Redbluemoon

I found myself in Wonderland.

Hedda Gabler de Henrik Ibsen

Classé dans : Avis littéraires — 14 janvier 2015 @ 23 h 54 min

Genre : ThéâtreHedda Gabler

Editeur : Le Livre de poche

Année de sortie : 2014

Nombre de pages : 187

Synopsis : Hedda Gabler est plus qu’un personnage, c’est la figure emblématique d’un romantisme devenu impossible, la métaphore d’une époque révolue. Elle est l’un des grands personnages féminins du théâtre européen, au même titre qu’Antigone ou Andromaque.

 

Avis : Cela faisait un moment que je n’avais pas lu de théâtre : cela m’a fait du bien ! La couverture est déjà assez représentative de la pièce : une femme à un balcon qui regarde vers l’extérieur, mais elle est aussi un peu tournée vers l’intérieur, enfermée dans son monde et n’accédant pas à celui qui est en face d’elle.

La pièce est divisée en quatre actes, qui, eux, ne sont pas divisés en scènes. Ils sont assez rapides à lire, et le fait qu’il n’y ait pas de « pause » à l’intérieur ne m’a pas paru gênant. Les descriptions de lieu sont assez longues, cela m’a un peu fait penser à l’irruption d’un roman dans la pièce. Cela permet de très bien s’imaginer l’endroit où l’action se déroule, endroit qui est le même tout le long de la pièce. On s’y habitue facilement, et les différentes atmosphères donnent l’impression que l’on change de lieu sans en changer. Cette pièce se déroule en deux jours, il me semble, deux jours où beaucoup de choses se passent dans la vie des personnages. Hedda et Tesman viennent de rentrer de voyage et découvrent leur nouvelle demeure alors que deux de leurs vieux « amis » arrivent en ville et se rendent chez eux. Commence alors un entrelacement de secrets et de révélations subtiles que j’ai pris plaisir à découvrir. En effet, on comprend vite qu’Hedda cache quelque chose, un secret qui ne nous est révélé qu’à demi-mots. Tout est vraiment fait en subtilité dans cette pièce. On doit lire entre les lignes pour bien comprendre ce qui est arrivé aux personnages, mais aussi ce qu’il est en train de se passer. Les répliques d’Hedda, notamment, sont peuplées d’images, de métaphores qui montrent son point de vue sur la vie.

Les didascalies sont très présentes dans cette pièce, et j’ai trouvé qu’elles aidaient vraiment à comprendre l’intériorité des personnages. Cela est beaucoup plus compliqué dans une tragédie de Shakespeare où il n’y a pratiquement pas de didascalies, en tout cas, aucune sur le ton des personnages ou l’expression de leur visage, ce qui les rend un peu difficiles à cerner. Ici, au contraire, c’est très simple. En effet, Hedda semble vraiment arrogante et au-dessus de tout le monde dans cette pièce. Elle vient d’un milieu aisé qu’elle ne retrouve pas dans sa nouvelle demeure et cela la gêne. Elle semble, à première vue, assez superficielle. Mais par la suite, le personnage prend une certaine profondeur. Hedda réfléchit sur la vie qu’elle va mener, sur la vie qu’elle a menée : j’ai pu le constater dans ses conversations avec le juge Brack. La jeune femme est aussi un personnage très manipulateur et, cela m’a un peu surpris, assez violent (sur certaines éditions, on comprend cette violence dès le synopsis avec la mention des pistolets du général Gabler, le père d’Hedda). C’est un être passionné aux prises avec sa propre vie. Elle se préoccupe peu de la vie des autres, qui ne semble pas lui importer, et ne pense qu’à la Beauté, ainsi qu’à son niveau de vie qu’elle voudrait supérieur. Tesman, quant à lui, m’a semblé assez ridicule ; en tout cas, lorsqu’il est avec Hedda. Elle le rabaisse constamment sans qu’il s’en rende compte, et cela donne parfois des situations un peu comiques. Il n’est pas très original, il est assez classique, et ne se préoccupe que de la culture et de ses vieux livres. Il ne connaît absolument pas Hedda, et je me suis demandée tout le long du livre ce qu’ils pouvaient bien faire ensemble ! Le personnage de Ejlert Lövborg est plus original, et sans doute plus propre à plaire aux lecteurs et aux autres personnages eux-mêmes. Lui est original, même avant-gardiste, et plaît aux femmes, c’est indéniable. Il est un peu l’élément perturbateur de la pièce, puisque c’est son arrivée qui déclenche tout ce qui va arriver. Thea Elvsted m’a plu, et m’a fait pitié en même temps. Elle semble très influençable, et très peu intelligente lorsqu’on la découvre pour la première fois ; en tout cas, Hedda me l’a fait voir de la sorte. Elle semble passionnée mais incertaine de la marche à suivre, ce qui refroidit complètement sa passion, et la fait paraître assez ridicule parfois (encore une fois, surtout à cause d’Hedda). Elle se laisse manipulée par le personnage principal et ne réagit jamais (comme Tesman et Lövborg). Quant au juge Brack, je n’ai pas apprécié ce personnage. Il profite de la situation pour obtenir ce qu’il désire et se sert lui aussi des autres personnages. Il est la cause de la fin de la pièce.

Je pense que la fin ne pouvait pas être différente. En ce qui concerne Lövborg, elle était évidente après ce qu’Hedda a fait pour lui. Pour Tesman et Thea, je trouve que cela les rend d’autant plus méprisants pour le personnage principal puisqu’ils rendent complètement inutile ce qu’a fait Hedda. Concernant celle-ci, la fin est aussi évidente après avoir pris du recul. Un personnage aussi passionné ne peut finir autrement.

J’ai lu quelques avis où Hedda était désignée comme un mélange de Madame Bovary et d’Antigone. Après réflexion, c’est vrai que ce mélange peut convenir (elle s’ennuie comme Emma, et cherche une échappatoire comme Antigone), mais j’ai trouvé Hedda plus « masculine« . Sa façon d’agir, de parler, et la manière dont finit la pièce pour elle m’ont fait penser aux grands personnages tragiques masculins plus que féminins. Emma est fleur bleue : Hedda n’a rien à voir avec un quelconque sentimentalisme, au contraire, elle est très froide et distante. Antigone, elle, cherche à agir pour son frère : il semble qu’Hedda n’agisse que pour elle-même. J’ai trouvé que la fin le prouvait bien.

 

En définitive, une pièce que j’ai appréciée, où il faut lire entre les lignes. J’ai particulièrement apprécié le personnage d’Hedda, passionné et violent. 

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