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I found myself in Wonderland.

Le Mal des fantômes de Benjamin Fondane

Classé dans : Avis littéraires — 18 février 2016 @ 19 h 56 min

Le Mal des fantômesGenre : Poésie

Editeur : Verdier (poche)

Année de sortie : 2011

Nombre de pages : 260

Synopsis : « De tous les poètes ses contemporains, pas un, ni même ceux qui ont été dans la Résistance, pas un n’a écrit la révolte et le goût de vivre mêlé au sens de la mort comme Benjamin Fondane. Sa situation de fantôme lui-même, y est sans doute pour quelque chose : un émigrant de la vie traqué sur les fleuves de Babylone. Contre les dualismes de la philosophie, il est dans le continu de la vie à partir du poème et du poème à partir de la vie. Par là il est présent. » Henri Meschonnic. Ce volume regroupe sous le titre Le Mal des fantômes les cinq livres de poèmes écrits en français, suivant le désir exprimé par Fondane dans la lettre qu’il a pu faire parvenir à sa femme du camp de Drancy où il fut interné du 14 mars au 30 mai 1944.

 

Avis : Je dois étudier ce livre du point de vue Poésie / Politique / Histoire. Je trouve cette façon d’étudier la littérature très intéressante, et cela me permet aussi d’approfondir ma culture, quasi nulle en poésie du XXe siècle.

Avant de lire ce recueil, il faut connaître son contexte : l’auteur est un Juif qui s’est installé en France, mais qui n’échappe pas à l’antisémitisme nazi pendant la Seconde Guerre mondiale ; il sera emmené à Auschwitz-Birkenau pour y être gazé. A travers ses poèmes, on peut sentir le déracinement constant du peuple juif, le rejet dont il est l’objet, le besoin de trouver une terre accueillante où les Juifs puissent être des hommes comme les autres, la cruauté de l’histoire et de l’Humanité, le sentiment de perte, la mort constante qui les environne, le scepticisme face à un Dieu qui semble les avoir abandonnés, la souffrance d’être traités comme des hommes différents, et même l’affirmation qu’ils sont des hommes, parce que certains l’ont oublié ! Ce recueil dégage énormément d’émotion : on sent vraiment, dans le choix des mots, dans la façon d’écrire les vers, de les déstructurer parfois, la colère ou la souffrance. J’ai souvent eu les larmes aux yeux en lisant certains vers particulièrement forts : mon livre est parcouru de traits de crayon pour marquer les endroits où ils se trouvent !

Petit point sur la structure : le recueil est composé de cinq parties. Tous tournent autour de thèmes récurrents : la nature, l’eau (le fleuve, la mer), la neige, le voyage, l’exil, le bateau, la souffrance. Les poèmes sont parfois adressés, au lecteur, à la nature, à Dieu, aux hommes, au peuple juif. La première partie, « Ulysse« , évoque le voyage par des références mythologiques, en montrant le contraste entre le peuple juif, qui ne peut pas retourner dans sa patrie, et Ulysse, qui la retrouvera à la fin de son voyage. La seconde, « Le Mal des fantômes » reprend les thèmes récurrents pour les appliquer au contexte de guerre. « Non-lieu » est un texte métalittéraire où l’auteur parle de sa façon d’écrire le poème. La troisième partie s’appelle « Titanic » : encore des références, cette fois littéraires et historiques, montrant un espoir vague qui ne mène à rien dès le titre : celui d’un bateau qui coulât. « L’exode, Super flumina Babylonis » est le titre de la quatrième partie. La « Préface en prose » est très forte : l’auteur s’adresse aux hommes pour leur faire comprendre que lui aussi est un homme, un visage parmi les visages, et que, quand il sera mort, le poème perdurera après lui : il leur demande de se souvenir de son innocence … Cette partie est sans doute la plus bouleversante. La dernière, Au temps du poème, évoque la poésie et la littérature à travers les couples Tristan/Yseult et Pâris/Hélène. Le poète semble également se demander l’intérêt du poème ici, son utilité. Un poème s’appelle même « Refus du poème » : la vie ne semble plus poétique au vu des horreurs que l’homme a sous les yeux., ce qui résume bien le ressenti général dans le recueil : le poète s’excuse presque d’écrire dans un de ses poèmes !

 

En définitive, un excellent recueil, fort en émotions, qui nous fait voir la Shoah de l’intérieur, à travers des vers forts qui submergent le lecteur.

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