Redbluemoon

I found myself in Wonderland.

Archive pour janvier, 2016

Tentative d’épuisement d’un lieu parisien de Georges Perec

Posté : 11 janvier, 2016 @ 5:44 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

Tentative d'épuisement d'un lieu parisien Genre : Contemporaine

Editeur : Editions Christian Bourgeois

Année de sortie : 2008

Nombre de pages : 50

Synopsis : En octobre 1974 Georges Perec s’est installé pendant trois jours consécutifs place Saint-Sulpice à Paris. A différents moments de la journée, il a noté ce qu’il voyait : les événements ordinaires de la rue, les gens, véhicules, animaux, nuages, et le passage du temps. Des listes. Les faits insignifiants de la vie quotidienne. Rien, ou presque rien. Mais un regard, une perception humaine, unique, vibrante, impressionniste, variable, comme celle de Monet devant la cathédrale de Rouen. Les mille petits détails inaperçus qui font la vie d’une grande cité – d’un quartier d’une grande cité. Les innombrables variations imperceptibles du temps, de la lumière, du décor, du vivant. Autobus, chiens, passants, touristes. « Ce qui se passe quand il ne se passe rien, sinon du temps, des gens, des voitures et des nuages. » Ce texte magistral dans l’œuvre de Perec figure à présent au rang des classiques.

 

Avis : Je devais lire ce livre pour un cours d’improvisation écrite, et je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre. J’étais assez intriguée, mais je ne l’aurais sans doute pas lu de moi-même.

Tout d’abord, j’ai trouvé ce livre très original : il nous montre un aspect banal de Paris que l’on ne voit pas si souvent, sans nous raconter d’histoire, et dans un genre que peu de gens connaissent ou apprécient : celui de la liste. J’avoue que ce genre m’intéresse par la poésie que l’on peut parfois en tirer, comme dans des extraits que j’ai lus de Notes de chevet de Sei Shonagon ; ici, les listes ont des thèmes, quand Perec préfère observer un quartier de Paris pendant trois jours pour décrire tout ce qu’il voit pendant cet espace de temps. Au début, j’ai eu peur que ce soit très monotone, surtout quand il reprend plusieurs fois la même ligne de train ; mais sa description est parfois coupée de réflexions, ce qui éveille l’intérêt du lecteur – même de petits mots comme « minuscules accidents » ont cet effet, puisqu’ils suggèrent tout ce que ce qui arrive implique pour la personne concernée. Pour autant, le livre est une longue description avec quelques variations, notamment sur l’heure, le temps qu’il fait, la lumière, le nombre de passants, de pigeons. L’auteur joue à chercher les différences entre le premier et le deuxième jour, et se demande ce que cela implique. Quant à l’écriture, elle est excellente, et l’on retrouve parfois des jeux de mots, ou sur les sonorités, qui montrent que, bien qu’il semblerait que tout le monde puisse s’asseoir sur un banc, observer les passants et retranscrire ce qu’il voit, c’est un véritable écrivain qui le fait ici, et que cette description est le prétexte d’autre chose : il montre ici le Paris auquel on ne fait pas attention, la vie quotidienne, celle des gens qui traversent la rue, qui prennent le bus. On aperçoit ici ce qui est de l’ordre de l’inaperçu, de l’évident mais que l’on ne regarde pas, l’envers du décor. Cela nous éloigne des romans qui font de Paris un personnage à part entière du livre.

 

En définitive, un livre intéressant qui montre un Paris que l’on n’a pas l’habitude de voir.

L’ombre de ton sourire de Mary Higgins Clark

Posté : 11 janvier, 2016 @ 11:37 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

L'ombre de ton sourire Genre : Policier

Editeur : Le Livre de Poche

Année de sortie : 2012

Nombre de pages : 401

Synopsis : Olivia Morrow sait sa fin proche : l’heure est venue de révéler un terrible secret familial qu’elle est la seule à connaître. Qui pourrait en effet soupçonner sa cousine Catherine, une religieuse en voie de béatification, d’avoir eu un enfant, à dix-sept ans, et de l’avoir abandonné ? La petite-fille de Catherine, Monica, doit hériter de la fortune colossale de son grand-père, mais, pour qu’elle puisse en bénéficier, Olivia doit lui dire la vérité sur ses origines, rompant ainsi la promesse faite à sa cousine et déshonorant sa mémoire. Non sans risque, car certains n’ont aucun intérêt à ce que cette histoire éclate au grand jour … Un formidable suspense où Mary Higgins Clark mêle science, foi et quête d’identité dans une course haletante contre la mort.

 

Avis : Cela faisait un moment que je n’avais pas lu un policier, et je n’avais jamais lu de livre écrit par Mary Higgins Clark ; je me suis donc lancée !

L’intrigue est simple : une vieille dame mourante veut révéler à une jeune médecin prometteuse l’identité de ses grands-parents afin qu’elle puisse hériter de la fortune de son grand-père. Mais certaines personnes ne veulent pas que cet argent lui revienne, et vont tenter de faire taire Olivia Morrow. L’histoire aurait pu être palpitante, mais quelque chose manquait pour cela : le lecteur sait, dès le début, l’identité de l’assassin, pourquoi il agit, combien il a de complices. Dans les policiers que je lis habituellement, le lecteur doit chercher le coupable dans un jeu de piste adroitement mené par l’auteur ; l’absence de ce jeu m’a un peu manqué ici. Peut-être en raison de ce manque, je me suis sentie étrangement à l’aise dans ce livre : il est facile de démêler les ficelles des criminels, les intrigues annexes se greffent parfaitement à l’histoire principale, et le lecteur sait où l’auteur le mène. En réalité, on sait déjà comment tout va finir : c’est très, et même trop, prévisible. La solution saute aux yeux, tout va dans le sens du protagoniste. Ici, elle est en quête de ses origines, reprenant le flambeau de son père, qui ne connaissait pas l’identité de ses parents biologiques. Autre chose : j’ai trouvé qu’il y a beaucoup de personnages, ce qui tendait à complexifier l’intrigue ; et pas mal de répétitions, de rappels des événements qui viennent de se produire, de conversations rapportées plusieurs fois.

Je me suis facilement attachée à Monica Farrell, le personnage principal. Elle a tout pour plaire : jolie, généreuse, célibataire en quête d’amour, médecin accompli, pédiatre, intelligente. Mais elle semble bien naïve quand elle est victime d’une tentative de meurtre sans s’en rendre compte. Elle ne veut pas croire la police, et, à la fin, se retrouve parano à accuser tout le monde. Olivia Morrow est elle aussi attachante : elle est en proie à une lutte intérieure pour savoir si, oui ou non, elle révèle le secret de sa cousine Catherine. Elle est elle aussi naïve, et ne se rend pas compte des agissements de ses proches, qui complotent contre elle. Ryan Jenner est, comme Monica Farrell, une petite caricature : le beau gosse célibataire qui se rapproche de sa collègue et qui héberge une amie qui va tenter de tout faire capoter. Il est également facile de s’attacher à lui, mais, le schéma est assez barbant à force. Le Dr. Clay Hadley est également un stéréotype : celui de l’homme prêt à tout pour conserver les apparences, mais dont la conscience le torture. J’ai apprécié le personnage de Sally Carter autant que j’ai détesté celui de Renée Carter. Scott Alterman m’a semblé être un peu plus original, je l’ai apprécié. De nombreux autres personnages apparaissent ici ; certains sont des stéréotypes comme les Gannon, excepté Peter, que j’ai fini par prendre en pitié ; d’autres ne sont là que par hasard, et participent à l’intrigue sans s’en rendre compte, comme Sophie Rutowski ou la famille Garcia, adorable.

La fin est tout à fait prévisible, évidente. Aucune surprise ! Tout est bien qui finit bien ; parfois, c’est sympa de lire des histoires de ce genre.

 

En définitive, un bon policier, même si tout est prévisible et que l’assassin est déjà connu. Une bonne lecture détente.

Loup, y es-tu ? de Henri Courtade

Posté : 8 janvier, 2016 @ 3:49 dans Avis littéraires | 2 commentaires »

Loup, y es-tu ? Genre : Conte, Fantastique

Editeur : Folio

Année de sortie : 2013

Nombre de pages : 388

Synopsis : Et si les personnages maléfiques des contes de notre enfance existaient réellement ? Sans doute ces créatures vampiriseraient-elles notre planète. Elles seraient de tous les génocides, manipuleraient les plus grands dictateurs … Tapies dans l’ombre de Hitler ou sous le feu des projecteurs des plateaux de télévision, elles tiendraient dans leurs mains expertes le devenir de l’humanité. Sinistre tableau ! Si de tels monstres vivaient, il serait à souhaiter que leur alter ego bienfaisant existe également ; qu’en ce début de XXIe siècle ces personnages merveilleux s’éveillent et décident de se battre. Et alors … qui sait de quel côté la balance pencherait ? Premier roman de l’auteur, Loup, y es-tu ?, fable moderne mâtinée de thriller, joue avec les codes du conte de fées et du fantastique pour entraîner le lecteur dans une aventure captivante.

 

Avis : Ce livre attend dans ma PAL depuis un certain temps, et j’ai enfin décidé de me lancer ! La couverture est superbe, et présageait déjà une bonne réécriture des contes, un peu plus sombre que la version originale !

Tout d’abord, comme certains lecteurs, j’ai été un peu surprise de découvrir un roman, alors que je pensais lire un recueil de nouvelles. Cela ne m’a pas déçue, au contraire, j’avais envie de me laisser embarquée dans l’histoire au plus vite ! Et dès le début, le charme a opéré. J’ai plongé dans le livre avec plaisir, découvrant des héroïnes féeriques remises au goût du jour, dans une modernité à laquelle elles se sont adaptées, et même, de laquelle elles font partie pour certaines ! Cette adaptation est très originale, différente de toutes celles que j’ai lues pour le moment. Les contes sont pris tels quels et transposés dans la réalité, d’où la mention de l’Histoire. Des événements mondiaux, tels que la Seconde Guerre mondiale ou le 11 septembre 2001, sont utilisés pour montrer la malfaisance des personnages maléfiques du livre. Le lecteur se sent directement impliqué dans le livre grâce à cela, il entre à la fois dans les contes de son enfance et dans la Grande Histoire ; l’auteur parle des expérimentations des nazis sur des hommes vivants à travers le docteur Fringgs, inspiré d’une personne réelle. Cette intrigue annexe se greffe à la quête des héros des contes, qui, comme dans les histoires originales, doivent lutter contre un mal absolu qui veut les éliminer en raison de leur bonté. Petit bémol par rapport à l’histoire : deux héroïnes n’apparaissent que très brièvement, ce que j’ai trouvé dommage. J’aurais aimé voir plus longtemps leur nouvelle vie, le livre aurait été encore plus passionnant ! L’écriture est fluide, simple, donc plutôt agréable à lire ! Enfin, les contes, dès l’origine, n’ont pas abouti : l’histoire s’est arrêtée à un moment donné, elle a été mise en sommeil et reprend dans le monde moderne. Petit plus pour moi : je l’ai déjà dit, je n’aime pas Blanche-Neige, et Loup, y es-tu ? est le deuxième livre à me la faire apprécier ! Ce ne peut donc être qu’un bon livre !

Concernant les personnages, je vais tenter de vous garder la « surprise » en ne donnant que leur prénom. Dans tous les cas, elles sont toutes attachantes, même s’il peut être difficile de s’identifier à elles, parce qu’elles restent inaccessibles car exceptionnelles. Aussi, je les ai toutes trouvées un peu naïves : le mal est sous leurs yeux et elles ne le voient pas, ce qui peut être énervant. Albe est l’héroïne qui est la plus mise en avant, et celle que j’ai préféré. Elle représente très bien l’héroïne d’origine : pure, délicate, courageuse, résolue, douce. Elle est faite pour être aimée, mais aussi pour être protégée, bien qu’elle sache se débrouiller seule. Elle est restée assez « vintage », si je peux dire ; elle a des valeurs, et rêve au prince charmant. Elle est également touchante, émouvante. En revanche, je la voyais peu dans le métier qu’elle finit par exercer, beaucoup plus dans le premier présenté dans le livre. Virginia, quant à elle, est un peu l’opposée d’Albe : rebelle, sarcastique, ironique, elle sait ce qu’elle veut et ne se laisse pas faire. Elle est beaucoup moins innocente que l’héroïne d’origine, et beaucoup plus moderne. Le métier qu’elle exerce est très bien choisi, je trouve, ça lui va très bien ! Il est peut-être plus facile pour le lecteur de s’identifier avec elle parce qu’elle ne croit pas tout de suite à ce qu’on lui révèle sur ses origines et son histoire : elle ne se voit pas du tout dans un conte de fées. Cindy semble assez naïve, pour le peu que j’ai vu d’elle : elle rêve de gloire, et tente tout pour y parvenir. Quant à Isabelle, elle avait l’air très intéressante, je suis sûre que j’aurais adoré son personnage s’il avait été plus exploité ! Rien que le début entrevu a l’air passionnant ; rien que son lieu de vie fait rêver ! Toutes ses héroïnes ont l’air bien faible à côté des « méchants » de l’histoire. Elles n’ont pas de pouvoir offensif, ne maîtrisent pas la magie, et n’ont aucun souvenir de leur passé, quand leurs adversaires se souviennent de tout, un avantage de taille ! Ainsi, Marilyn est la sorcière de l’histoire. Elle est très belle, la plus femme du monde, et elle ne supporte pas la concurrence. Elle veut régner sur le monde par le mal, et se trouve derrière les grands événements mondiaux, comme la Seconde Guerre mondiale. On apprend par la suite qu’elle a deux sœurs, Ogota et Zita, qui œuvrent bien moins qu’elle pour le mal. Elle n’a rien d’humain, méprise même les hommes, incapables de se défendre : elle les manipule, et exerce son pouvoir grâce à la technologie qui a envahi le monde. Elle possède un allié de taille : le Loup, une bête horrible, aux crocs aiguisés, aux griffes acérées. Sauvage, hostile à l’homme, il s’allie tout de même à la sorcière pour obtenir ce qu’il veut. Son aspect n’est révélé aux personnages qu’à la fin du livre. Il n’y a rien de bon en lui : tout n’est que brutalité, sauvagerie et violence pour lui. Il vit dans un monde noir, à part, où la beauté et la pureté n’ont pas du tout leur place. Ces « méchants » sont surpuissants par rapport aux jeunes femmes qui les « affrontent ». Elles ont pourtant des alliés : Franz et Albert, le premier très touchant, qui semble assez fragile, le second qui a l’air plus sûr de lui, plus déterminé, plus courageux ; le Traqueur, mystérieux, sombre, blessé profondément sans que l’on sache vraiment par quoi, attachant, étrange parfois, il est clair qu’il cache quelque chose ; Mae Zinn, personnage que l’on sait issu des contes, mais dont le nom m’a surpris agréablement. D’autres personnages humains se trouvent dans ce livre : Frédéric, assez effacé, mais sympathique, le père d’Albe, touchant, que l’on apprécie facilement, les employés de Marilyn. J’ai adoré le petit clin d’œil de l’auteur aux écrivains originaux avec le nom d’un des personnages, assez attachant d’ailleurs ! J’ai aimé la révélation sur un des personnages, même si j’ai fini par m’y attendre avec quelques allusions dans la narration et chez les autres héros ; c’est très original, un peu logique et inattendu au début.

Dans ce livre, se trouve des réflexions sur le mal ordinaire, sur le mal en général, notamment à propos des camps pendant la Seconde Guerre mondiale. L’auteur, à travers ses personnages, rappelle qu’il faut toujours se souvenir, ne jamais oublier pour ne jamais reproduire. Il n’y a pas d’excuses quand on agit mal : on a toujours le choix, il suffit de faire le bon, même si cela veut dire que le chemin emprunté est plus difficile à arpenter. J’ai l’impression que c’est le destin qui m’a fait lire ce livre au moment de la réédition critique en Allemagne de Mein Kampf, une façon bien plus douloureuse de se souvenir.

La fin est d’abord surprenante, avec la révélation dont j’ai parlé un peu plus haut. Sinon, elle est logique, prévisible quelque part. C’est aussi le dénouement, on comprend tout ce qui pouvait sembler obscur, tout entre dans l’ordre. Bémol : pas de « grande bataille » magique, ou épique, tout se termine un peu vite. Enfin, un épilogue qui donne envie de lire une suite potentielle !! (ou qui laisse en tout cas imaginer une suite possible)

 

En définitive, un excellent roman, presque un coup de cœur !

Les Affinités électives de Goethe

Posté : 6 janvier, 2016 @ 8:32 dans Avis littéraires | 2 commentaires »

Les Affinités électives Genre : Classique

Editeur : Folio

Année de sortie : 1987

Nombre de pages : 333

Synopsis : Intervention de la bloggeuse : je préviens tout de suite que le synopsis est la fin du livre ; je vous le dis au cas où vous ne voudriez pas la lire ! SPOILER

Dans cette situation sans espoir, que servirait-il de rapporter les efforts de toute sorte dont s’étourdirent d’Edouard, l’épouse, l’ami, le médecin ? Enfin on le trouva mort … Ce cœur, en proie naguère à une agitation sans bornes, avait trouvé un imperturbable repos ; et comme il s’était endormi en pensant à une sainte, on pouvait sans doute le qualifier de bienheureux. Charlotte lui donna sa place auprès d’Odile, et ordonna que personne ne serait plus déposé dans ce caveau. Les amants reposent donc l’un près de l’autre. La paix flotte sur leur sépulture. De la voûte, les fraternelles images des anges abaissent sur eux la sérénité de leurs regards, et qu’il sera aimable l’instant où ils se réveilleront ensemble !

 

Avis : J’avais envie de lire ce roman, et je vais l’étudier ce semestre en parallèle avec Corinne ou l’Italie, que j’ai lu en octobre ; je vais peut-être parler de lui aussi, même si je vais me concentrer sur Les Affinités électives.

Tout d’abord, j’étais un peu déçue du synopsis : pour une fois que je le lis, c’est la fin du roman ! Je déteste connaître la fin avant de commencer le livre, donc je me suis arrêtée au milieu de la lecture de la quatrième de couverture, mais le mal était déjà à moitié fait. Ainsi, dès le début, j’avais deviné ce qui allait arriver ; peut-être même que, sans lire le synopsis, il est facile de le sentir, dans la réticence des personnages, dans le pressentiment de Charlotte, dans l’empressement d’Edouard. Ce roman est un roman d’amour, mais comme dans Corinne ou l’Italie, il n’est jamais achevé, jamais vécu pleinement, jamais satisfait, ce qui fait la tragédie de l’œuvre. Toute l’histoire est prédite dès le début par l’explication des affinités électives. J’ai aimé ce passage, qui déroule déjà l’intrigue sans trop en dire, et qui explique le titre de l’œuvre. La fatalité est également présente de ce fait : elle enrobe les personnages, crée des malentendus, les pousse à prendre les mauvaises décisions, et finit par les punir de leurs « crimes ». Ainsi, la religion est elle aussi présente : un des personnages est qualifié de « saint », se rend compte de son « péché » – c’est-à-dire, aimer quelqu’un qui, pense-t-il, n’est pas fait pour lui – et se punit d’avoir cédé à la « tentation ». Cet aspect du livre m’a un peu agacé, comme dans Corinne ; ce n’était pas la religion qui empêchait l’histoire d’amour, mais la société, les conventions. Les personnages s’empêchent de s’aimer alors qu’il y a possibilité de tout arranger s’ils le désirent, en se parlant, en étant francs. Plusieurs sortes d’amour sont présents ici : la passion ; l’amour-raison ; l’amour pureté, enfantin ; le mariage, qui s’apparente ici à l’amour-raison, mais qui est aussi plus libre incarné par les personnages de la baronne et du comte. Le lieu du roman peut faire rêver, puisque Charlotte et Edouard possèdent un château ; cela ne fait pas d’eux des gens heureux pour autant, malgré ce que l’on voit au début. C’est parce qu’ils ont beaucoup d’argent qu’ils peuvent aménager leur jardin, et faire tout un tas de travaux qui traverse le roman. L’écriture, quant à elle, est excellente et agréable à lire, globalement facile à comprendre. Des généralisations sont parfois faites qui parlent au lecteur en le renvoyant à sa situation, à ce qu’il ressent, ou à ce qu’il a vécu. Le passage sur l’enfant m’a touché, et même bouleversé, même s’il est très rapide : je me doutais que cela allait arriver, et la réaction d’Edouard m’a abasourdi. Cela montre encore une fois la fatalité, un destin retors qui punit les personnages.

Charlotte et Edouard sont les premiers personnages que l’on rencontre, et font partie des principaux. J’ai adoré Charlotte : elle est courageuse, forte, contrairement à son mari, qui se laisse complètement aller. Elle pense d’abord aux autres avant de penser à elle, préfère ainsi privilégier les sentiments des autres, plutôt que les siens. Elle est organisée, lucide, elle sait ce qu’elle veut et ce qu’elle peut avoir ; elle aime passionnément, mais préfère la raison. Elle peut agacer par ce choix : elle semble une martyre, elle s’efface complètement et veut conserver les apparences ; mais cela montre d’autant plus son courage, son dévouement, et sa lucidité. Elle se refuse à blesser son mari, et pourtant, c’est ce qu’elle fait. A la fin, elle est complètement lucide, ose dire tout haut la situation dans laquelle elle se trouve et prendre la décision qui s’imposait depuis le début. En revanche, Edouard m’a exaspéré. Entêté et passionné, il semble très égoïste et se laisse emporter par ses sentiments sans réfléchir. Il finit par mépriser sa femme, ainsi que son ami, et ne pense plus qu’à son amour tout neuf. Même quand il comprend que c’est impossible, il insiste, il supplie : la passion parle à travers lui. Je pense que tout amoureux passionné réagirait de cette façon, c’est ce qui est d’autant plus agaçant, de se reconnaître dans cet égoïste qui ne voit que son bonheur avec sa belle et occulte tout le reste. Il en devient même cruel : si des gens meurent, ou manquent de mourir, il ne veut pas pour autant rater ce qu’il a prévu pour son aimée, même s’il doit y assister seul avec elle. Odile est également un des personnages principaux : douce, pure, elle ne connaît pas l’amour, et encore moins la passion, qui l’emporte sans retour. Elle semble une jeune fille particulière, singulière, mais attachante, qui sait beaucoup de choses, et qui s’attèle facilement à la tâche. Elle aime tendrement Charlotte, sa tante, et est prête à tout pour l’aider et la rendre heureuse. Quelque part, on peut dire qu’elle s’inspire d’elle dans son attitude à la fin. Elle est jeune et ne comprend pas tout de suite l’impact de ce qui lui arrive. Peu à peu, elle semble parfaite, les hommes papillonnent autour d’elle et l’aiment dès qu’ils la voient, tant elle est gracieuse, belle, un ange. De nombreuses fois, l’adjectif « céleste » est utilisé pour la qualifier. J’ai également apprécié le personnage du capitaine, qui semble d’abord importun, puis sépare le couple en accaparant Edouard. Il est viril, patient, et sait rester à sa place. Il est aussi sensible, mais fait en sorte que cela ne soit pas visible. Il aime, mais reste en retrait. D’autres personnages sont également présents, comme Lucienne, la fille de Charlotte, exécrable et détestable, une petite égoïste qui ne se préoccupe que d’elle-même et d’être aimée, le jardinier, un personnage émouvant, qui aime ses plantes comme ses enfants, l’architecte et l’assistant, deux hommes qui feront beaucoup pour la famille et qu’Odile attire comme la lumière, Courtier, un homme dont le nom de famille correspond tout à fait à sa façon d’être ! ; le comte et la baronne, qui donnent l’exemple d’un amour qui se cherche depuis longtemps et qui se trouve enfin !

La fin était évidente, prévisible, attendue, elle sautait aux yeux ! On peut, bien sûr, en espérait une autre, mais tragédie oblige !

 

En définitive, un bon classique, qui montre une retenue amoureuse, et un égoïsme difficiles à supporter, qui offre le portrait de quatre personnages différents, touchés par la théorie des affinités électives de plein fouet.

La Dérivante, tome 2 de Dale Peck

Posté : 4 janvier, 2016 @ 9:31 dans Avis littéraires | Pas de commentaires »

La Dérivante, tome 2Genre : Jeunesse, Fantastique

Editeur : Albin Michel (Wiz)

Année de sortie : 2009

Nombre de pages : 346

Synopsis : Perdus sur l’océan du Temps ! Charles et Susan revoient enfin leur oncle Farley et son étonnante maison-bateau, La Dérivante ! A peine sont-ils arrivés qu’un raz de marée venu de l’océan du Temps entraîne La Dérivante, séparant les enfants. Avant même d’avoir compris ce qui se passait, Charles se retrouve perché sur un arbre avec un livre et un perroquet pour unique compagnie. Susan et l’oncle Farley, eux, dérivent à bord de la maison-bateau sans savoir où elle les mène. Le pire est à venir : ils ne sont pas seulement séparés dans l’espace, mais aussi dans le temps ! Comment se rejoindre, et où ? Et s’ils n’étaient plus jamais réunis ?

 

Avis : J’ai lu le premier tome de cette série il y a longtemps, et je n’arrivais pas à trouver celui-ci. Dès que je l’ai vu, j’ai sauté sur l’occasion !

J’ai eu du mal à entrer dans l’histoire dès le début. On se trouve à New-York, chez Susan et Charles, qui se disputent. Ils font alors la rencontre du concierge de leur immeuble, qui semble immédiatement étrange au lecteur. Dès cette scène, les personnages m’ont agacé, et ça ne s’est pas amélioré pendant la lecture. Les dialogues sonnaient faux, je n’ai pas retrouvé ce que j’avais aimé dans le premier tome, comme le vocabulaire « précieux » répertorié par Charles, qui m’avait semblé prendre plus de place dans Les Sirènes. L’écriture était assez lourde, un peu comme dans Le Monde de Narnia, et cela m’a gêné : il n’y a pas vraiment de fluidité. Aussi, les dérives temporelles m’ont peu à peu perdue : je ne voyais pas où l’auteur voulait en venir, et ça a fini par m’agacer. Pourtant, dans la scène où les cités perdues apparaissent dans un des salons de la Dérivante, je me suis dit que l’histoire commençait, et qu’elle allait devenir très intéressante. De plus, j’ai également apprécié l’idée d’un livre ensorcelant qui guide les personnages où bon lui semble, qui les attire et les séduit, sans qu’ils sachent quel est réellement l’impact de ce sort. Il tient une grande place dans le dénouement, qui m’a semblé au combien tiré par les cheveux ! On découvre aussi de nouveaux environnements dans ce livre, mais ils ne sont pas exploités à fond : on ne les approche qu’en surface.

Susan et Charles sont les personnages principaux du livre. Ils ne cessent de se disputer, et finissent par se méfier l’un de l’autre. Leur hostilité les mène à s’éloigner ; pourtant, avec l’avertissement de M. Zenubian pour Charles, je m’attendais à quelque chose de plus grave entre les deux enfants, de plus radical, qui les éloigne définitivement l’un de l’autre, qu’ils ne se considèrent quasi plus comme un frère et une sœur. Mais cette animosité est oubliée dès que les deux enfants sont séparés. Susan est l’aînée de la famille, ce qui fait d’elle l’enfant qui obtient toutes les responsabilités une fois que les adultes sont partis. Elle semble abuser de ce « pouvoir », ce qui exaspère son frère. De plus, étant donné que l’on semble plus avoir le point de vue de Charles que le sien au début, elle semble parfois hystérique. Elle s’énerve pour montrer qu’elle est la plus âgée, qu’elle a donc plus de droits que son frère, ou en tout cas, autant que lui sur le livre. Charles, quant à lui, est convaincu que le livre n’est destiné qu’à lui, et le surveille jalousement. Sa sœur l’agace, il ne comprend pas pourquoi elle aurait plus de droits que lui parce qu’elle est plus grande de quelques années. Il veut prouver sa valeur, et vivre une aventure comme celle de Susan dans le premier tome. Dès qu’il pense vivre une aventure, il se prend pour un héros, se montre arrogant, et la situation dans laquelle il se trouve alors le fait vite redescendre sur terre. Il est intelligent, et se rend vite compte du pétrin dans lequel il se trouve. Oncle Farley est un personnage ambigu : on peut le trouver attachant et réconfortant, comme on peut le voir comme irresponsable, inutile, et craintif. Capitaine de La Dérivante, il accueille les enfants pour l’été dans sa maison flottante. Il n’a aucune autorité sur ses neveux, il ne semble pas très courageux, ni débrouillard, et la scène de son arrivée à Osterbygd montre à quel point il est ridicule. Président Wilson est un perroquet parlant, qui ne cesse de râler ou de donner des leçons aux autres. C’est peut-être le personnage que j’apprécie le plus. Murray est toujours aussi étrange et mystérieux, dérangeant même peut-être. On ne comprend pas trop comment il en arrive là où il se trouve, et le fait qu’il soit prisonnier du temps rend ses apparitions d’autant plus étranges. D’autres personnages se trouvent dans ce livre, comme Iacob que j’ai apprécié, même s’il est aussi agaçant que les deux autres enfants parfois, Tankort, représentant d’une culture différente de la nôtre, l‘Errant, personnage mystérieux, Mme Applethwaite, que l’on ne voit toujours pas.

La fin montre un nouvel aspect de l’Histoire, et explique le pourquoi d’un geste. Après celle-ci se trouve le glossaire du vocabulaire précieux de Charles, qui m’a aidé à comprendre ce qu’était un umiaq et une ziggourat.

 

En définitive, une petite déception.

12
 

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