a énervé même si j’aurais peut-être agi de la même façon. Bishop, comme je le disais, est le personnage masculin parfait. Il est donc très facile de s’attacher à lui. Il semble n’avoir aucun côté sombre (ou peut-être un tout petit) ; aucun mystère donc, ce qui est peut-être un peu dommage. L’homme parfait aussi par rapport à nos normes actuelles. J’ai détesté le personnage de Callie : comment peut-on faire ce genre de choses à sa propre sœur ? Soit elle ne réfléchit absolument pas, soit elle a une telle soif de pouvoir qu’elle se fiche du moyen par lequel elle arrivera à ses fins. Cette fille m’a donné des frissons tant elle est affreuse au fond. Le père d’Ivy n’est pas beaucoup mieux : obnubilé par le pouvoir, il est prêt à risquer la vie de sa fille pour récupérer la ville. Il les a tellement manipulé qu’elles ne sont pas capables de penser pour elles-mêmes. Enfin, les parents de Bishop, Mr et Mme Lattimer. Le premier semble plutôt sympathique, malgré toutes les horreurs qu’il aurait commises, et le gouvernement qu’il a instauré ; elle, en revanche, fait froid dans le dos par son côté glacial, son absence d’affection pour qui que ce soit. On dirait une mère lionne mais sans aucune chaleur envers ses petits. Personnages secondaires : Dylan et Meredith, insupportables dans leur genre.

La fin est prévisible elle aussi, et je me demande comment Ivy a pu ne pas y penser ! Elle est aussi efficace, puisqu’elle donne envie de lire la suite !! Mais, elle n’est pas très cohérente : Ivy se rend compte du danger, et l’oublie au chapitre suivant …

 

Donc, un bon roman YA, mais un peu comme les autres, prévisible.

Micromégas de Voltaire

Posté : 20 septembre, 2016 @ 10:12 dans Avis littéraires, Coup de cœur | Pas de commentaires »

Micromégas Genre : Philosophie

Editeur : Folioplus classiques

Année de sortie : 2009

Nombre de pages : 37

Synopsis : Dans Folioplus classiques, le texte intégral, enrichi d’une lecture d’image, écho pictural de l’œuvre, est suivi de sa mise en perspective organisée en six points : Mouvement littéraire : Voltaire et les Lumières ; Genre et registre : Le conte philosophique et les armes du comique ; L’écrivain à sa table de travail : Elements pour une histoire de la publication de Micromégas ; Groupement de textes : Voyages et estrangement ; Chronologie : Voltaire et son temps ; Fiche : Des pistes pour rendre compte de sa lecture.

 

Avis : J’ai choisi ce livre par qu’il était petit, que je ne mettrais pas trop de temps à lire, et qu’un ami m’en avait parlé en me disant qu’il était très bon.

Mais quelle intelligence !! Voltaire nous offre ici une petite leçon d’humilité, tout en nous faisant rire ! En effet, à travers l’histoire du géant Micromégas, le philosophe nous fait comprendre notre orgueil et la limite à laquelle nous nous heurterons toujours en ce qui concerne la connaissance. On ne peut pas tout savoir, et même si l’on possédait plus de sens, si l’on pouvait percer dans plus de domaines de la science, il y aurait toujours un angle mort, un coin aveugle que l’on ne pourrait pas connaître. De plus, les mentions de la brièveté de la vie sont aussi très intéressantes : même si l’on vivait mille ans, cela ne nous suffirait pas ni pour tout connaître, ni pour être satisfait. J’ai adoré le passage de la fin où l’habitant de Saturne s’extasie sur la connaissance extérieure qu’ont les terriens ; quand il leur parle de la connaissance de l’âme, ils sont incapables d’être d’accord, incapables de donner une réponse correcte. En effet, on connaît mieux ce qui extérieur à nous ! Quel comble quand on le lit dans la bouche d’un extraterrestre ! J’ai également adoré la façon qu’a Voltaire de rabattre le caquet des autorités de l’époque en mentionnant la censure et autres bêtises en parlant d’un auteur qui n’existe pas, Micromégas. Je ne pensais pas trouver ce texte drôle, et finalement c’était bien le cas !

 

Donc, une excellente surprise, un texte qui nous fait réfléchir, et qui m’a fait rire quand je ne m’y attendais pas !

Le Grand Meaulnes d’Alain-Fournier

Posté : 20 septembre, 2016 @ 10:04 dans Avis littéraires | 2 commentaires »

Le Grand Meaulnes Genre : Classique

Editeur : Le Livre de Poche

Année de sortie : 1977

Nombre de pages : 315

Synopsis : Aucun pour cette édition.

 

Avis : Je n’avais pas l’intention de lire ce livre maintenant, mais un de mes cours (et une de mes amies) m’a poussé à le faire, alors je me suis lancée !

Je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre avec ce livre, mais j’avais un mauvais a priori. Peut-être le titre qui ne m’inspirait pas beaucoup, ou le fait que j’ai dû traduire une partie en thème anglais ! J’ai eu un peu de mal au tout début : il faut que je me fasse au nouvel environnement proposé, ici, des scènes d’école de campagne, mais surtout à la relation qui s’établit entre tous ces garçons (eh oui, pas d’école mixte à l’époque !). Je me suis installée doucement, l’atmosphère m’y a aidé, notamment les différentes saisons à la campagne, qui m’ont emportée peu à peu à Sainte-Agathe. Je frissonnais avec le narrateur pendant les scènes d’hiver. Ce qui m’a vraiment transportée dans l’histoire, c’est évidemment ce qui arrive à Meaulnes, l’événement déclencheur. A partir de là, je peux vraiment dire que j’ai apprécié ma lecture pleinement : le décor a changé, il devient enchanteur. Cet événement, et la façon dont il est considéré par la suite, m’a un peu fait penser à Peter Pan. L’amour est présent à partir de ce moment, mais c’est un amour particulier ; j’ai eu l’impression d’un mélange entre rêve / conte de fées et tragédie. Le premier aspect est développé dans tout le livre, et on se rend peu à peu compte du second qu’en avançant. Cela pousse le lecteur à poursuivre la lecture rapidement, à découvrir si la quête va aboutir, à savoir si le destin réunira ceux qui semblent devoir l’être ; ici, j’ai pensé à Ruy Blas ! Le roman est aussi fait de choix difficiles, d’ultimatum : la question de l’honneur lié à la promesse est soulevée, l’est aussi celle de la conscience. Un des personnages peut-il vivre heureux quand il sait qu’il fait le malheur d’un autre ? Quant à l’écriture, elle est agréable, parfois poétique, ce qui ajoute encore au plaisir de lire. Petit exemple : « demeure d’où partirent et où revinrent se briser, comme des vagues sur un rocher désert, nos aventures ». Cette aventure peut d’abord paraître dérisoire, mais elle va guider toute la vie des personnages !

Le narrateur, François Seurel, est très attachant, mais aussi, malgré son rôle, très effacé par rapport à son ami. En effet, certes, c’est lui qui raconte l’histoire, mais celle-ci concerne principalement Meaulnes. François est spectateur, ce n’est pas son aventure ; en somme, il n’est pas le héros du roman. Et pourtant, il est possible au lecteur de s’attacher à lui ; en effet, celui qui lit est lui aussi spectateur, il peut donc facilement s’identifier à François. Jamais ce personnage ne m’a agacé, je l’ai trouvé très sympathique, et il m’a fait mal le cœur (voire l’a carrément mis en pièces) à la fin du roman. Quant à Meaulnes, je me suis moins attaché à lui. Héros de l’histoire, il se comporte comme tel : le lecteur est donc peut-être plus détaché de lui. Ses actes, avant la fin, sont incompréhensibles, même pour le narrateur (le lecteur ne sait ce qui arrive qu’à travers lui), cela peut agacer le lecteur, qui ne comprend pas ses réactions. Evidemment, elles cachent quelque chose, un secret qui sera révélé à la fin. Apparaissent d’autres personnages, comme Yvonne de Galais, fée, châtelaine, la jeune fille la plus belle qu’il ait été donné de voir au narrateur. Et, comme lui, elle m’a fait mal au cœur. Courageuse, mais sensible, fragile, elle espère et laisse faire le destin sans lutter ; Jasmin Delouche, personnage ambivalent, difficile à aimer, mais qu’on ne déteste pas non plus ; Frantz de Galais, personnage que j’ai eu du mal à supporter, même s’il m’a aussi fait mal au cœur. Petit prince de sa famille, il est extrême et semble se ficher complètement du mal qu’il peut faire autour de lui ; Valentine, Parisienne abandonnée, qui ne cesse de se rappeler son passé avec amertume, même si elle veut en même temps reconstruire sa vie ; M. et Mme Seurel, parents de François, instituteur et mère au foyer, sympathiques et attachants, même si assez effacés par rapport à l’aventure.

La fin est dévastatrice, à partir d’un événement particulier jusqu’à la toute dernière phrase, qui laisse entendre les conséquences de toute l’histoire pour le narrateur.

 

Donc, un très bon livre, entre conte et tragédie, dont la fin brise le cœur du lecteur.

Dracula de Bram Stoker

Posté : 19 septembre, 2016 @ 6:44 dans Avis littéraires, Coup de cœur | 2 commentaires »

Genre : Dracula Fantastique, Classique

Editeur : Penguin English Library

Année de sortie : 2012

Nombre de pages : 440

Synopsis : A chilling masterpiece of the horror genre, Dracula illuminates the dark corners of Victorian sexuality. When Jonathan Harker visits Transylvania to advise Count Dracula on a London home, he makes a horrifying discovery. Soon afterwards, a number of disturbing incidents unfold in England: an unmanned ship is wrecked in Whitby; strange puncture marks appear on a young woman’s neck; and the inmate of a lunatic asylum raves about the arrival of his ‘Master’, while a determined group of adversaries prepares to face the terrifying Count.

 

Avis : Comme je veux faire mon mémoire en rapport avec la littérature gothique, quoi de mieux qu’une relecture de Dracula ?

Eh bien, rien ! Cette deuxième lecture a été encore meilleure que la première !! Même en connaissant l’histoire, même en sachant ce qui va arriver, les frissons et les émotions sont les mêmes !! Je me souviens qu’à la première lecture, j’avais trouvé le début du roman (le voyage de Jonathan Harker en Transylvanie) assez long ; cette fois, ce n’était absolument pas le cas ! Aucune longueur, juste une envie de continuer à lire, de comprendre, mieux que la première fois, tous les ressorts qui font que Dracula est un excellent roman ! L’auteur est capable d’instiller une peur diffuse, une angoisse grandissante chez son lecteur, envahi par l’atmosphère gothique du livre. Entre le Londres des années 1880, Whitby et ses escapades nocturnes, ses rideaux diaphanes, comme des voiles blancs, et la Transylvanie, avec un château en ruines qui donnent des frissons rien qu’à la lecture de sa description, l’ambiance du roman est sombre, parfois même lugubre – y participent brume, brouillard, naufrage, loups et chauve-souris entre autres. Evidemment, certaines scènes sont sanglantes, mais les boucheries nous sont épargnées : le genre est fantastique, épouvante, horreur, mais reste décent. J’ai aussi relu Dracula pour tenter de lier des œuvres ensemble, donc je me suis accrochée à deux thèmes principaux : la folie et la métamorphose, liées et très présentes ici. La figure du vampire est très loin de toutes ses réécritures et adaptations diverses de nos jours : le vampire est un monstre assoiffé de sang, qui tente de répandre son espèce sur Terre, que tout ce qui est sacré effraye, et qui ressent tout de même des émotions. J’ai aimé les explications – assez paradoxales d’ailleurs – de Van Helsing sur la différence entre l’intelligence du vampire et celle des hommes. J’ai aimé aussi l’espèce de postface de John Sutherland à propos de la raison pour laquelle Dracula vient en Angleterre. Autre chose : le format, que je trouve très agréable. J’aime beaucoup les livres écrits sous forme de journaux ou de lettres ; ici, j’étais donc comblée !! Ce format force l’auteur à adopter des écritures différentes pour chaque personnage, ce qu’il est parvenu à faire ! Van Helsing ne parle pas comme Mina, celle ne s’exprime pas comme Jonathan, qui lui, ne parle comme le Dr. Seward. Cette polyphonie est, pour moi, une des forces du roman : elle permet de s’attacher à tous les personnages, de les découvrir tous à la fois, sans narrateur omniscient qui nous permet de savoir à l’avance ce que tous pensent. Maintenant que j’y réfléchis, je regrette de ne pas avoir eu de journal chez Quincy Morris ou Arthur Holmwood, même si ceux-ci écrivent des lettres, et que le lecteur apprend à les connaître à travers les autres personnages. La qualité de l’écriture est excellente, comme l’histoire, ce qui ne peut que faire de Dracula un coup de cœur ! Petit plus : j’aime les éditions Penguin English Library, et leurs couvertures !! Ici, une fleur pour un roman vampirique d’exception !

Concernant les personnages, Jonathan Harker est le premier à venir sur le devant de la scène, nimbé d’innocence et d’ignorance. On le sent enthousiaste à l’idée de son voyage, et confiant dans la réussite de sa transaction avec le comte Dracula, comte dont il n’imagine même pas la véritable nature. Au fil de son voyage, l’angoisse s’installe en lui, il se rend compte que les habitants des Carpathes le prennent en pitié, ont peur pour lui, sans qu’il comprenne pourquoi. Ce personnage évolue au fil du livre : d’abord, comme je le disais, enthousiaste et plein d’espoir, ce qui lui arrive l’endurcit, et le change même physiquement. Les épreuves qu’il traverse auraient pu le rendre fou, il aurait pu craquer ; la force de ce personnage est impressionnante, même si elle lui vient sans doute du désespoir plus que de l’espoir ! Et tout cela grâce à l’étoile de sa vie, Mina, elle aussi innocente et pure au début du roman. Courageuse, elle fait tout pour aider, même si les hommes la surprotègent énormément – cela confine parfois au sexisme, même si Mina se réclame des New Women. Intelligente et mature, elle réfléchit vite et trouve facilement la solution aux problèmes qui se posent – elle a un « cerveau d’homme » pour les autres personnages, haha ! Je me suis beaucoup attachée à Mina, même si elle est trop infantilisée à mon goût. Elle représente la pureté, et incarne la bravoure même des hommes qui combattent pour sa sécurité. En cela, elle n’est pas très différente de Lucy Westenra, jeune fille elle aussi pure et innocente, même si vraisemblablement plus bavarde et enjouée que son amie. Amoureuse d’un des hommes de la « bande » – à défaut d’un meilleur terme -, elle ne cesse de parler de lui et de sa vie future, jusqu’à un événement qui va bouleverser sa vie et celle de toutes les personnes qui l’entourent. Elle est, elle aussi, très attachante, et ce qui lui arrive fait froid dans le dos. Elle incarne la pureté, mais souillée par le mal ultime, menacée de la perte de son âme, incapable de trouver le repos. J’ai eu mal au cœur pour elle, et je n’ai pas trouvé trace de l’agacement qu’elle m’avait causé à ma première lecture ; j’ai eu plutôt l’impression d’une créature faible, à protéger de toute urgence. Elle l’est notamment par Arthur Holmwood, un de ses prétendants. J’ai trouvé ce personnage plus effacé que les autres dans la mesure où, comme je l’ai dit plus haut, il ne tient pas de journal. Ainsi, il n’est possible de le découvrir qu’à travers les yeux des autres : courageux, brave, capable de mettre sa vie, et sa réputation de lord en danger pour ses proches, une espèce de preux chevalier qui, je me souviens encore, m’avait lui aussi agacé à la première lecture, sans doute parce que je lui préfère le Dr. Seward. J’aime beaucoup ce personnage : solitaire, il est éperdument amoureux de Lucy, qui le rejette – sans doute aussi la raison pour laquelle elle m’a agacé la première fois, la pauvre ! Il se réfugie alors dans son travail, à l’asile, auprès d’un dénommé Renfield, dont je parlerai plus bas. Ces entrées sont orales et écrites, et on le découvre véritablement à travers elles : il est presque dommage de ne pas pouvoir entendre sa voix ! Ce qu’il ressent, sa détresse, m’a touchée, Seward m’a vraiment émue, j’avais envie de le consoler. Il est le sujet d’une branche de l’intrigue principale qui va peu à peu rejoindre celle-ci : en effet, ce que raconte Seward n’a d’abord pas l’air en rapport avec le comte Dracula et les vampires. Mais les pièces du puzzle se rassemblent, et on comprend le génie de l’auteur. Seward est ainsi une pièce maîtresse, ainsi que ses proches, à commencer par son patient Renfield. Fou obsédé par l’ingestion de vies, il m’a d’abord vraiment dégoûté. Son rapport aux insectes et aux animaux donne véritablement envie de vomir. Mais son lien avec l’intrigue principale est réel, et se fait jour peu à peu. Finalement, Renfield, lui aussi, m’a ému, notamment dans la dernière scène dans laquelle il apparaît, où son action est véritablement belle et désintéressée. Puis, l’ami de Seward, Van Helsing, joue, évidemment un rôle prépondérant ! Lui aussi m’a paru très attachant, même si peut-être un peu frustrant dans sa façon de ne rien révéler ni aux personnages, ni au lecteur à propos de l’étrange maladie qui sévit chez une jeune fille. Ces répliques sont parfois difficiles à lire, étant donné qu’il ne parle pas l’anglais parfaitement – chapeau à Stoker pour sa façon de s’adapter au personnage qui parle ! – et il est celui qui va donner toutes les explications, dût-il avoir recours à la philosophie, ou à des théories scientifiques de l’époque. Il a peut-être l’air d’un vieux savant fou, mais il est réellement touchant parfois, surtout dans son attachement pour les autres personnages. Enfin, le dernier ami de Seward, qui est aussi celui d’Arthur, est Quincey Morris, lui aussi plus effacé car sans journal. A travers la description des autres, on comprend qu’il est taciturne mais volontaire, prêt à tout pour sauver ceux qu’il aime, capable de manier les armes aisément, et notamment le Winchester – eh oui, c’est lui qui l’introduit comme arme dans l’arsenal du groupe ! Enfin, le personnage éponyme : Dracula. Comme je le disais, il est présenté comme un monstre qui veut répandre son engeance sur la Terre, et d’abord, en Angleterre. Démon polymorphe, fils de Satan dans les légendes, il semble assoiffé de sang et capable de tout pour arriver à ses fins ! Sa sauvagerie n’a d’égale que sa cruauté : il est entouré de loups, et cherche à rendre la vie de certain personnages impossible, soit en les menaçant physiquement, soit en leur volant ce qu’ils ont de plus précieux. Pourtant, le portrait qui est fait de lui est assez ambivalent. En effet, même si Dracula est un vampire, il sait se comporter en noble, tout ce qu’il y a de plus correct, notamment quand il accueille Jonathan dans son château – une belle image du mal qui se cache derrière de belles apparences. Aussi, la vision qu’a Mina de Dracula fait complètement changer notre perspective du personnage – ainsi que la perspective des autres, qui le voit alors différemment. J’ai aimé la mention de l’expression du visage du comte à la fin. Derniers personnages à mentionner : les trois vampires, représentation de la séduction du mal et de la faiblesse des hommes.

Evidemment, la place de la religion et de la superstition dans ce roman est immense. Tout ce qui peut contrer un vampire est sacré : l’hostie, le crucifix, ou traditionnel : l’ail, le pieux dans le cœur. Le nom de Dieu - ainsi que celui du Christ - est mentionné de nombreuses fois, les personnages prient, en appellent à lui, implorent sa pitié, et veulent rendre l’âme des vampires au Seigneur. Il faut, évidemment, se replacer dans le contexte : aujourd’hui, la religion n’a plus une si grande place, donc il est possible que certains lecteurs soient rebutés par cet aspect de l’histoire, ou le laissent complètement de côté. Ces références ne m’ont pas du tout dérangé.

La fin est « évidente » (qui ne connaît pas cette fin ?) Je ne me souvenais pas qu’elle était si abrupte et rapide, ce qui est, finalement, un peu dommage : est-ce qu’un combat épique n’aurait pas merveilleusement clos ce livre ? On découvre l’identité de celui qui a écrit le premier l’espèce de préface qui explique au lecteur l’ordre des textes, une sorte de narrateur effacé qui nous aurait fait parvenir le dossier complet de l’affaire.

 

Donc, un chef d’œuvre, fait d’actions, d’horreur, de beauté aussi, portée par une polyphonie qui change des romans habituels, et une écriture excellente qu’il est agréable de lire.  

A la recherche du temps perdu, tome 5 : La Prisonnière de Marcel Proust

Posté : 14 septembre, 2016 @ 2:37 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Genre : Classiquela-prisonnière

Editeur : Le Livre de Poche

Année de sortie : 2016

Nombre de pages : 551

Synopsis : Albertine a renoncé à faire une croisière et lorsque, à la fin de l’été, elle rentre de Balbec avec le narrateur, elle s’installe chez lui, à Paris. Il ne se sent plus amoureux d’elle, elle n’a plus rien à lui apprendre, elle lui semble chaque jour moins jolie, mais la possibilité d’un mariage reste ouverte, et, en lui rendant la vie agréable, peut-être songe-t-il à éveiller en elle le désir de l’épouser. Il se préoccupe en tout cas de son emploi du temps, l’interroge sur ses sorties sans pouvoir bien percer si sa réponse est un mensonge, et le désir que visiblement elle suscite chez les autres fait poindre les souffrances en lui. Paru en 1923, La Prisonnière est le premier des trois volumes publiés après la mort de Proust et, quoique solidaire de Sodome et Gomorrhe qui le précède comme d’Albertine disparue qui le suit, une certaine unité lui est propre. Pour l’essentiel, trois journées simplement se déroulent ici – le plus souvent dans l’espace clos de l’appartement -, et ce sont comme les trois actes d’un théâtre où la jalousie occupe toute la place.

 

Avis : Toujours dans mon petit (haha) challenge A la recherche du temps perdu ; vous avez dû remarquer, je lis d’autres petits livres entre deux, pour ne pas être dégoûtée (on ne sait jamais, je ne veux pas prendre le risque !)

On retrouve évidemment l’écriture merveilleuse de Proust, toujours aussi poétique, toujours aussi agréable à lire, peut-être un peu plus brouillonne que pour les autres tomes, mais je ne m’en suis rendue compte que grâce (ou à cause) de certaines notes qui signalent que l’auteur avait ajouté quelque chose, barré autre chose, qu’un passage ne devait pas être là mais a finalement été ajouté ce qui fait que la cohérence du texte n’est plus tout à fait exacte, et on se retrouve avec des « Elle continua » alors que personne ne parlait dans le paragraphe précédent. Mais cela ne gâche absolument pas la lecture, rassurez-vous ! Aussi, contrairement à Sodome et Gomorrhe, cette fois, pas de chapitres, le lecteur est plongé dans le livre sans interruption, sans espaces, avec des paragraphes, encore une fois, qui peuvent être très longs, des phrases qui peuvent l’être aussi, mais, finalement, ce n’est pas la majorité : Proust utilise aussi le dialogue, se laisse entraîner par des réflexions qui émaillent le récit, l’enrichissent, le rendent plus proche du lecteur en quelque sorte, puisque celui-ci se sent impliqué (d’autant plus que le narrateur joue à nouveau avec lui, ce que j’adore !) Ces réflexions sont surtout dirigées ici vers l’amour et la jalousie, comme le lecteur pouvait déjà le deviner en sortant de Sodome et Gomorrhe. L’amour qui concerne Albertine, mais aussi d’autres personnages, que le héros voudrait doux, et qui se révèle douloureux, justement à cause de la jalousie, cristallisée autour de la jeune fille et de son passé, si obscur pour le protagoniste qu’il en veut à Albertine pour à peu près tout, et notamment pour les mensonges qu’il pense qu’elle ne cesse de lui servir au lieu de la vérité. Au fil de la lecture, le lecteur comprend peu à peu qu’il n’a pas tort, qu’elle lui ment effectivement ; mais le personnage principal rend si prisonnière la jeune fille, pourtant si espiègle à Balbec, que cela fait presque mal de lire. En tout cas, j’ai été agacée par cette jalousie maladive, cette possessivité qui empêche Albertine de vivre, la rend captive d’une vie cloisonnée, sans les divertissements qu’elle voudrait, sans des sorties seules, dans les promenades agréables entre amies, sans la possibilité d’être libre. La surveillance permanente qu’exerce le héros sur la jeune fille devient pesante, même pour le lecteur. C’est de la paranoïa, mais aussi du sadisme envers lui-même : il s’imagine tout un tas de choses pour lesquelles il n’a aucune preuve, rapporte la situation d’Albertine à la situation d’autres femmes qui n’ont rien à voir, est incapable de lui faire confiance : ce n’est pas de l’amour, c’est de la séquestration. Et le fait qu’il répète sans cesse qu’il ne l’aime pas … C’est la raison pour laquelle ce tome n’a pas été un coup de cœur : je n’ai pas pu me détacher de ce sentiment d’agacement à chaque fois que le personnage parle de son amour / non-amour et de ce qu’il fait pour surveiller Albertine.

Dans le synopsis, il est dit que l’action se déroule sur trois jours. J’ai eu du mal à les discerner nettement, tout est brouillé par les réflexions ajoutées à ces journées. Encore une fois, cela ne gâche pas la lecture : je me fiche un peu de savoir quel jour nous sommes quand je lis la soirée des Verdurin par exemple. Celle-ci est une scène de salon particulière : une fête est organisée par un invité, M. de Charlus, chez les Verdurin : ils n’ont pas voix au chapitre. Celle-ci montre encore l’hypocrisie de l’aristocratie et de la haute bourgeoisie. Ce qui arrive à M. de Charlus à l’issue de cette soirée m’a vraiment fait de la peine, même si cela avait déjà été annoncé dans le tome précédent. Je trouve ce personnage fascinant : il évolue au fil des tomes, il change, et, malgré son air violent, j’éprouve une sympathie particulière pour lui. Il est aussi l’occasion de continuer de parler d’homosexualité, ce thème se cristallisant aussi autour d’Albertine. Mme Verdurin est particulièrement énervante dans cette scène, tellement que je n’ai pas réussi à éprouver un petit pincement au cœur pour ce qui lui arrive. La mort est traitée de façon si légère dans son cercle ! Et sa façon de considérer les gens, ses préjugés, ses jugements portés à la va-vite …

Ainsi, comme je l’ai dit plus haut, le personnage principal m’a agacé par sa jalousie et sa possessivité, mais aussi par le fait qu’il retient Albertine pour mieux la quitter lui-même. C’est si machiste dans un sens. Personne ne peut profiter d’Albertine si lui n’en profite pas, et elle ne peut pas avoir eu de vie avant lui. Quelques comparaisons mythologiques se font encore, mais la désillusion sur les salons, sur la sphère mondaine est consommée. La duchesse de Guermantes, si adulée, n’apparaît pratiquement plus, ou uniquement quand le personnage a besoin d’elle. Aussi, en voulant emprisonner Albertine, le personnage se rend lui-même esclave d’un amour qu’il ne ressent pas vraiment, plutôt d’une souffrance proche de l’agonie. Le narrateur est agréable et parsème le texte d’allusions futures (bien explicitées par l’éditeur, oh merci pour ces merveilleux spoilers !) ainsi que de phrases destinées au lecteur ! Albertine, que je n’apprécie pas énormément, m’a fait de la peine dans ce livre. Le titre du tome lui convient parfaitement : elle est prisonnière, esclave du personnage principal qui fait ce qu’il veut d’elle. Elle n’a pas l’air d’être très sujette aux sautes d’humeur ou aux colères. Finalement, le lecteur peut comprendre qu’elle mente : comment vivre avec quelqu’un qui ne vous fait pas confiance, qui fait tout pour contrecarrer ce que vous aviez pu prévoir juste parce qu’il a peur que vous rencontriez quelqu’un en lien avec votre passé ? J’avais parfois envie qu’elle se rebelle, mais elle semble rester soumise et docile. Françoise est toujours présente, et toujours aussi hostile à la jeune fille. La mère du personnage principal est également mentionnée, à travers ses lettres à son fils, qui ressemblent à celles de sa grand-mère jadis. Morel est un des personnages les plus exécrables du livre !

La fin est rapide, abrupte, et donne envie de commencer la suite immédiatement !! L’éditeur explique, de plus, qu’il n’y a pas de transition entre La Prisonnière et Albertine disparue, le tome suivant reprend exactement là où celui-ci s’arrête !

 

Donc, un très bon tome, que j’ai moins apprécié par rapport aux autres en raison de la jalousie très pesante du personnage, mais qui n’enlève rien à la qualité d’écriture et aux réflexions de Proust.

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