Redbluemoon

I found myself in Wonderland.

Archive pour juin, 2016

The Bell Jar de Sylvia Plath

Posté : 9 juin, 2016 @ 5:26 dans Avis littéraires, Coup de cœur | Pas de commentaires »

The Bell Jar Genre : Contemporaine

Editeur : Harper Collins

Année de sortie :1996 

Nombre de pages : 273

Titre en français : La cloche de détresse

Synopsis : The Bell Jar is a classic of American literature, with over two million copies sold in this country. This extraordinary work chronicles the crack-up of Esther Greenwood: brilliant, beautiful, enormously talented, successful – but slowly going under, and maybe for the last time. Step by careful step, Sylvia Plath takes us with Esther through a painful month in New-York as a contest-winning junior editor on a magazine, her increasingly strained relationship with her mother and the boy she dated in college, and eventually, devastatingly, into the madness itself. The reader is drawn into her breakdown with such intensity that her insanity becomes completely read and even rational, as probable and accessible an experience as going to the movies. Such deep penetration into the dark and harrowing corners of the psyche is rare in any novel. It points to the fact that The Bell Jar is largely autobiographical work about Plath’s own summer of 1953, when she was a guest editor at Mademoiselle and went through a breakdown. It reveals so much about the sources of Sylvia Plath’s own tragedy that its publication was considered a landmark in literature. This special twenty-fifth anniversary edition includes a new foreword by Frances McCullough, who was the Harper & Row editor for the original editor for the original edition, about the untold story of The Bell Jar‘s first American publication.

 

Avis : Ce livre m’a été prêté il y a un moment par une amie, il était temps que je m’y plonge !

Comme d’habitude, après avoir lu le synopsis il y a très longtemps, je l’avais complètement oublié. En prenant ce livre, je ne m’attendais donc pas à ce que je m’apprêtais à lire. Au début, j’ai été choquée par la ressemblance entre l’héroïne et moi : mêmes doutes, mêmes questions, même parcours. Et au fur et à mesure du livre, je me suis dit que j’avais de la chance d’avoir évolué différemment d’elle, et surtout, d’avoir rencontré la bonne personne, contrairement à elle ! Esther vit une période difficile de sa vie : elle se sent seule, elle ne sait pas ce qu’elle va devenir, et elle se demande à quoi servent toutes ses bonnes notes. Après avoir gagné un mois à New-York grâce à un concours dans un magazine, elle se rend compte qu’elle ne profite pas de la vie comme elle devrait, qu’elle ne s’amuse pas ; elle pense passer à côté de quelque chose, ce qui la déprime, et la pousse à se forcer à sortir. Mais rien ne lui permet de se sentir mieux. Cette descente aux enfers est dérangeante du début à la fin, et m’a complètement retournée. L’écriture est très bonne, poétique parfois, moderne.

Esther Greenwood est l’héroïne du roman. Excellente élève, amoureuse d’un jeune homme, puis tellement déçue par lui qu’elle finit par être complètement indifférente, elle se rend peu à peu compte qu’elle n’est pas heureuse. Persuadée de pouvoir y parvenir si elle est comme tout le monde, elle tente de faire ce qu’ils font : elle sort, tente de perdre sa virginité, boit. Elle essaie aussi de savoir ce qu’elle veut devenir une fois ses études terminées. J’ai beaucoup aimé l’image du figuier dont chaque fruit représente un choix de vie ; elle ne parvient pas à choisir et craint qu’il ne finisse par être trop tard. Il m’a semblé voir de nombreux points communs avec elle : sa difficulté à dire non, son absence de repartie, qui ne lui vient que quand il est trop tard, son amour de la littérature, son envie de devenir écrivain. Peu à peu, sa vie lui devient insupportable et la fait basculer dans la folie et l’envie de suicide. Il est facile de s’attacher à elle, le lecteur voudrait qu’elle trouve le bonheur, qu’elle se sente mieux. D’autres personnages rencontrent l’héroïne, comme Doreen, une fille un peu délurée, qui tente de « débaucher » Esther, qui sort avec elle, Betsy, une jeune fille pour qui tout semble bien aller, avec qui Esther a une relation ambivalente, Buddy Willard, un jeune homme qui croit en la science, pas du tout en la littérature, la mère de l’héroïne, dépassée par ce qui arrive à sa fille, et la société en général, qui oppresse la jeune fille, société faite de jugements, de commérages, de lâcheté et de conformisme.

A la (re)lecture du synopsis, je me suis rendue compte que l’on considérait le roman comme autobiographique : Sylvia Plath aurait vécu un été similaire en 1953. Cela m’a secouée encore un peu plus. Je n’ai pas lu The Bell Jar avec l’idée d’une autobiographie, mais bien comme un roman. Je savais que l’auteure s’était suicidée, mais je ne me suis pas doutée (alors que ç’aurait peut-être dû sembler évident) qu’elle avait dû se servir de son expérience, de ce qu’elle ressentait, pour écrire son roman. J’ai également lu que l’auteure et sa famille voulait que le livre soit publié après sa mort, et sous un nom d’emprunt. Ce ne fut pas le cas et, bien que je n’ai pas encore lu la préface de Frances McCullough, j’ai l’impression qu’elle va tenter de justifier ce choix. Je la lirai donc plus tard.

La fin laisse un espoir, mais aussi une touche obscure. J’ai eu du mal à sortir du livre, et je pense que je vais encore me souvenir longtemps de lui.

 

Donc, un roman qui touche en plein cœur en nous montrant la chute d’une jeune fille et l’écriture d’une poétesse.

Constellation d’Adrien Bosc

Posté : 7 juin, 2016 @ 5:50 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Constellation Genre : Contemporaine

Editeur : Le Livre de Poche

Année de sortie : 2015

Nombre de pages : 211

Synopsis : 27 octobre 1949. Le nouvel avion d’Air France, le Constellation, accueille trente-sept passagers. Le lendemain, il disparaît dans l’archipel des Açores. Aucun survivant. Parmi les victimes, des personnalités – Marcel Cerdan, l’amant boxeur d’Edith Piaf, Ginette Neveu, violoniste prodige -, des anonymes. A priori, tous des étrangers les uns pour les autres, que le hasard a réunis. Pourtant, en adoptant un certain point de vue, on peut découvrir des enchaînements de causes infimes, des liens inattendus, des coïncidences. Et voir ce fait divers tragique prendre des allures de destin.

 

Avis : J’avais envie de lire ce livre depuis sa sortie, il m’intriguait vraiment, et j’avais hâte de le découvrir !

J’ai été un peu déçue, sans doute parce que je ne m’attendais pas du tout à ça. Je pensais lire un roman fondé sur des faits réels, mais un véritable roman, qui imagine pleinement ce qui s’est passé ce jour-là dans l’avion, un peu comme dans Windows on the World de Frédéric Beigbeder. Mais ce n’est pas du tout le cas. L’auteur nous parle des trente-sept passagers du vol Constellation F-BAZN, nous raconte leurs derniers jours, nous montre comment le sort les a poussés vers ce vol. En réalité, le concept de destin est prépondérant : la venue des passagers est faite de coïncidences, de coups du sort, de prophéties. Tout les mène à ce jour où tout va finir. J’ai trouvé que cette idée de fatalité était peut-être un peu trop présente. Parmi eux se trouvent Marcel Cerdan et Ginette Neveu, mais aussi des anonymes que l’on prend plaisir à découvrir, car leur vie nous apprend des choses, comme celle de Kay Kamen. J’ai apprécié le fait que l’auteur ne se concentre pas seulement sur les célébrités, mais parle également des autres, ceux que l’on ne connaît pas, et que l’on n’aurait jamais connu sans ce livre, ou sans faire de recherches personnelles sur le vol. J’ai aimé les quelques touches de poésie que j’y ai trouvées.

Malheureusement, je n’ai pas ressenti d’émotions malgré le sujet, simplement de la compassion pour Edith Piaf à la lecture de ce qu’elle a ressentie après la mort de son amant, et un choc pour la réaction d’une fan obsessionnelle de Ginette Neveu. De plus, l’auteur parle de lui à travers ses recherches, s’incorpore dans son livre, comme Beigbeder dans Oona et Salinger ; c’était justement ce que je n’avais pas aimé dans ce livre ! Concernant l’écriture, elle est bonne, même si elle dérive parfois, ce que je n’ai pas apprécié. Petit plus : la couverture, que j’aime beaucoup ! Pour les personnages, je ne peux pas dire grand-chose étant donné qu’ils sont passifs ; c’est aussi sans doute la raison pour laquelle je n’ai pas vraiment aimé ce livre, une sorte d’impersonnalité, de factualité, une impression de documentaire.

La fin fait le lien entre l’auteur et l’histoire de son livre, comme si son obsession pour le crash et ses recherches pouvaient l’aider à se trouver lui-même, à comprendre son propre problème (qui commence par une constellation). L’épilogue a l’air de ne pas avoir grand-chose à voir avec le livre en général : on peut penser qu’il explique la démarche de l’auteur, et qu’il est, pour cette raison, assez à part.

 

Donc, un premier roman duquel j’attendais plus, un peu déçue, mais j’ai quand même appris certaines choses intéressantes ! Comme dirait une amie, il y a toujours quelque chose à tirer d’un livre !

The Mortal Instruments, book 1 : City of Bones de Cassandra Clare

Posté : 2 juin, 2016 @ 11:29 dans Avis littéraires, Coup de cœur | 2 commentaires »

City of Bones Genre : Fantastique, Jeunesse

Editeur : Walker Books

Année de sortie : 2015

Nombre de pages : 506

Titre en français : The Mortal Instruments, tome 1 : La coupe mortelle / La cité des ténèbres

Synopsis : Clary Fray is seeing things: vampires in Brooklyn and werewolves in Manhattan. Irresistibly drawn to the Shadowhunters, a secret cadre of warriors dedicated to ridding the world of demons, Clary encounters the dark side of New York City – and the dangers of forbidden love.

 

Avis : Cela fait un moment que ma sœur ne cesse de me dire qu’il faut que je commence cette série. C’est chose faite !

J’avais peur d’être un peu déçue : j’ai seulement vu la fin du film, donc je connaissais déjà le grand retournement de situation, j’avais donc peur que ça me gâche un peu la lecture. Je me suis trompée ! J’ai adoré découvrir le monde des Shadowhunters du début à la fin ! Tout ce que Clary pensait voir est en fait une façade, une espèce de sortilège qui cache une réalité extraordinaire, faite de créatures fantastiques, vampires, loups-garous, fées et autres. J’adore ce genre d’univers, donc celui-ci ne pouvait pas faire exception. L’histoire des Shadowhunters est très intéressante, leur origine angélique, leur devoir de protéger les humains des démons, leur amitié fragile avec les Downworlders qui dépend d’Accords menacés. Quant à l’intrigue, elle est elle aussi très intéressante : Clary ne comprend pas ce qui lui arrive, sa mère lui cache beaucoup de choses, et elle se retrouve au milieu d’un conflit dont elle ignore tout. Sa rencontre avec les Shadowhunters est brusque, effrayante, et lui fait tout remettre en question. L’atmosphère est assez gothique, les actions se passent dans des châteaux, des églises, dans des endroits plutôt sombres ; le lecteur trouve pas mal de références en latin, et parfois à la Bible, ce qui ne fait pas de ce livre un roman religieux : l’auteure se sert de certaines choses qui en sont issues, mais les détourne pour alimenter son monde fantastique. L’écriture est agréable, on sent parfois l’émergence du narrateur, qui semble donner son avis sur ce dont il parle.

Clary est l’héroïne du roman. Déboussolée par tout ce qui lui arrive, j’ai aimé son caractère : elle ne se laisse pas faire, et tente de rendre la réplique à Jace. Malgré ses moments de détresse, je ne l’ai pas trouvé agaçante ; au contraire, je me suis plutôt attachée à elle. La seule chose qui aurait pu m’énerver, c’est son aveuglement pour l’amour qu’on lui porte : c’est tellement évident ! Mais j’ai l’impression que presque toutes les héroïnes sont dans ce cas, elle ne fait donc pas exception. Elle se révolte contre tout ce qui lui tombe dessus, elle a peur du changement qui s’amorce, mais elle n’en est pas moins courageuse. Comme la plupart des autres héroïnes (et comme un peu tout le monde), elle se dévalorise beaucoup, dans tous les domaines, mais elle sait aussi être lucide et reprendre le dessus. J’ai eu un peu de mal au début (et à la fin) avec Jace. Son côté je m’en foutiste, je-suis-le-plus-fort, je-n’ai-peur-de-rien m’a agacé. Puis, j’ai fini par l’apprécier, lui et son humour plutôt noir ou ironique selon les situations. Comme l’héroïne, lui aussi est aveugle, ce qui est aussi énervante que pour Clary. La description qui est faite de lui le fait ressembler à un ange intrépide,  »badass », mais au fond, il cache quelque chose de cassé, une blessure que personne n’a le droit de toucher. Il a fini par me faire mal au cœur. Alec, lui aussi, cache quelque chose, et c’est étrange comme on est capable de voir pour les autres ce que l’on ne voit pas pour nous-mêmes. Son secret est vite dévoilé, et son attitude fait alors sens. Froid, on se rend compte qu’il est malheureux, et que c’est sa façon de le montrer. Lui aussi m’a fait mal au cœur : on se rend compte que le tabou existe aussi dans le monde des Shadowhunters. Quant à Isabelle, j’ai aimé ce personnage. Elle explique son attitude à la fin, et on peut la comprendre. Seule fille au milieu de garçons, elle ne sait pas comment réagir à l’irruption de Clary dans leur vie. J’ai adoré son côté guerrière ! Simon, le seul humain pure souche de la bande, m’a eu l’air très sympathique. Meilleur ami de Clary, il lui cache quelque chose qu’elle aurait dû voir depuis longtemps. Il a l’air un peu d’un geek coincé au début, son humour, parce qu’il n’est pas drôle, fait rire, et ses raisonnements, absurdes dans un monde tel que celui des Shadowhunters, font partie de cet humour. Le lecteur rencontre d’autres personnages, comme Hodge, qui cache pas mal de choses (comme pratiquement tout le monde dans le roman), Luke, qui bouleverse autant la vie de Clary que les événements les plus importants, Jocelyn, que j’ai beaucoup apprécié à travers ce que tous les personnages disent d’elle, elle a l’air merveilleuse, et prête à tout pour protéger sa famille, Magnus Bane, que j’ai apprécié, pour sa façon d’être et son espèce d’humour, Madame Dorothea, sorcière ou humaine ? et, évidemment, un autre personnage qui va retourner le monde sans dessus dessous !

La fin est une véritable bombe, même si je m’y attendais avec le film. Ce dernier retournement de situation m’a semblé un des plus cruels que j’ai eu à lire ! Je ne peux même pas imaginer cette situation ! Et l’épilogue donne envie de lire la suite, même si je me demande bien ce que cela va donner !

 

Donc, un excellent premier tome, qui ouvre au lecteur un monde formidable, peuplé des créatures de toutes les histoires qu’il a pu lire, puisqu’elles sont toutes vraies dans ce livre !

La peste d’Albert Camus

Posté : 1 juin, 2016 @ 11:08 dans Avis littéraires, Coup de cœur | Pas de commentaires »

La peste Genre : Philosophie, Classique

Editeur : Le Livre de Poche

Année de sortie : 1967

Nombre de pages : 247

Synopsis :   »C’est moi qui remplace la peste », s’écriait Caligula, l’empereur dément. Bientôt, la « peste brune » déferlait sur l’Europe dans un grand bruit de bottes. France déchirée aux coutures de Somme et de Loire, troupeaux de prisonniers, esclaves voués par millions aux barbelés et aux crématoires, La Peste éternise ces jours de ténèbres, cette « passion collective » d’une Europe en folie, détournée comme Oran de la mer et de sa mesure.
Sans doute la guerre accentue-t-elle la séparation, la maladie, l’insécurité. Mais ne sommes-nous pas toujours plus ou moins séparés, menacés, exilés, rongés comme le fruit par le ver ? Face aux souffrances comme à la mort, à l’ennui des recommencenments, La Peste recense les conduites ; elle nous impose la vision d’un univers sans avenir ni finalité, un monde de la répétition et de l’étouffante monotonie, où le drame même cesse de paraître dramatique et s’imprègne d’humour macabre, où les hommes se définissent moins par leur démarche, leur langage et leur poids de chair que par leurs silences, leurs secrètes blessures, leurs ombres portées et leurs réactions aux défis de l’existence.
La Peste sera donc, au gré des interprétations, la « chronique de la résistance » ou un roman de la permanence, le prolongement de L’Étranger ou « un progrès » sur L’Étranger, le livre des « damnés » et des solitaires ou le manuel du relatif et de la solidarité – en tout cas, une oeuvre pudique et calculée qu’Albert Camus douta parfois de mener à bien, au cours de sept années de gestation, de maturation et de rédaction difficiles…

 

Avis : Cela fait un certain temps que j’aimerais lire ce livre, et pourtant, j’avais une petite appréhension. J’avais peur de ne pas du tout accrocher, ou de ne pas tout comprendre. 

C’était une lecture plutôt difficile. D’abord, par le sujet traité, la peste. Elle en fait un livre lourd de maladie et de morts, dans lequel le lecteur n’imagine que trop bien l’état physique des patients, le désespoir de ceux qui restent et qui tentent d’aider, le sentiment d’emprisonnement des habitants d’une ville désormais en quarantaine. Elle offre ainsi une myriade d’émotions différentes à celui qui lit, et qui traverse la lecture comme les personnages la peste, dans un huis-clos sombre et pesant qui ne laisse aucune chance d’évasion. L’atmosphère, lourde à certains moments, est allégée par des moments de dialogue et de révélation entre les personnages, mais aussi par un espoir sous-jacent constant. En effet, le narrateur ne cesse de croire en la bonté de l’homme, en l’espoir, en l’amour, et ne veut pas se résigner à ce que le bonheur soit perdu pour tous. Parlant de lui, dès le début, il semble instaurer une sorte de jeu avec le lecteur, lui parlant directement et se nommant lui-même « narrateur », sans nous dévoiler son nom. Il fait partie de la ville, est un personnage à part entière du livre, mais reste mystérieux jusqu’à la fin sur sa véritable identité. Cela donne l’effet d’un carnet qui se retrouverait entre les mains du lecteur, et qu’il serait le seul à lire, comme une espèce de rapport de la peste destiné à être lu par quelqu’un, d’où les nombreuses mentions du terme même de « narrateur ». Par ce procédé, on peut également ressentir une sorte d’impersonnalité, une envie de ne pas s’impliquer et de rester objectif malgré ce qu’il a ressenti. Ainsi, les faits sont rapportés de façon précises, concises, il n’y a pas d’artifices qui embelliraient à l’excès l’écriture. Lorsqu’il est question de la séparation, de la difficulté qu’ont les habitants à se dire qu’ils ne reverront peut-être plus jamais ceux qu’ils aiment et qui ne vivent dans à Oran, une véritable réflexion est introduite : celle de l’exil, des sentiments, de l’ignorance et de la méchanceté, des conséquences d’une telle catastrophe à long terme. Mais ce qui rend également la lecture difficile, c’est un parallèle que j’y ai vu, peut-être à tort, mais auquel je n’ai pas pu m’empêcher de penser. La peste ressemble étrangement à la Seconde Guerre mondiale, notamment en ce qui concernent les Juifs. Le fléau serait les nazis, qui décimeraient autant que possible ceux qu’ils jugent inférieurs. La mention de la séparation d’avec les êtres chers, des mères séparés de leurs enfants et les amants de leurs aimées, les fours crématoires, la peur, l’horreur, l’impossibilité de revenir à la vie « normale » après une catastrophe de ce genre, la notion d’exil, tout m’a fait penser à la Seconde Guerre mondiale, même la date de publication, 1947. Les hommes qui tentent de contrer la maladie sont même appelés « résistants » à un moment donné. C’est une façon particulière de voir la Shoah, comme une chose contre nature et qui n’a aucune raison d’être.

Le narrateur est la voix off qui nous relatent les événements d’Oran, en 194.. Je n’ai pas réussi à deviner qui il était réellement, mais il semble avoir été proche de plusieurs autres personnages dont il nous parle très souvent. Il tente d’être objectif, de ne pas laisser transparaître ce qu’il pense vraiment ; il ne sombre pas dans la défaite, mais parle constamment de la bonté inhérente aux hommes. Un des personnages principaux de son récit est le docteur Rieux. Au fur et à mesure de l’épidémie, il semble sombrer dans la défaite à travers une indifférence croissante envers les scènes de mort qui l’environnent. Il fait tout son possible pour endiguer la maladie, après l’avoir fait accepter en tant que telle à des hommes qui n’y croient pas, pour mettre en place des mécanismes afin de l’empêcher de se propager. Cela semble le vider de son énergie vitale, de son âme ; au fur et à mesure, les sentiments lui manquent, il ressemble de plus en plus à un fantôme, et ne semble tenir que grâce aux autres hommes autour de lui, comme Tarrou. Voyageur coincé dans la ville au moment de la déclaration de la maladie, il semble toujours joyeux, jamais dépassé par des émotions négatives ou positives. Il aide de bonne grâce les médecins à tout faire pour lutter contre la peste, il s’épuise à la tâche, et se révèle peu à peu à la fois à Rieux et au lecteur à travers lui. Celui rencontre également Rambert, journaliste français bloqué à Oran, qui cherche désespérément à s’évader. Il ne se sent pas à sa place dans la ville, se sent deux fois plus en exil que les autres habitants, et ne pense qu’à sa femme. Viennent ensuite Grand et Cottard. Le premier est attachant ; il travaille à la mairie et à une œuvre mystérieuse qui n’avance pas. Il s’épuise à tenter d’aider les médecins ; quant au second, il semble apprécier l’état de peste. Il peut facilement représenter le collaborateur, à qui l’état de guerre et d’occupation sied parfaitement. Il fait des affaires, profite de la maladie pour s’enrichir, et craint sa fin autant que les autres l’espèrent. On croise d’autres personnages comme M. Othon, juge d’instruction, venu à Oran avec sa femme et ses enfants, assez strict ; Mme Rieux, la mère du docteur, arrivée la veille de la fermeture des portes, une présence rassurante dans la vie du médecin, étant donné que sa femme est partie avant la peste.

La fin est douce-amère, marquée par l’injustice et l’espoir, comme le reste du livre. J’avoue que je ne m’attendais à rien de ce qui s’y passe.

 

Donc, un excellent roman qui représente la Shoah de manière allégorique, mettant en relief l’horreur de la situation, le désespoir des habitants, appelés aussi « prisonniers », mais garde quand même l’espoir d’un bonheur futur.

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