Moby Dick de Herman Melville
Editeur : Everyman
Année de sortie : 1996
Nombre de pages : 478
Synopsis : The epic tale of Captain Ahab’s hunt for the white whale. Moby-Dick, the white whale: emblem of nature yet unnaturally pale, tender and violent, god and demon, an enigma to which Ahab is bound by ropes of vengeful obsession. The Pequod: whaler out of Nantucket, with its polyglot world crew bound upon a voyage for spermwhale, a ship of the damned driven by its ungodly captain to the edge of the void. Ishmael: named for a Biblicat outcast, narrator, masthead philosopher, sole survivor.
Avis : J’ai appris à la rentrée que j’allais étudier Moby Dick cette année, et qu’il fallait donc que je suspende mes autres lectures pour m’y mettre au plus vite ! La couverture montre bien le sujet du livre : la traque d’une baleine bien particulière par un capitaine obsédé par elle.
Je m’attendais vraiment à lire un roman d’aventures, avec beaucoup d’action ; ce n’est pas du tout ça ! Il y a très peu d’action : les seules qui apparaissent sont les scènes de chasse, et elles sont assez horribles. Peu de dialogues également : c’est surtout le narrateur qui nous décrit la vie sur le bateau, et qui nous fait part de ses pensées, de ce qu’il voit chez les autres personnages. Parfois, j’ai eu l’impression de lire un documentaire sur la baleine, ou sur sa chasse, tant certains chapitres ressemblent à des traités sur, par exemple, la tête de la baleine, ou sa représentation picturale, ou sur les plats qu’on peut tirer de sa viande, ou ce pour quoi chaque partie est utilisée. Ces chapitres sont de vraies digressions dans la narration, des écarts, et parfois, le lecteur ne sait plus vraiment où il en est : cela rend le livre un peu décousu. Surtout, il peut ne pas voir l’importance de ses passages qui, parfois, ne semblent pas en avoir : il a l’impression que le narrateur donne trop de détails, et il ne sait pas à quoi ils servent. De plus, la vie sur la baleinière est décrite avec énormément de détails elle aussi, tellement que là encore, le lecteur peut se retrouver perdu. Je dois avouer que ma lecture a été fastidieuse, très pénible parfois, mais que je ne regrette pas de l’avoir lu pour autant. Sans doute le fait de devoir le lire sous la contrainte et dans un temps imposé m’a gênée. Je pense que je le relirai plus tard pour avoir un nouveau point de vue, et peut-être, une meilleure compréhension.
Derrière l’histoire de cette chasse pourtant se trouve une vraie réflexion, une profondeur, grâce aux nombreuses références littéraires que le lecteur peut y trouver, mais aussi grâce aux références religieuses et surtout bibliques, omniprésentes dans le texte. Par exemple, Jonas et le fait qu’il ait été avalé par une baleine est mentionné plusieurs fois, et même approfondi à un moment donné. L’ange Gabriel apparaît, le Christ est évoqué implicitement. Un des personnages, le capitaine Achab, pense réaliser l’œuvre de Dieu, pense agir selon ce que Dieu veut, puis semble se prendre pour lui : le vocabulaire religieux et les mentions sont très présentes dans son discours.
Concernant les personnages : Ishmael, le narrateur, est censé être le personnage principal, puisque c’est lui qui raconte ce qu’il a vu sur le Pequod. Au début du roman, il nous parle de lui et de son besoin de partir en mer, de sa rencontre avec Queequeg, de leur amitié, puis de leur enrôlement sur un bateau. Et à partir d’un moment, j’ai trouvé qu’Ishmael était complètement effacé : il se fond dans le décor du bateau et devient un simple spectateur de ce qui arrive. De plus, grâce à mes cours, je me suis aussi rendue compte qu’il n’était pas cohérent. Il est à la fois une première personne et un narrateur omniscient, un peu comme un dieu qui voit tout alors qu’il ne se trouve pas sur place. Pourtant, Ishmael est bien un homme. Dans tous les cas, ce personnage permet bien l’immersion du lecteur dans la vie sur la baleinière. Le capitaine Achab (Ahab en anglais) m’a semblé être le vrai personnage principal. Il est borné, têtu, certain d’être investi d’une mission et de devoir débarrasser le monde du monstre qu’est Moby Dick. Il est très dur, avec les autres et avec lui-même, il ne ménage personne pour parvenir à ses fins. Il est vraiment obsédé par le personnage éponyme, parce que celui-ci lui a arraché une jambe lors de leur rencontre, et que le capitaine y a vu une provocation. Le couple que les deux personnages forme est assez spécial : on ne sait pas qui est vraiment le « méchant », et qui est le « gentil », chacun faisant du mal à l’autre. Achab est dans une logique de destruction : lors de sa rencontre avec Moby Dick, l’un des deux mourra, les deux ne peuvent pas cohabiter. Ainsi, Moby Dick est le colosse des mers, la terreur des baleiniers, le roi dont on entend parler dans tout le livre, mais qui ne fait son apparition que très très tardivement, pour son grand final. Le lecteur se rend vite compte que ce n’est pas une baleine comme les autres : d’abord, c’est un cachalot mâle, il a un nom, et a causé des naufrages de baleiniers qui ont tenté de le tuer ; mais il a aussi l’air d’avoir une intelligence particulière, de ne pas être qu’un cachalot, qu’un animal. Derrière Moby Dick, le lecteur trouve beaucoup de références, comme derrière les baleines en général. Dans ses petits traités sur l’animal, le narrateur l’encense, nous montre son intelligence, sa vivacité et son côté pacifique, mais aussi son immensité, sa puissance, sa monstruosité. Moby Dick semble avoir deux facettes : un animal majestueux, puissant, magnifique, et un monstre terrifiant, gigantesque, qui peut détruire un bateau en deux coups de queue ; mais jamais il ne peut être dit de Moby Dick que c’est une petite baleine sans défense face aux hommes ! Il représente la force de la nature, la force divine dans la mer. Le lecteur rencontre d’autres personnages dans le roman comme Queequeg le harponneur, ami du narrateur, cannibale, adorateur de Yojo ; Starbuck, Stubb et Flask, les seconds du capitaine Achab, si on peut les appeler comme ça : le premier est assez pessimiste et prudent, il désapprouve le projet d’Achab, le second plus dans l’humour constant, même s’il devient noir, et le dernier est un peu effacé face aux deux autres, qui passent toujours avant lui ; Tashtego et Dagoo, les deux autres harponneurs du bateau ; les autres marins de l’équipage, mais aussi ceux d’autres bateaux rencontrés en chemin : chaque rencontre est l’occasion d’une histoire de laquelle, parfois, une morale ressort ; l’une d’elles montre l’obsession délirante d’Achab pour Moby Dick.
Les scènes de chasse à la baleine sont des scènes de tuerie qui m’ont fait frissonner, et que j’ai eu du mal à lire sans avoir de haut-le-cœur. C’est très violent, et très sanglant : la baleine n’a aucune chance, même si elle est dangereuse. Parfois, elle tue l’équipage du canot qui la poursuit, mais c’est plus par maladresse ou par défense que par agression. La description de la « flurry » de l’animal est ce qu’il y a de plus horrible il me semble. Le narrateur, à chaque scène de ce genre, montre la tristesse du spectacle, mais aussi la condamnation de ceux qui tuent des êtres pacifiques, créatures de Dieu.
J’ai lu Moby Dick en VO; certains termes et expressions (même les noms des personnages) ne peuvent pas être rendus en français, parce qu’il n’existe pas d’équivalent, ou parce que le jeu de mots n’est pas possible. Je pense que l’anglais a ajouté de la difficulté à la lecture, notamment pour le vocabulaire technique de la baleinière, que je ne maîtrise déjà pas en français ! L’ancien anglais est aussi utilisé, ce qui ne facilite pas la compréhension. Je le conseille quand même en VO pour ceux qui ont l’habitude d’en lire !
La fin est évidente, mais très rapide, peut-être un peu trop. C’est très soudain, et même si le lecteur s’y attend, il peut être un peu déçu. L’épilogue ne m’a pas paru cohérent concernant Ishmael, et la façon dont il s’en sort m’a paru très ironique ! Je me suis sentie un peu vide, un peu triste, après ma lecture, je me suis dit : « c’est fini, voilà ». Comme ma lecture a été assez difficile, je ne m’attendais pas à me sentir comme ça ! C’est un peu une épopée qu’il faut vraiment avoir envie de lire pour la finir !
En définitive, c’est un livre que je n’ai lu ni pour le plaisir, ni avec plaisir, mais je pense le relire plus tard pour en avoir une autre vision car c’est un grand chef-d’œuvre de la littérature américaine, et j’ai l’impression d’être un peu passée à côté !
4 commentaires »
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Ah, tu m’en as parlé de celui là haha ! Je passe mon tour…
Comme je te comprends !!
j’ai eu beaucoup de mal avec cette lecture (et pourtant j’avais une version jeunesse raccourcie!), que ce soit le style ou le thème, vraiment je n’ai pas accroché :/
Je te comprends ! C’est assez difficile d’entrer dans l’histoire, de s’attacher aux personnages et d’avoir des repères …