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I found myself in Wonderland.

Dracula de Bram Stoker

Classé dans : Avis littéraires,Coup de cœur — 19 septembre 2016 @ 18 h 44 min

Genre : Dracula Fantastique, Classique

Editeur : Penguin English Library

Année de sortie : 2012

Nombre de pages : 440

Synopsis : A chilling masterpiece of the horror genre, Dracula illuminates the dark corners of Victorian sexuality. When Jonathan Harker visits Transylvania to advise Count Dracula on a London home, he makes a horrifying discovery. Soon afterwards, a number of disturbing incidents unfold in England: an unmanned ship is wrecked in Whitby; strange puncture marks appear on a young woman’s neck; and the inmate of a lunatic asylum raves about the arrival of his ‘Master’, while a determined group of adversaries prepares to face the terrifying Count.

 

Avis : Comme je veux faire mon mémoire en rapport avec la littérature gothique, quoi de mieux qu’une relecture de Dracula ?

Eh bien, rien ! Cette deuxième lecture a été encore meilleure que la première !! Même en connaissant l’histoire, même en sachant ce qui va arriver, les frissons et les émotions sont les mêmes !! Je me souviens qu’à la première lecture, j’avais trouvé le début du roman (le voyage de Jonathan Harker en Transylvanie) assez long ; cette fois, ce n’était absolument pas le cas ! Aucune longueur, juste une envie de continuer à lire, de comprendre, mieux que la première fois, tous les ressorts qui font que Dracula est un excellent roman ! L’auteur est capable d’instiller une peur diffuse, une angoisse grandissante chez son lecteur, envahi par l’atmosphère gothique du livre. Entre le Londres des années 1880, Whitby et ses escapades nocturnes, ses rideaux diaphanes, comme des voiles blancs, et la Transylvanie, avec un château en ruines qui donnent des frissons rien qu’à la lecture de sa description, l’ambiance du roman est sombre, parfois même lugubre – y participent brume, brouillard, naufrage, loups et chauve-souris entre autres. Evidemment, certaines scènes sont sanglantes, mais les boucheries nous sont épargnées : le genre est fantastique, épouvante, horreur, mais reste décent. J’ai aussi relu Dracula pour tenter de lier des œuvres ensemble, donc je me suis accrochée à deux thèmes principaux : la folie et la métamorphose, liées et très présentes ici. La figure du vampire est très loin de toutes ses réécritures et adaptations diverses de nos jours : le vampire est un monstre assoiffé de sang, qui tente de répandre son espèce sur Terre, que tout ce qui est sacré effraye, et qui ressent tout de même des émotions. J’ai aimé les explications – assez paradoxales d’ailleurs – de Van Helsing sur la différence entre l’intelligence du vampire et celle des hommes. J’ai aimé aussi l’espèce de postface de John Sutherland à propos de la raison pour laquelle Dracula vient en Angleterre. Autre chose : le format, que je trouve très agréable. J’aime beaucoup les livres écrits sous forme de journaux ou de lettres ; ici, j’étais donc comblée !! Ce format force l’auteur à adopter des écritures différentes pour chaque personnage, ce qu’il est parvenu à faire ! Van Helsing ne parle pas comme Mina, celle ne s’exprime pas comme Jonathan, qui lui, ne parle comme le Dr. Seward. Cette polyphonie est, pour moi, une des forces du roman : elle permet de s’attacher à tous les personnages, de les découvrir tous à la fois, sans narrateur omniscient qui nous permet de savoir à l’avance ce que tous pensent. Maintenant que j’y réfléchis, je regrette de ne pas avoir eu de journal chez Quincy Morris ou Arthur Holmwood, même si ceux-ci écrivent des lettres, et que le lecteur apprend à les connaître à travers les autres personnages. La qualité de l’écriture est excellente, comme l’histoire, ce qui ne peut que faire de Dracula un coup de cœur ! Petit plus : j’aime les éditions Penguin English Library, et leurs couvertures !! Ici, une fleur pour un roman vampirique d’exception !

Concernant les personnages, Jonathan Harker est le premier à venir sur le devant de la scène, nimbé d’innocence et d’ignorance. On le sent enthousiaste à l’idée de son voyage, et confiant dans la réussite de sa transaction avec le comte Dracula, comte dont il n’imagine même pas la véritable nature. Au fil de son voyage, l’angoisse s’installe en lui, il se rend compte que les habitants des Carpathes le prennent en pitié, ont peur pour lui, sans qu’il comprenne pourquoi. Ce personnage évolue au fil du livre : d’abord, comme je le disais, enthousiaste et plein d’espoir, ce qui lui arrive l’endurcit, et le change même physiquement. Les épreuves qu’il traverse auraient pu le rendre fou, il aurait pu craquer ; la force de ce personnage est impressionnante, même si elle lui vient sans doute du désespoir plus que de l’espoir ! Et tout cela grâce à l’étoile de sa vie, Mina, elle aussi innocente et pure au début du roman. Courageuse, elle fait tout pour aider, même si les hommes la surprotègent énormément – cela confine parfois au sexisme, même si Mina se réclame des New Women. Intelligente et mature, elle réfléchit vite et trouve facilement la solution aux problèmes qui se posent – elle a un « cerveau d’homme » pour les autres personnages, haha ! Je me suis beaucoup attachée à Mina, même si elle est trop infantilisée à mon goût. Elle représente la pureté, et incarne la bravoure même des hommes qui combattent pour sa sécurité. En cela, elle n’est pas très différente de Lucy Westenra, jeune fille elle aussi pure et innocente, même si vraisemblablement plus bavarde et enjouée que son amie. Amoureuse d’un des hommes de la « bande » – à défaut d’un meilleur terme -, elle ne cesse de parler de lui et de sa vie future, jusqu’à un événement qui va bouleverser sa vie et celle de toutes les personnes qui l’entourent. Elle est, elle aussi, très attachante, et ce qui lui arrive fait froid dans le dos. Elle incarne la pureté, mais souillée par le mal ultime, menacée de la perte de son âme, incapable de trouver le repos. J’ai eu mal au cœur pour elle, et je n’ai pas trouvé trace de l’agacement qu’elle m’avait causé à ma première lecture ; j’ai eu plutôt l’impression d’une créature faible, à protéger de toute urgence. Elle l’est notamment par Arthur Holmwood, un de ses prétendants. J’ai trouvé ce personnage plus effacé que les autres dans la mesure où, comme je l’ai dit plus haut, il ne tient pas de journal. Ainsi, il n’est possible de le découvrir qu’à travers les yeux des autres : courageux, brave, capable de mettre sa vie, et sa réputation de lord en danger pour ses proches, une espèce de preux chevalier qui, je me souviens encore, m’avait lui aussi agacé à la première lecture, sans doute parce que je lui préfère le Dr. Seward. J’aime beaucoup ce personnage : solitaire, il est éperdument amoureux de Lucy, qui le rejette – sans doute aussi la raison pour laquelle elle m’a agacé la première fois, la pauvre ! Il se réfugie alors dans son travail, à l’asile, auprès d’un dénommé Renfield, dont je parlerai plus bas. Ces entrées sont orales et écrites, et on le découvre véritablement à travers elles : il est presque dommage de ne pas pouvoir entendre sa voix ! Ce qu’il ressent, sa détresse, m’a touchée, Seward m’a vraiment émue, j’avais envie de le consoler. Il est le sujet d’une branche de l’intrigue principale qui va peu à peu rejoindre celle-ci : en effet, ce que raconte Seward n’a d’abord pas l’air en rapport avec le comte Dracula et les vampires. Mais les pièces du puzzle se rassemblent, et on comprend le génie de l’auteur. Seward est ainsi une pièce maîtresse, ainsi que ses proches, à commencer par son patient Renfield. Fou obsédé par l’ingestion de vies, il m’a d’abord vraiment dégoûté. Son rapport aux insectes et aux animaux donne véritablement envie de vomir. Mais son lien avec l’intrigue principale est réel, et se fait jour peu à peu. Finalement, Renfield, lui aussi, m’a ému, notamment dans la dernière scène dans laquelle il apparaît, où son action est véritablement belle et désintéressée. Puis, l’ami de Seward, Van Helsing, joue, évidemment un rôle prépondérant ! Lui aussi m’a paru très attachant, même si peut-être un peu frustrant dans sa façon de ne rien révéler ni aux personnages, ni au lecteur à propos de l’étrange maladie qui sévit chez une jeune fille. Ces répliques sont parfois difficiles à lire, étant donné qu’il ne parle pas l’anglais parfaitement – chapeau à Stoker pour sa façon de s’adapter au personnage qui parle ! – et il est celui qui va donner toutes les explications, dût-il avoir recours à la philosophie, ou à des théories scientifiques de l’époque. Il a peut-être l’air d’un vieux savant fou, mais il est réellement touchant parfois, surtout dans son attachement pour les autres personnages. Enfin, le dernier ami de Seward, qui est aussi celui d’Arthur, est Quincey Morris, lui aussi plus effacé car sans journal. A travers la description des autres, on comprend qu’il est taciturne mais volontaire, prêt à tout pour sauver ceux qu’il aime, capable de manier les armes aisément, et notamment le Winchester – eh oui, c’est lui qui l’introduit comme arme dans l’arsenal du groupe ! Enfin, le personnage éponyme : Dracula. Comme je le disais, il est présenté comme un monstre qui veut répandre son engeance sur la Terre, et d’abord, en Angleterre. Démon polymorphe, fils de Satan dans les légendes, il semble assoiffé de sang et capable de tout pour arriver à ses fins ! Sa sauvagerie n’a d’égale que sa cruauté : il est entouré de loups, et cherche à rendre la vie de certain personnages impossible, soit en les menaçant physiquement, soit en leur volant ce qu’ils ont de plus précieux. Pourtant, le portrait qui est fait de lui est assez ambivalent. En effet, même si Dracula est un vampire, il sait se comporter en noble, tout ce qu’il y a de plus correct, notamment quand il accueille Jonathan dans son château – une belle image du mal qui se cache derrière de belles apparences. Aussi, la vision qu’a Mina de Dracula fait complètement changer notre perspective du personnage – ainsi que la perspective des autres, qui le voit alors différemment. J’ai aimé la mention de l’expression du visage du comte à la fin. Derniers personnages à mentionner : les trois vampires, représentation de la séduction du mal et de la faiblesse des hommes.

Evidemment, la place de la religion et de la superstition dans ce roman est immense. Tout ce qui peut contrer un vampire est sacré : l’hostie, le crucifix, ou traditionnel : l’ail, le pieux dans le cœur. Le nom de Dieu - ainsi que celui du Christ - est mentionné de nombreuses fois, les personnages prient, en appellent à lui, implorent sa pitié, et veulent rendre l’âme des vampires au Seigneur. Il faut, évidemment, se replacer dans le contexte : aujourd’hui, la religion n’a plus une si grande place, donc il est possible que certains lecteurs soient rebutés par cet aspect de l’histoire, ou le laissent complètement de côté. Ces références ne m’ont pas du tout dérangé.

La fin est « évidente » (qui ne connaît pas cette fin ?) Je ne me souvenais pas qu’elle était si abrupte et rapide, ce qui est, finalement, un peu dommage : est-ce qu’un combat épique n’aurait pas merveilleusement clos ce livre ? On découvre l’identité de celui qui a écrit le premier l’espèce de préface qui explique au lecteur l’ordre des textes, une sorte de narrateur effacé qui nous aurait fait parvenir le dossier complet de l’affaire.

 

Donc, un chef d’œuvre, fait d’actions, d’horreur, de beauté aussi, portée par une polyphonie qui change des romans habituels, et une écriture excellente qu’il est agréable de lire.  

2 commentaires »

  1. Sylphideland dit :

    AAAAAAAAAAaaaaaaah tu m’as donné super envie de le lire !!!! J’arriverais à dépasser mon aversion pour les vampires, j’y arriverais !!!!! En plus je ne connais pas du tout l’histoire … promis juré ! Jamais lu le livre, et jamais vu les films, alors je ne sais strictement rien :P Je découvrirais complètement ;)

    • redbluemoon dit :

      Raaaah, je suis super contente de t’avoir donné envie de le lire !! Je suis sûre que ça peut te passer avec ce livre, il est exceptionnel !! Peut-être qu’après la lecture, tu peux regarder l’excellente adaptation de Coppola !! J’ai hâte de voir ton avis, et j’espère qu’il sera positif !

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